Deos Dormit (En Pause)

Prologue - À Jamais

<< Pourquoi ceux avec des étoiles dans les yeux sont toujours les plus rapides à mourir ? >>

Ce fut cette pensée qui effleura la conscience du jeune homme quand son regard plongea dans le firmament qu'était celui de la fille à ses cotés. 

Son amante.
Sa raison d'être.
La proie d'un destin bien trop cruel. 

Nonobstant toute la douleur qu'il savait contenue en sa frêle personne, elle lui sourit. Le même sourire qu'il avait toujours connu. Ses lèvres s'étaient étirées en la même courbe allègre, la même émotion sincère, la même expression qui avait toujours été sa lumière.

Absolument la même.

Comme si le monde autour d'eux ne tombait pas en autant de morceaux qu'il n'y avait d'étoile dans le ciel.

Et il ne put que penser, alors que la fin emportait tout... qu'elle, l'élue de son cœur et de son âme, était magnifique. Comme toujours.

Une forte bourrasque vint mêler un violent vent à sa chevelure, et la jeune femme tourna la tête, le cœur battant.  Il suivit son regard, affirmant la prise de sa main sur l'épaule de sa bien aimée, comme si une partie de lui craignait de la voir soudain se faire emportée par le souffle tempétueux. De le quitter.

Onques il ne pourrait le supporter.

Elle passa alors sa main sur la sienne... et c'est ainsi qu'il se rendit compte des tremblements qui malmenaient l'intégralité de son être. 
La jeune fille ne fit que nouvellement accrocher ses yeux de ses orbes argentées, son sourire un fort large :

— Tu n'est pas obligé de me suivre dans cette folie.

Il ne put que la fixer, silencieux. Elle continua :

— Moi, je le dois. Je suis obligée d'y aller. Mais pas toi.

Une unique larme. 

— Jamais toi, acheva-t-elle.

— Jamais sans toi.

Le jeune homme força son corps à se calmer et la jeune femme à se retourner, faisant volte-face, enfermant ses mains dans les siennes. Et leurs regards se rencontrèrent.
La peau de la fille était une morsure frigide contre sa chair, mais l'homme n'y accorda point d'attention. Celle-ci s'était toute concentrée sur cette jeune femme à la nitide paire d'yeux, arrondie par la surprise, son doux visage présentement baigné de larmes.

— Je ne veux pas d'une vie sans toi. Jamais. Et si je dois te suivre aux portes de l'Enfer pour être à tes cotés, alors je le ferais. 

Sa compagne rigola légèrement à l'affirmation, frôlant la main de son amour lorsque celui-ci se mit à effacer les coulées larmoyantes sur son faciès de ses doigts. Son toucher était une tendre caresse ; on aurait presque cru qu'il avait peur qu'une trop grande pression ne la brise. 

Ce qui aurait bien pu lui arriver, à n'importe quel moment... mais elle n'avait d'autre choix que de résister. Pour l'heure tout du moins. Pour lui.

— Tu sais que c'est ce que je dois faire, d'une certaine manière... souffla-t-elle alors, pressant sa joue contre la paume du jeune homme.

— Oui, répondit-il, c'est pour ça que je l'ai dis. Je sais. Et je suis prêt si tu l'es.

Ils se dévisagèrent ainsi pendant encore quelques secondes, des millénaires pour leurs regards et doigts entrelacés. Encore quelques secondes. Juste quelques secondes.

Ils avaient tout perdu... presque tout. Mais ensemble, ils allaient tout reprendre - ou mourir en essayant. Ensemble. Du temps qu'ils seraient ensemble. Pour toujours.

— Reste avec moi.

— À jamais.  

Et c'est avec leurs mains l'une dans l'autre et leur promesse scellée, qu'ils avancèrent, tout sourire, vers la fin du monde. 

— À jamais...