Chapitre 8.2 : Cendres

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   Le groupe approuva la proposition. Ils reprirent leur marche, laissant les restes calcinés d'Yggdrasil derrière eux. Le soleil déclinait, embrasant le ciel de teintes chaleureuses, caressant les falaises d'une lueur dorée. Une brise légère véhiculait l'odeur saline de l'océan proche, mêlée à la cendre résiduelle.

Une étrange excitation parcourut Sverjar à l'idée de découvrir enfin l'Océan. Malgré les histoires entendues par son peuple, aucun n'avait eu le privilège de contempler les mers de ses propres yeux. Les récits le décrivaient comme un ciel posé sur la terre, liquide et sombre, engloutissant tout sur son passage. L'idée de s'aventurer vers cet horizon inconnu éveillait en lui une curiosité et appréhension.

Ils atteignirent l'escarpement avec la nuit qui tombait, le vent prenant de l'ampleur. Tyrulf prépara un feu dans un abri rocheux pour protéger le groupe des intempéries, tandis que Vindottir déployait son pouvoir pour les isoler davantage.

Sverjar se dirigea seul vers le sommet de la falaise. Poussé par les bourrasques, il distingua dans l'obscurité une masse sombre et mouvante, étincelant sous la clarté de la lune, accompagnée d'un bruit étrange de clapotis. L'océan s'étendait à perte de vue devant ses yeux ébahis, s'unissant avec le ciel nocturne. Au milieu des éléments déchaînés, il éprouva un sentiment écrasant face à cette immensité majestueuse, envahi par une émotion indicible. Il réalisa qu'il pleurait, sans ressentir de tristesse apparente.

Après avoir savouré ce moment de solitude bienvenue, Sverjar retourna au campement, animé d'une détermination renouvelée. Les flammes crépitaient, projetant des ombres dansantes sur les rochers. Près du feu, Tyrulf fixait le brasier, le visage résolu. Perdu dans ses pensées, son regard se tournait souvent vers l'obscurité de l'océan.

Vindottir, quant à elle, se tenait plus loin en retrait, observant l'horizon comme si elle cherchait des réponses dans l'immensité de la mer. Sverjar s'assit aux côtés du Chasseur.

— Tyrulf, dit-il d'une voix plus douce qu'à l'accoutumée, pourquoi t'es-tu joint à moi ? Parle franchement.

Le chasseur soupira, un poids écrasant sur ses épaules, lui conférant l'air plus vieux.

— En réalité, je ne le sais pas totalement moi-même. Je crois au destin, aux signes qui se montrent à moi. J'ai croisé ton chemin, et il m'a semblé un signal à suivre. Ton don du sang est manifestement unique, et cette série d'événements à l'air de présager quelque chose de plus grand, une énigme que je ne saurais déchiffrer.

Sverjar acquiesça.

— Que voulait dire Vindottir quand elle a dit que tu n'étais pas ce que tu paraissais être ? Ta maîtrise des Ulfgard montre que tu contrôles aussi une magie, proche de celle du Peuple du Sang, pourtant tu m'as annoncé être étranger à leur vie.

Tyrulf leva les yeux vers les étoiles, comme s'il quêtait une réponse dans la voûte céleste.

— Vindottir voit bien au-delà des simples apparences.

Sverjar fronça les sourcils, cherchant à comprendre. « Pourquoi tant de mystères, Tyrulf ? Pourquoi ne pas tout me dire ? »

Tyrulf esquissa un sourire empreint de tristesse.

— Certains secrets sont comme des lames à double tranchant, Sverjar. Ils peuvent protéger autant qu'ils peuvent causer des ravages. Porter en moi une responsabilité, une charge héritée, me contraint à décider du moment et de la manière de la partager. La vérité n'est pas toujours facile à dévoiler. »

Le Banni médita sur la rare révélation de Tyrulf. Il sentit que, malgré la nature farouche et solitaire du Chasseur, une brèche s'était fugitivement ouverte en lui. Sverjar avait besoin d'un allié, d'une connexion humaine dans ce périple. Il réalisa que la confiance, même partielle, était une monnaie précieuse à utiliser judicieusement pour faire prospérer cette alliance improbable.

— J'honorerai tes secrets, Chasseur, si tu respectes également les miens. Sache seulement que je n'ai qu'une parole, trompe-moi et je te tuerai de mes mains, déclara Sverjar avec une fermeté résolue.

Tyrulf inclina mollement la tête en signe d'acceptation silencieuse, et l'atmosphère entre eux sembla s'adoucir.

Alors que Sverjar scrutait les environs dans l'obscurité, une expression d'inquiétude traversa son visage. « Par les Vestiges, où est passée Vindottir ? » L'endroit où elle se tenait était désormais vide.

Elle avait disparu.

Vestiges [Roman Dark Fantasy]Where stories live. Discover now