Chapitre 1

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"La première fois que je l'ai vu ? Oh, c'était il y un petit moment déjà. Au moment où il a passé la porte j'étais en train de faire les poussières dans l'entrée. Je me souviendrai toujours de son regard. Il avait ce regard hautain, le regard d'un homme qui vous piétinerait si vous lui barriez le passage un peu trop longtemps. Je n'ai d'ailleurs jamais compris pourquoi ils étaient amis ces deux là. Tout le monde me disait que non, mais je les voyais bien moi, leurs regards. Ils avaient dans le regard une attirance mutuelle et je n'ai jamais cherché à savoir quel genre d'affection ils se portaient malgré mon inquiétude envers mon petit protégé. Parce que oui, il était mon protégé. Je sais qu'il est froid, qu'il ne se laisse pas facilement aller aux gestes amicaux, mais vous savez il est comme ça mon Thomas. Et dans un sens, Damien lui ressemble un peu. Mais je sais que Thomas n'est pas aussi glacial que beaucoup le prétendent. Quand on apprend à le connaître, il est doux ce garçon. Je m'amusais d'ailleurs à le taquiner à ce sujet. Combien de fois l'ai-je appelé "Monsieur Darcy", en référence à ce fameux feuilleton où ce même personnage est d'un naturel peu amical...Vous voyez ? Je pense qu'il aimait secrètement cette comparaison... Enfin, reprenons... Quand je l'ai vu pour la première fois, Damien s'est présenté à moi dans une indifférence des plus totales et m'a demandé si Thomas était disponible. Et je me souviens que Thomas m'avait ordonné de ne pas lui permettre de monter dans sa chambre. J'ai alors prétexté que Thomas n'était pas là et ne pas savoir quand il rentrerait. Damien a alors soupiré et à tourné les talons sans même me dire au revoir."

C'était un gala comme il y en avait des centaines. Un gala où tout le gratin de la bourgeoisie se rendait pour se faire bien voir, comme à chaque fois. Il n'était en rien différent des autres, et c'est ce que pensaient ces deux garçons qui venaient d'arriver bien au chaud dans leur limousine. L'un arrivant accompagné de ses parents, l'autres ayant une fille à chaque bras. 

"Thomas, sois aimable comme à ton habitude et prends bien le temps de saluer tout le monde."

Le bouclé hocha la tête. Il n'avait pas le choix, il devait se plier aux désirs de son paternel. Ils étaient ce que beaucoup appelaient des "nouveaux riches". La fortune familiale ne s'était pas passée de génération en génération, Thomas n'en représentait que la troisième. Ses grands-parents avaient fait fortune dans l'immobilier, permettant ainsi à leur enfant de ne plus jamais manquer de rien. Malgré leur fortune évidente, leurs costumes sur-mesure et tout ce qui les accompagnait, Thomas n'avait jamais été un enfant pourri gâté. Bien l'inverse du garçon auquel il faisait désormais face. 

Damien se tenait devant lui, le fixant, un sourire narquois au coin des lèvres.

"Tu gênes."

Sans un mot ni un soupir, Thomas s'écarta rapidement du chemin. Il connaissait ce garçon de vue mais surtout de réputation. Damien était un "sale gosse de riche" comme son père aimait le répéter. Un garçon mal élevé aux mœurs douteux dont la haine des personnes d'une catégorie sociale inférieure en énervait plus d'un. Et il n'était pas le seul à penser ainsi. Ses parents et tous leurs contacts éprouvaient cette même gêne à se mêler à d'autres familles n'étant pas assez prestigieuses à leur goût. De ce fait, leurs parents ne s'étaient jamais adressé la parole. 
Damien était déjà loin maintenant, le patriarche Itturalde pouvait donc se permettre de critiquer son comportement sans être entendu. 

"Décidément, il est toujours aussi aimable. C'est bien Thomas, ne cède pas à ses provocations. 

Thomas s'empêcha de hausser les épaules. Il n'en avait que faire des remarques de Damien. Et puis, il n'avait pas le choix. Peu importe la situation, il se devait d'être irréprochable. 
Sans un mot de plus, les Itturalde entrèrent dans la grande demeure. Il y avait du monde et dans cette ambiance mondaine, Damien faisait tâche. Il se pavanait, les filles lui tenant le bras, gloussant comme des imbéciles sous le regard des invités, choqués de cette scène ridicule. 
La soirée allait être longue, très longue. Thomas commençait à s'ennuyer. Il n'était que l'ombre de lui même au milieu de toutes ces silhouettes grouillant à ses côtés. Il les reconnaissait d'un œil distrait, ne s'attardant sur aucun détails, cherchant simplement à faire bonne figure. Une phrase le sortie de ses pensées, une phrase qu'il avait trop entendu et qui lui laissait toujours un goût amer dans la bouche et le cœur serré. 

Rano Pano [Terraink]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant