Chapitre 4

0 0 0
                                    

À l'entrée de la salle, deux hommes se font face et ne semblent vraiment pas ravis de se voir. Ils se jaugent et Juliette comprend que cela peut vite tourner au vinaigre. Depuis sa place, cette dernière les reconnaît immédiatement. Le petit garçon qu'elle a aimé autrefois est devenu un beau jeune homme même s'il a gardé quelques traits juvéniles. La colère qui sculpte son visage n'enlève rien à sa beauté. Quant à Théo, il n'a pas beaucoup changé non plus. Les deux hommes s'insultent et s'empoignent. L'altercation se corse et Maxence se jette sur Théo. Les coups commencent à pleuvoir, mais plusieurs personnes s'interposent pour séparer les deux rivaux. La tension redescend difficilement, mais Maxence cède et se dirige vers le balcon pour prendre l'air. De son côté, Théo est entouré par ses anciens camarades de classe. Il semble qu'ils aient choisi leur camp et que l'influence que la famille de Théo avait sur la ville dans les années 1 990 soit toujours aussi forte. Pauvre Maxence, les choses ont l'air d'avoir vraiment mal tourné pour lui. Si la rumeur est vraie, il est victime de ce que Théo lui a fait subir, mais il est aussi victime du jugement des gens qui le mettent de côté et lui reproche de vouloir se faire justice.


Juliette s'excuse auprès de Jérémy et se dirige vers le buffet pour prendre deux flûtes de champagne. Personne ne remarque qu'elle prend la direction du balcon. Tant mieux, elle ne tient pas à être dérangée. Devant un soleil couchant au cœur d'un mélange d'orangés et de rosés, Maxence est là, le regard perdu sur l'horizon, le dos vouté comme s'il tentait de supporter tout le poids du monde. Il paraît las, abîmé par la vie et fatigué de ne pouvoir faire entendre sa voix. Juliette s'approche doucement pour ne pas le brusquer.

« Toi aussi, tu serais mieux ailleurs ?

Maxence se retourne dans un sursaut. Il dévisage la femme une seconde avant de remettre un prénom sur son visage.

— Juliette ? Tu es venue ?

Avec un sourire, elle lui tend une flûte tout en lui répondant.

— Je n'avais pas envie de rester cachée. Et toi, tu es quand même venu ?

Le regard de l'homme s'assombrit. Il comprend que ce qu'il a vécu n'est secret pour personne. Il soupire, désabusé.

— Je vois que tu es courant.

— Je ne sais pas vraiment. J'ai entendu une rumeur et je la prends comme ce qu'elle est, une rumeur.

Maxence plonge son regard dans celui de Juliette. Ce qu'il y lit le rassure. Son ancienne camarade semble simplement bienveillante et sincère.

— Et tu ne me juges pas ou ne penses pas que je n'ai eu que ce que je méritais ?

Juliette fronce les sourcils. L'homme semble si désemparé.

— Comment pourrait-on mériter une telle chose ? Et si je ne m'abuse, c'est toi la victime dans l'histoire donc je ne vois pas pourquoi tu devrais être jugé.

Son ancien camarade se décrispe. Les paroles de la femme lui font un tel bien qu'une chape de béton semble quitter ses épaules. Qu'est-ce qu'il est bon de se sentir compris au moins une fois dans sa vie ! Cela lui arrache même un petit sourire.

— Tu n'as pas changé. Tu as toujours été juste.

Juliette sourit et en profite pour lui tendre l'une des flûtes. Les deux flûtes tintent l'une contre l'autre tandis que leurs regards s'accrochent.

— Santé.

— Santé.

La voix de Maxence est un doux murmure.

— Alors, dis-moi, Juliette. Pourquoi es-tu ici ?

Elle s'appuie contre le rebord du balcon, les yeux fixant l'horizon coloré et lui répond d'un haussement d'épaules.

L'ombre des souvenirsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant