SUR LA ROUTE DU BONHEUR III

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Lorsqu'elle est arrivée au petit déjeuner organisé par Alice, elle a été présentée à Jane, une charmante rousse, particulièrement grande, voire très grande, et probablement la voisine que tout le monde évite. Jane n'a pas arrêté de parler d'elle-même et de son fiancé, captivant l'attention de tous pendant toute la matinée.

– Ensuite ? Dit Lana, sans vraiment s'intéresser.

– Ensuite, Zac m'a offert une bague en diamant et m'a demandé d'être sa femme.

Lana observe avec attention les Miller, une famille composée uniquement d'une mère et de sa fille, qui sont captivées par les paroles de Jane qui continue de parler. Lana échange un regard complice avec la petite Sophie, qui lui répond avec un sourire tout en tenant sa peluche fermement contre elle.

– Eh bien..., il a vraiment sorti le grand jeu ! constate Lana.

– Oh non..., la promenade dans la forêt et un dîner à côté de l'étang c'était, un peu prévisible..., un peu cliché !

– Lorsque Henri m'a demandée en mariage, c'était au retour d'un club. Il était bourré. Il a sorti la bague dans la rame de métro et a vomi dessus.

Jane tente maladroitement de prendre une bouchée de son omelette. Son front est étrangement petit, ce qui contraste fortement avec son nez. Lorsqu'elle approche la fourchette de sa bouche, la nourriture semble toujours toucher le bout de son nez avant d'atteindre sa bouche.

Un sourire amusé se dessine sur ses lèvres, mais elle s'efforce de le dissimuler pour ne pas vexer sa voisine.

– Tu n'as pas accepté j'espère !
– Tu plaisantes ? Je lui ai dit oui bien sûr ! Mais, ça n'a pas durée longtemps...

La propriétaire de la maison rassemble quelques assiettes vides éparpillées sur la table, ce qui incite Lana à se lever instinctivement pour offrir son aide. Cependant, Alice la stoppe d'un geste de la main, lui adresse un sourire reconnaissant et l'invite à se rasseoir. Pendant ce temps, Jane semble ne pas s'en soucier du tout.

– Est-ce que tu as eu un enfant avec lui ?

– Non, et honnêtement, c'est mieux ainsi. Nous n'étions pas faits pour être parents ensemble. Mais parfois..., ça me rend triste de ne pas en avoir, surtout à mon âge. J'ai trente ans déjà, j'aurais aimé connaître cette expérience.

– Peut-être qu'un jour, tu auras la chance de devenir mère, si c'est ce que tu désires vraiment. Il y a beaucoup de célibataire ici, tu sais !

– Je ne suis pas à la recherche d'une relation en ce moment.

– Vraiment ? Mais tu es si belle et charmante, je suis sûre qu'il y a des hommes qui seraient ravis de t'avoir à leurs côtés.

– Merci pour ton compliment, Jane. Mais pour l'instant, je suis bien dans ma solitude...

La petite qui s'était momentanément échappée, revient en sautillant. Lana admire sa beauté et son innocence, et une vague de tristesse l'envahit. Elle aurait tellement aimé avoir une fille.

Ses pensées s'égarent vers un passé lointain, où elle s'imaginait avoir une famille, des enfants qui rempliraient sa vie de joie. Mais la vie en a décidé autrement, elle se retrouve seule, sans enfant à chérir. Elle repense aux moments qu'elle aurait pu partager avec une fille, les promenades main dans la main, les soirées à se raconter des histoires, les moments de complicité et de tendresse. Cette image idéalisée d'une relation mère-fille lui fait réaliser le vide qui existe dans sa vie.

– Nana, regarde !

Amusée par son erreur, elle éclate de rire puis l'attrape dans ses bras pour la chatouiller.

– Sophie..., je m'appelle Lana, pas Nana !

La petite Miller fait la moue, se tourne, les bras croisés, semblant bouder.

– Eh bien, si tu préfères m'appeler Nana, je suppose que je peux faire une exception pour toi. Mais attention, seulement toi !

La petite fille se déride immédiatement et rit, ravie d'avoir gagné cette petite bataille, puis disparaît brièvement à l'intérieur de la maison et revient à toute vitesse. Elle tend les bras, tenant une magnifique couronne de fleurs fraîchement cueillies. Lana ouvre grand les yeux, surprise par ce geste si adorable.

– C'est pour toi, Nana ! rien que pour toi !

La brune prend délicatement la couronne, émerveillée par sa beauté et touchée par ce geste attentionné.

– Oh, Sophie, c'est tellement joli !
– Et moi, pourquoi je n'ai pas eu droit à une couronne ?

La petite enlace Lana et hausse simplement les épaules, montrant son désintérêt. Elle a déjà choisi son camp. Nana est celle qui compte le plus à ses yeux.

Jane continue à se plaindre, répétant que c'est injuste de ne pas recevoir une couronne de fleurs. Cette provocation constante irrite Sophie, qui finit par exploser de colère.

– Je ne veux pas de toi ! Laisse-nous tranquilles !

Alice, alertée par les cris soudains de sa fille, se précipite vers elle avec inquiétude. Elle place rapidement sa main sur la bouche de la petite, espérant que personne n'ait entendu.

Mais..., elle peut nous entendre ? Pourtant Sophie avait dit que non. Pourquoi cette réaction ?

Elle observe la mère prendre sa fille dans ses bras, puis se dépêche de l'emmener à l'intérieur de la maison, laissant ses deux invitées dehors, perplexes. Jane, qui continue à manger, ne prête pas attention à la situation.

– Qu'est-ce qui vient de se passer à l'instant ?
– Aucune idée, mais, ce soir, nous avons un dîner de prévu. C'est une tradition ici, nous nous réunissons tous sur la grande place du village pour partager un repas ensemble.

– Je suppose que je devrais apporter quelque chose à partager ?

Elle hoche la tête avec satisfaction, se lève et part en chantonnant. Lana reste perplexe face à son comportement étrange. Peut-être qu'elle devrait être plus sélective dans ses interactions avec les habitants du village, pense-t-elle très fort.

Elle s'apprête à se lever, tourne la tête, intriguée par le bruit d'un corbeau qui s'est posé sur le toit de sa propre maison. Bien qu'elle les déteste et que celui-ci semble la narguer, une pensée lui traverse l'esprit : et s'il était là pour la prévenir ?

Son regard est attiré par la présence d'une caméra fixée sur un lampadaire à proximité de sa maison. Son regard se fige, surprise par cette découverte. L'appareil pivote sur elle-même, scrutant les environs.

Ce n'est que lorsque celle-ci tourne dans sa direction qu'elle se rend compte qu'elle est bel et bien surveillée.

TOUS POUR UN Where stories live. Discover now