Vestiges [Roman Dark Fantasy]

Chapitre 17.1 : Sommets

 Le groupe se sépara, chacun allant à son poste. Vindottir, inflexible dans sa détermination, escalada avec agilité les mâts, déployant les voiles selon les ordres stridents de Thora. Sverjar et Tyrulf rejoignirent les rameurs aux avirons.

La journée se déroula, le Griffon des Cimes traçant un chemin vers l'horizon montagneux.

Les flots se parèrent de lumières dorées tandis que l'éclat du soleil déclinait, annonçant le crépuscule.

Les trois compagnons, accompagnés des jumeaux, partagèrent un repas sur le pont du drakkar. Thora, toujours méfiante, scruta ses invités sans un mot. Eldric, plus ouvert, échangea sur leur avancée vers la destination convoitée.

Contemplatifs, ils se tournèrent vers l'horizon, s'émerveillant devant la beauté de l'astre de feu décroissant qui teintait le ciel et l'océan d'or liquide.

« Je ne me lasserai jamais de ce spectacle, » murmura Thora, son regard s'apaisant subitement. Sverjar approuva sobrement, « C'est magnifique. »

Les montagnes lointaines se dessinèrent en silhouettes majestueuses tandis que des lanternes se balançaient doucement aux mâts, éclairant les visages. Entre deux bouchées, Vindottir entama une conversation avec Thora.

— Comment êtes-vous devenus capitaines de ce drakkar ? Vous semblez jeunes pour une telle responsabilité, » interrogea Vindottir.

Thora, le regard plongé dans le passé, expliquant :

— Nous sommes immergés dans les bateaux et la pêche depuis notre naissance. Notre enfance fut dédiée à accompagner notre père en mer, à apprendre les nœuds marins et à comprendre les caprices du vent. »

Eldric ajouta,

— Tout n'était pas si rose. Notre père avait l'habitude de boire et de nous battre lorsqu'il en avait l'envie. »

Thora acquiesça, « C'est vrai, mon frère, mais malgré tout, j'aurais tout donné pour que nos parents soient toujours parmi nous. » Elle se tut, les yeux brillants.

— Et que leur est-il arrivé ? demanda Sverjar en se raclant la gorge.

— L'océan nous nourrit, mais il prend aussi des vies, dit Eldric. Nos parents ont été emportés par des créatures marines. Les eaux sont infestées de monstres contre lesquels les hommes ne font pas le poids, malgré la protection d'Huldra, bénie soit-elle. »

La mention d'Huldra fit frémir Vindottir, mais elle retint tout commentaire. L'ombre d'une rancœur persistait entre les deux sœurs.

Eldric, les coudes sur ses genoux, demanda à voix basse, sur un ton confidentiel.

— Et vous trois, qu'est-ce qui vous amène dans ce voyage ? Vous détonnez par rapport aux voyageurs habituels. » Thora, retrouvant son ton taquin, railla, « Il n'est pas commun de croiser une fille aux cheveux gris qui ressemble à une sorcière et deux guerriers qui ne sont visiblement pas du coin. »

Un regard noir fusilla Thora.

— Arrête tes provocations, j'ai mes limites, grogna Vindottir.

Les deux femmes se jaugèrent de l'œil. Tyrulf, un sourire narquois aux lèvres, prit une gorgée de bière tout en donnant un coup de coude complice à Sverjar.

— Ces deux-là sont aussi compatibles que le feu et la glace, lui glissa-t-il à l'oreille. Le jeune homme réprima un ricanement, plongeant son regard au fond de sa chope.

— Vous avez éludé la question, » observa Eldric, son intérêt évident.

— Nous ne sommes pas disposés à fournir une réponse, » riposta Vindottir. « Vous avez établi la règle de ne pas sonder les motivations des membres de l'équipage, respectons-la. »