Vestiges [Roman Dark Fantasy]

Chapitre 1.1 : Défi (réécrit)

   Sverjar cligna des yeux, revenant au moment présent.

Des ombres tordues et spectrales évoluaient entre les arbres, émettant des gémissements lugubres qui glaçaient l'âme. Leurs silhouettes flottaient dans l'obscurité, leurs traits autrefois humains déformés par la haine et la souffrance. Fouettant l'air, les esprits convergèrent vers le jeune homme, leurs griffes fantomatiques cherchant à le lacérer.

— Des Draugars, marmonna-t-il, des foutus Draugars ! Il ne manquait plus que ça.

Un frisson glacé parcourut l'échine de Sverjar alors qu'il réalisait la gravité de la situation. Son cœur battait la chamade et son esprit tourbillonnait de panique face à cette menace soudaine.

Ces êtres maléfiques hantaient le bois la nuit, une menace dont les chasseurs discutaient entre eux en chuchotant lors des veillées. Par chance, ce n'étaient pas les créatures que l'on croisait le plus souvent. Sverjar n'en avait encore jamais vu mais il se serait bien passé de cette rencontre.

Alors que l'obscurité étreignait la forêt, le jeune guerrier se trouva submergé par la peur, se questionnant sur la signification de leur apparition. Était-ce là une sanction de la Mère des Vestiges, un avertissement pour sa témérité ?

Sverjar recula instinctivement, ses mains serrant fermement ses dagues alors que les formes spectrales se rapprochaient, leurs yeux brillant d'une lueur maléfique. Dans un déluge de hurlements perçants, les Draugars se jetèrent sur lui. Il porta un coup avec sa lame en direction d'un des fantômes, mais son arme traversa la brume glacée sans la moindre résistance. Il contourna les griffes spectrales qui tentaient de le saisir et enchaîna une série d'attaques précises. Encore une fois, les coups traversèrent les esprits sans les troubler. Au contraire, leur rage semblait s'intensifier, accompagnée d'un grondement sinistre qui résonnait dans l'obscurité de la forêt. La sueur perlait sur le front du jeune homme alors qu'il continuait d'esquiver les assauts, se roulant au sol pour les éviter de justesse.

— Arrière, démons, s'écria-t-il à pleins poumons, espérant sans vraiment y croire que cela suffirait à les faire renoncer.

Il cracha une série de jurons tandis que les esprits le cernaient de leurs visages grimaçants. Avec seulement ses deux poignards à disposition, il ne pourrait pas les contrer. Ces saloperies n'étaient sensibles qu'à la magie et il en était dénué. Sentant que ses forces et ses options se réduisaient rapidement, il se releva et chercha autour de lui une opportunité de fuir. Comme si ses ennemis avaient lu dans ses pensées, ils resserrèrent leur cercle.

Les Draugars, avec leurs formes spectrales et leurs mouvements saccadés, semblaient danser autour de Sverjar, leurs lamentations glaçantes résonnant dans l'air nocturne. Le jeune guerrier faisait face à une marée de ténèbres mouvantes, chaque pas des Draugars suscitant une peur plus profonde en lui. Les secondes s'égrenaient impitoyablement... Était-il déjà trop tard ? Une angoisse glaciale s'empara de lui alors qu'il voyait la lueur maléfique dans les yeux des esprits malfaisants.

Mobilisant ses dernières réserves d'énergie, il fit tournoyer sa dague dans une danse agile, espérant les repousser suffisamment loin de lui pour s'échapper. Cependant, les Draugars coordonnèrent leurs mouvements au même moment et le frappèrent de plein fouet. Sverjar fut traversé d'une douleur suraiguë qui le fit hurler. Là où il avait été touché, il remarqua que sa peau avait brûlé sous un feu de glace. Des balafres rougies et à vif marquaient son corps.

À bout de force, il laissa échapper un cri de rage mêlé de désespoir. Il maudit son orgueil qui l'avait poussé à cette situation. Et à la fois, il savait au fond de lui que si c'était à refaire il aurait agi de la même façon. Le jeune guerrier n'avait jamais été du genre à baisser les bras face à l'adversité. À genoux dans la neige, il rassembla son courage pour affronter le prochain assaut et se releva, un feu nouveau brûlant dans ses yeux.

Alors qu'il faisait face aux spectres, il ressentit une énergie sombre et puissante se réveiller au plus profond de lui. Une force qui semblait le consumer de l'intérieur, cherchant à s'échapper. Cédant à la douleur, il cessa de lutter. Sverjar sentit la force le posséder, se débattre pour prendre le contrôle. Dans un état second, le jeune homme ressentit une brûlure intense et vit que chaque pore de sa peau exsudait du sang, le tapissant bientôt d'une enveloppe liquide et écarlate.

Ses yeux, habituellement d'un vert intense, embrassèrent une teinte blanche semblable à celle des os, recouvrant l'iris.

Là où la matière liquide et écarlate se solidifiait, une armure sombre se forma, semblable à du goudron noir, mais plus dure que l'acier. Des motifs mystérieux et ciselés se dessinèrent sur cette cuirasse, semblant pulser avec une vie propre. Le jeune guerrier tenta d'arracher la substance de son bras, mais la matière se reforma aussitôt, comme une seconde peau.

Une confiance nouvelle, teintée de férocité, s'empara de lui, remplaçant peu à peu la peur et le doute. Il se sentait connecté à une puissance ancienne et terrifiante.

Mu par cette force mystérieuse qui l'habitait, le jeune homme, comme spectateur de son propre corps, se vit se jeter avec l'énergie du désespoir sur les revenants. D'un geste vif, sa dague heurta l'une des entités, qui poussa un rugissement impossible avant de se dissoudre en une pluie de cendres.

Une âme le frappa en plein torse et, au contact de l'armure, s'embrasa comme une torche. Sverjar se mit à trancher l'air à l'aveugle, tandis que les spectres explosaient un par un dans un déluge de flammes et de cendre, chaque coup décimant un esprit errant.

Alors qu'il pensait reprendre l'avantage, il laissa échapper un blasphème fleuri en découvrant de nouvelles ombres émergeant de la forêt. Sverjar serra les dents. Il avait imaginé être prêt, songeant être à la hauteur, mais il était désormais évident que cela n'était pas le cas. Les Vestiges ne pardonneraient pas son affront. Il s'en voulut d'avoir nourri l'espoir de croire qu'ils l'accepteraient.

Ses pensées se brouillèrent. Il sentit que son corps le lâchait soudainement, comme si ce pouvoir avait consumé toute son énergie physique. Sa vue se troubla, il se sentit chuter au sol. Alors qu'il heurtait la neige dure, les spectres fondirent sur lui, le transperçant de toute part. L'armure de goudron qui le protégeait vola en éclats sous la violence de l'assaut. Sverjar, couvert de sang, le regard hagard souffrait le martyre. Il tenta de se relever, mais ses membres refusaient de lui obéir. Il avait mal partout et il n'arrivait plus à penser distinctement.

L'espace d'un instant, le jeune guerrier réussi se demanda quelle était cette force qui l'avait envahi, mais ses pensées se brouillèrent aussitôt.

Alors que ses paupières devenaient lourdes, un rugissement sauvage éclata derrière lui.