Chapitre 5 : Pouvoir

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   À mesure que la lumière du jour déclinait, le ciel se parait de délicates teintes rosées et bleutées. Alors qu'ils progressaient lentement à travers la neige, ils repérèrent au loin des cheminées crachant leur fumée dans l'air froid, annonçant la proximité d'habitats.

Tandis que Sverjar se rapprochait davantage, accompagné du chasseur, il observait avec intérêt le village qui se dévoilait peu à peu devant eux. Il était camouflé derrière d'imposantes murailles de pierre disposées en un cercle protecteur et ponctuées à intervalles réguliers de guérites en bois dressées le long des remparts. Des feux flambaient et le jeune homme remarqua des silhouettes armées d'arcs effectuant des rondes en hauteur. Au pied de la paroi, et sur tout le long, des congères profondes, recouvertes de neige, laissaient apercevoir des pieux dissimulés. Un sifflement admiratif échappa à Sverjar, masquant son anxiété grandissante alors qu'il s'approchait. La ville semble prête à repousser toute attaque, se dit-il.

Habitué à vagabonder librement à travers les forêts et les villages sans barricades, une angoisse diffuse s'empara de lui à l'idée d'être confiné dans ce village fortifié.

Ils tracèrent leur chemin jusqu'à un sentier étroit dessiné dans la neige, débouchant sur une herse imposante, barrière titanesque renforcée de bois et de métal qui projetait son ombre menaçante sur eux. À leur approche, ils furent accueillis par une phalange de soldats lourdement armés, alignés de part et d'autre de l'entrée.

Contrairement au Peuple du Sang, les guerriers Forsth affichaient tous une tignasse blonde, de la couleur des blés. Leurs longs cheveux étaient soigneusement tressés en nattes serrées, tandis que les côtés de leurs crânes étaient rasés de près. Revêtus de cuirasses de cuir blanchi, ils étaient drapés dans d'épais manteaux de fourrure beige et brandissaient avec fierté des épées et des boucliers ornés de leur emblème distinctif : une tête de cerf sur deux rapières croisées. Sverjar avala difficilement sa salive, songeant un instant à faire demi-tour. Il ne se sentait pas à son aise face à cette démonstration de puissance.

Le chef de la garde, un colosse tant par sa taille que par sa stature, les observa s'approcher d'un air scrutateur, le visage fermé. Ses bras, aussi épais que des troncs d'arbre, étaient croisés sur sa poitrine massive. Lorsqu'ils atteignirent sa hauteur, il détendit ses membres, ses yeux parcourant avec minutie les nouveaux arrivants, s'attardant sur les taches de sang maculant leurs habits ainsi que sur la sacoche de toile que gardait Tyrulf.

— Arrêtez-vous, ordonna-t-il d'une voix ferme, la mâchoire contractée.

Ils se plièrent tous deux à l'injonction sans un mot de protestation.

— Dévoilez-moi le contenu de cette besace. Et n'envisagez même pas de vous y opposer, à moins que vous ne teniez à ce que je vous fasse abattre immédiatement, leur intima-t-il d'un ton menaçant.

Tyrulf opta pour la coopération et, avec prudence, écarta les pans du sac pour révéler sa sinistre teneur : des peaux et des ossements.

— Nous ne cherchons qu'un havre pour la nuitée, » assura le Chasseur d'une voix apaisante. « Je fais souvent escale ici pour écouler le fruit de mes chasses. »

— D'où vient ce sang ? Il semble frais, » remarqua le garde.

— Il provient d'un Vendikó dont nous avons croisé le chemin. Nous étions en route vers le sud quand la tombée de la nuit nous a surpris, » expliqua-t-il.

Sverjar observait la méfiance qui persistait dans leurs regards. Des échanges furtifs et silencieux s'opéraient entre eux. Leur officier, l'air sombre, finit par déclarer d'une voix grave : « Vous êtes venus à bout de cette saloperie ? Impressionnant. Bon, vous pouvez rester, mais tout acte suspect sera puni de mort. Ne pensez pas pouvoir tromper la vigilance des Forsth. »

Vestiges [Roman Dark Fantasy]Where stories live. Discover now