Chapitre 10 : Séquestrée

11 5 8
                                    

!!! Attention ! Ce chapitre contient de la violence physique. Il peut être difficile à lire !!!


Emma

Hm... C'est quoi cette douleur dans mon crâne ? La vache... Que ça fait mal !

J'essaie d'ouvrir les yeux, mes paupières refusent de coopérer. Je me sens faible. Sans énergie. Je suis à l'ouest. J'ai de la difficulté à réunir mes pensées. Je prends rarement de cuites. La dernière remonte à il y a quatre ans. Mais j'ai l'impression que cette fois, je n'ai pas été raisonnable. Mes symptômes y ressemblent fortement. Petit à petit, avec patience, sans forcer les choses, j'y vois plus clair. La brume qui envahit mon esprit se dissipe. Et lorsque les souvenirs me reviennent, je regrette d'avoir voulu me rappeler. Pendant que mon subconscient était éteint, ça m'évitait de réaliser l'ampleur de ce qu'il vient de m'arriver et des répercussions que cela va avoir sur ma vie.

Alors que j'étais au téléphone avec Salomée, un homme m'a empoignée par-derrière et a plaqué un chiffon sur ma bouche. J'ai juste eu le temps de voir un autre individu ouvrir la porte latérale d'une camionnette noire pour permettre à mon agresseur de me jeter dedans. Le tissu devait être imbibé de chloroforme, car j'ai très vite perdu conscience. Quand je me suis réveillée, j'étais toujours à l'arrière du véhicule, encadrée par mes deux assaillants. Comprenant la gravité de ma situation et imaginant les pires scénarios, bien que nous roulions, j'ai agi comme une vraie tigresse. Je me suis jetée sur celui qui était en face de moi, les ongles en avant. Grâce à l'énergie du désespoir, je suis parvenue à le blesser au visage. Je crois qu'il conservera une jolie cicatrice. Malheureusement, malgré ma volonté de m'en sortir, ça n'a pas suffi. Le second type a réagi rapidement et m'a mis un violent coup de poing sur la joue. La douleur a été inimaginable. Je pense que j'ai eu de la chance de garder toutes mes dents. Sous le choc de l'impact, ma tête est allée cogner contre la paroi en tôle et je me suis effondrée au sol. Faisant ainsi subir un nouveau traumatisme à ma boîte crânienne. Préférant mourir que de vivre les images qui défilaient dans mon esprit, j'ai essayé de me relever. Piteuse tentative qui n'a servi à rien. J'ai perdu tout espoir de me sortir de ce mauvais pas lorsque j'ai senti l'aiguille s'enfoncer dans mon bras. J'ai deviné tout de suite de quoi il s'agissait. Le produit que l'on m'a injecté a très vite fait effet et a empêché toute rébellion de ma part. Avant de sombrer dans le noir, j'ai prié pour que mes yeux se ferment et qu'ils ne se rouvrent pas. Heureusement, quelque part, au plus profond de mon être, une petite voix m'a soufflé que Salomée ne tarderait pas à me secourir. Que la femme que j'aime le plus au monde trouvera forcément une solution pour me venir en aide. Je devais seulement tenir encore quelques heures. Avec un espoir timide, mais renaissant, je me suis laissée aller dans les ténèbres. Douce torpeur qui m'a préservée de toutes les horreurs qui se passaient autour de moi.

Mon corps est en train de se réveiller. Je retrouve toute ma lucidité. En essayant de rassembler les bribes d'informations que je possède, les souvenirs refont surface. Mes kidnappeurs m'ont maintenue endormie. Dans un semi-coma artificiel. Toutefois, ma conscience luttait pour ne pas s'éteindre et j'ai réussi à analyser la situation avant de retourner dans un brouillard chimique. Profitant d'un moment d'inattention, je me suis légèrement redressée pour observer ce qui m'entourait. J'ai remarqué avec horreur que je n'étais pas seule. Des dizaines d'autres femmes étaient là, avec moi. Mes yeux ont fini par s'habituer à la pénombre et je suis parvenue à distinguer une paroi. En allongeant le bras, mes mains ont touché une matière froide et ondulée. Du métal. Pas de doute, je me trouvais dans un container. À ce moment, mon cœur s'est accéléré et la panique m'a envahie. Pas besoin d'avoir fait bac plus dix pour comprendre que j'étais victime d'un trafic d'êtres humains. Je croyais que les présences autour de moi étaient exclusivement féminines, mais en essayant de me déplacer, j'ai buté sur un corps qui s'est mis à gémir. Le son grave qui est sorti de cette gorge m'a appris que de jeunes garçons se trouvaient avec nous. Putain que c'est tordu ! Naïvement, je pensais qu'à notre époque ce genre de choses ne se produisaient plus. Dur retour à la réalité. Le monde compte encore, sur sa surface, des gens qui vendent des êtres humains comme une vulgaire marchandise.

Très vite, mon cerveau s'est activé. J'ai commencé à chercher des solutions. J'ai essayé de me rappeler tout ce que m'a enseigné Salomée. Peut-être qu'une de ses incantations pourrait me sortir de là. Je n'ai pas eu assez de temps pour rassembler mes idées. Les portes de ma prison de fer se sont ouvertes avant que je ne puisse réfléchir à une option. Très réactive, je me suis aussitôt rallongée sur l'espèce de matelas crasseux qui me servais de couchette. J'ai dû réprimer mon élan de dégoût, coller ma joue sur le tissu d'une couleur inqualifiable et faire mine d'être toujours dans les vapes.

Je dois être une très bonne actrice, car mon petit manège n'a pas été découvert. Mes deux kidnappeurs ne se sont pas méfiés et ont parlé librement. À moins que contrairement à ce que je pensais, ils n'en avaient rien à carrer que j'ai accès à certaines informations. Quoi qu'il en soit, en tendant un peu l'oreille, je les ai entendus.

- T'es dans la merde ! Tu lui as laissé un hématome. On a pour ordre de pas la toucher. Tu aurais dû faire ça plus discrètement...

- Elle commençait à me casser les couilles. Je l'ai fait taire. Tu devrais plutôt me remercier ! Elle t'a arraché la tronche cette connasse !

- Le patron ne va pas être content... Il exige qu'elle soit nickel. Celui pour qui nous l'avons enlevée est réputé pour être un fou furieux. Il réclame des femmes parfaites, sans aucune trace de coups. C'est un malade. Il aime faire mal. Mais ce qu'il veut plus que tout, c'est être le premier à infliger la douleur.

- Je croyais que celle-ci allait nous servir pour faire souffrir l'autre ?

- C'est le plan. Vendre la blonde à un monstre pour qu'il la démonte. La brune ne s'en remettra jamais.

- Putain ! Je me les taperai bien toutes les deux !

Le gros dégueulasse s'est agenouillé et a posé sa main sur ma cuisse. Ce contact m'a répugné. Mon corps s'est immédiatement raidi. J'ai serré les dents et fermé les yeux plus fort. La tension qui s'est installée dans mon cou m'a fait souffrir. J'ai mobilisé toute mon attention à essayer de rester calme et immobile. Mon estomac commençait à montrer des signes de révulsion. Heureusement pour moi, le deuxième gros dégueulasse l'a empêché de continuer.

- Si tu tiens à ta vie, arrête. Tu vas devoir justifier le bleu qu'elle a sur la joue. Le patron n'est pas réputé pour faire dans la dentelle. Certains sont morts pour moins que ça.

Les mots de son collègue ont freiné ses ardeurs. Ses sales doigts ont quitté ma peau. Cependant, quelques secondes plus tard, j'ai reconnu une sensation qui m'est à présent familière : la piqure d'une aiguille qui s'enfonce dans ma chair.

Avant de fermer les yeux, j'ai compris que l'origine de mon triste sort n'est rien d'autre qu'une vengeance dirigée contre Salomée. Ma conscience s'est envolée et je n'ai pas eu le temps de découvrir qui est à l'origine de ce cauchemar.


Lumière et ténèbres - tome 2 - Emma (premier jet)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant