Chapitre 12 - Damien

45 13 4
                                    

L'entraînement de ce soir était intensif. L'équipe des LearnT se prépare à leur premier match du weekend prochain. Plus qu'une semaine. Je prends mes marques parmi les joueurs et ce sentiment d'être intégré me donne du baume au cœur.

C'est soulagé de ce constat que j'insère la clé dans la serrure de mon appartement, après une marche sous la pluie. Quelle idée d'avoir pris un logement aussi loin ! Même si je n'ai pas eu vraiment le choix. Mes vêtements me collent à la peau et j'ai hâte de m'effondrer sur mon lit, me blottir dans mes draps après avoir quitté l'humidité de ma tenue. Pourtant, un mauvais pressentiment me saisit l'échine, comme un sixième sens.

J'ouvre le battant et pénètre dans mon studio. Je serre les poings sous l'horreur de la situation. Si tout à l'air en ordre en apparence, se joue sous mes yeux un véritable drame. Mes affaires sont à leur place, rangées, ordonnées, mais une marre d'eau tapisse la moitié de l'espace.

Fait chier, manquait plus que ça !

Pas d'eau chaude, pas de chauffage digne de ce nom alors que l'hiver approche. Et maintenant, une fuite qui va me prendre des plombes à nettoyer. Je sature. Ça ne peut plus durer.

J'avance les pieds dans l'eau jusqu'à la source de cette catastrophe. J'ouvre le meuble de l'évier mais ne remarque rien d'anormal à première vue. Je me penche encore, jusqu'à tremper mes genoux au sol pour trouver derrière un meuble bas, un tuyau qui a cédé.

Ça s'annonce plus compliqué que prévu. Après avoir coupé l'arrivée d'eau générale de l'appartement, j'empoigne mon smartphone. 20h14. Il n'est pas trop tard pour appeler mon propriétaire et lui faire part de l'incident. Commençant à le connaître, je parie qu'il ne me proposera pas de solution dans l'immédiat.

La sonnerie retentit et quand je crois que je vais tomber sur la messagerie, malgré mon numéro masqué, il décroche.

— Oui ?

— Bonjour, c'est Damien Lograin, votre locataire.

— Ah ! Que puis-je pour vous encore ? se braque-t-il.

Je le soupçonne fortement de filtrer mes appels depuis plusieurs jours, agacé que je lui parle de la chaudière, ou plutôt de l'absence de chaudière fonctionnelle.

— Il y a une fuite dans la cuisine. Un tuyau a rompu.

— Vous attirez les ennuis ! C'est pas possible !

— Excusez-moi, mais je n'y suis pour rien. Pouvez-vous faire venir quelqu'un rapidement ?

— Je verrais mais sachez que vous me faites vraiment chier.

— Pardon ?

Je reste ahuri. Je me fais insulter et pour toute excuse, il me raccroche au nez. Ma tension monte sous pression. J'y crois pas.

Dans un excès de rage, je rassemble mes affaires. J'attrape ma valise, fourre tout ce que je peux dedans, allant jusqu'à m'asseoir dessus pour la fermer tellement elle est pleine à craquer. Le reste finit dans des sacs de courses. Je vide la cuisine de ses denrées alimentaires en éclaboussant les meubles d'eau de mes pieds pressés. S'il pense que je vais nettoyer son bazar après son manque de respect, il se trompe. Toute considération s'est envolée. Je suis bien content d'avoir choisi un meublé.

Après une quarantaine de minutes à tout réunir, je claque la porte avec mes biens. Les bras surchargés et les chaussures glissantes, je manque de l'étaler dans l'escalier. La colère m'habite encore lorsque je déambule dans les rues. Les passants me dévisagent d'un air interrogateur mais je m'en contre fiche. Mes muscles déjà fatigués commencent à trembler sous l'effort. Néanmoins, je résiste. Je ne me laisserai pas abattre. Déterminé, mes pas me portent jusqu'à ma destination. Seul un coup de tête pouvait me faire prendre cette décision, alors avant de retrouver mes esprits, je sonne à la porte désormais devant moi.

— Ouais, c'est qui ? entends-je d'un son lointain.

— C'est Damien.

Un cliquetis retentit avant que Tomas ne se dessine sous mes yeux.

— Damien ? Mais... qu'est ce que tu fais là ? C'est quoi tout ça ?

Je me sens con. Je dépose tout mon bordel à mes pieds et me gratte l'arrière du crâne. Mon regard penaud traîne sur mes chaussures humides.

— Reste pas là, viens entre, me propose-t-il en se saisissant d'un de mes sacs.

— Merci.

Je m'avance dans l'entrée mais n'ose pas aller plus loin. Je délaisse ma tête pour masser ma nuque et me donner du courage.

— Tu emménages ici ? me demande John, en arrivant à notre hauteur. Je ne savais pas.

— En fait... Je me demandais si la chambre était encore disponible pour quelques jours. J'ai un souci avec mon studio et j'ai dû le quitter précipitamment.

Tomas lève la main entre nous et me coupe dans mon explication. Son regard annonce déjà la couleur.

— Ah non mec, désolé mais la chambre n'est pas dispo pour quelques jours.

— Oh, d'accord je vois, fais-je déçu. Ce n'est pas grave. Je peux juste squatter le canapé pour cette nuit ? tenté-je alors.

— Si tu t'installes dans la chambre, c'est définitivement. Enfin jusqu'à la fin des études. On n'aime pas changer de colocataire tous les quatres matins, se marre-t-il.

Le soulagement peint sur mon visage. Me ferais-je un jour à ses taquineries plutôt bien jouées ? Mes émotions sont passées par tous les étages aujourd'hui et j'aimerais enfin trouver le bon. Que tout cela s'arrête un instant, que je puisse seulement me reposer.

— Allez, viens ! Je te montre ta chambre.

Leçons de confiance (anciennement Learn to trust)Where stories live. Discover now