Chapitre 18.2 : Citadelle

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— Rencontrer un autre prêtre en route vers les cellules pourrait déclencher une alerte également, souligna Vindottir, se rangeant clairement du côté de Sverjar.

Tyrulf grogna.

— Il est légitime de se poser ces questions, sinon vous ne seriez plus des humains, mais des monstres. Cependant, derrière ces convictions, la réalité est simple : tuer ou être tué, affirma-t-il en haussant les épaules. Sur ce coup, je suis d'accord avec Eldric, il faut s'en débarrasser. Sans hésiter, il saisit la tête du prêtre tremblant entre ses mains massives et, d'un mouvement sec, brisa ses cervicales dans un bruit cassant. La tête retomba de manière obscène sur la dépouille sans vie.

La Fille des Vestiges garda le silence, les bras croisés. Sverjar, qui avait laissé échapper un petit cri de surprise, se reprit.

— Bon, la question ne se pose plus, je suppose. Il posa une main sur l'épaule d'Eldric. Allons récupérer ta sœur maintenant.

Ils quittèrent la bibliothèque, laissant le corps affalé sur le pupitre derrière eux. Leurs pas vibraient dans les couloirs obscurs de la forteresse tandis qu'ils gravissaient les étages supérieurs. Ils montèrent des marches humides et glissantes, sans rencontrer âme qui vive. L'ascension à travers les passages sinistres était rythmée par le seul écho de leurs pas, chaque marche résonnant comme une funeste mélodie. Les ombres virevoltaient sur les murs, éclairées par des torches vacillantes, créant une tension tangible parmi le groupe.

Arrivés au troisième niveau, ils forcèrent une porte massive qui grinça en s'ouvrant devant eux, dévoilant un dédale obscur de couloirs étroits. Leurs yeux s'adaptèrent à l'obscurité après quelques minutes, et ils s'enfoncèrent dans les corridors sombres. À mesure qu'ils avançaient, une oppression grandissante imprégnait l'atmosphère. Des gémissements lointains semblaient sourdre des murs de pierre, ou peut-être était-ce simplement leur esprit qui les trompait.

Ils parvinrent enfin au secteur des cellules, où une grille imposante s'élevait devant eux, ornée de pointes de fer et munie d'un cadenas scellé. À leur droite, un long couloir plongé dans une obscurité quasi totale s'étendait. Ils s'y engouffrèrent avec prudence. Eldric ouvrit délicatement la première porte qui se dressait sur leur chemin. En pénétrant dans la pièce, tous eurent un frisson d'horreur.

Il s'agissait d'une salle de torture, où un éventail d'armes aux formes et conceptions diverses étaient exposées, dédiées à faire souffrir, dans ses configurations de la plus sauvage à la plus complexe. Des traces de couleur rouille sur le sol ne laissaient aucun doute quant au nombre de personnes ayant enduré cet endroit lugubre. Sverjar eut un frisson et sortit de la pièce silencieusement, sans demander son reste. À ses côtés, Eldric était figé. Dans son esprit défilaient les images des sévices que sa sœur avait pu subir, son imagination devenant son pire cauchemar. Personne n'eut le cœur de le réconforter, car c'était inutile ; il ne pouvait être certain de rien. Ces Prêtres du Sang portaient bien leur nom.

Le groupe avança silencieusement dans le dédale sombre, encore sous le choc de la vision de la chambre de tourments. Des gémissements résonnaient dans l'air oppressant. Eldric se lança dans une course effrénée vers le son, son cœur battant dans sa poitrine. Des formes émaciées et pâles surgirent de l'obscurité derrière des barreaux, leurs yeux implorants fixés sur eux.

— Thora ! chuchota-t-il, sa voix brisée par l'émotion, scrutant les ombres. Thora, c'est Eldric. Où es-tu ? Nous sommes ici pour te délivrer.

Il y eut un mouvement et Thora émergea lentement des ténèbres, son visage portant les stigmates de la souffrance endurée. Un juron étouffé s'échappa des lèvres de Tyrulf en la découvrant. La tenue de la jeune femme était en lambeaux, maculée de sang. Son œil était fermé, la peau livide, et des marques sanglantes et des empreintes de fer zébraient ses bras. Malgré sa silhouette fragile tremblante, elle rejeta les compagnons de cellule agrippés à elle, mais ses yeux s'illuminèrent d'une lueur de soulagement en les apercevant.

— Eldric... vous êtes venus, parvint-elle à murmurer faiblement.

Eldric hocha la tête, les joues mouillées de larmes, la gorge nouée. Vindottir le repoussa délicatement en arrière, préparant un sortilège. Des éclats de glace tourbillonnèrent autour d'elle tandis qu'elle concentrait son pouvoir. D'un geste fluide, elle leva la main, et une énergie glaciale jaillit, percutant les barreaux de la prison. Un craquement résonna dans l'air, et ils se fissurèrent avant d'éclater en mille morceaux. Aussitôt, les prisonniers se ruèrent vers la sortie, se bousculant, se piétinant pour s'échapper au plus vite.

Sverjar parvint à saisir Thora, la tirant vers lui. Elle s'effondra dans les bras d'Eldric qui s'était jeté sur elle, des larmes de crasse sur son visage. Interrompant ces retrouvailles, Tyrulf lâcha un regard vers les prisonniers qui fuyaient dans le chaos.

— Ne restons pas ici. Ça ne va pas tarder à grouiller de prêtres et je ne suis pas certain qu'on fasse le poids.

Ils approuvèrent sans hésiter. Les clameurs de liberté retentissaient dans les couloirs de la forteresse alors que le groupe s'élançait à travers le dédale. Thora, encore chancelante, fut portée par Sverjar, guidée par Eldric, tandis que Tyrulf et Vindottir marchaient en arrière, vigilants, prêts à se battre pour retarder leurs poursuivants.

Gravissant en précipitation les escaliers en colimaçons, ils cherchaient refuge dans les hauteurs, échappant aux cris de fureur des prêtres qui résonnaient plus bas. Animés par l'urgence, ils se hâtaient, poussés par les chocs métalliques des armes martelant les prisonniers tonnants dans leur sillage, entremêlés aux cris de douleur.

Atteignant le sommet, ils forcèrent la porte et s'élancèrent sur le patio de la tour. Un vent glacial les accueillit de plein fouet, des tourbillons de neige dansant dans l'air tandis que le ciel se présentait comme une mer de plomb. Frissonnant, ils scrutèrent les environs du regard ; la terrasse s'étendait sous un manteau de neige, enserrée par les sombres montagnes. Sverjar, ses jambes en feu à la suite de cette ascension effrénée, haleta :

— Bordel de merde, on est bloqué.

Vindottir se pencha par-dessus les remparts, ses cheveux argentés s'agitant au vent.

— Impossible de descendre en rappel, il n'y a aucune prise, confirma-t-elle. Elle se retourna vers eux, l'air sinistre. On est fait comme des rats mes amis, j'en ai bien peur.

Comme pour appuyer ses propos, la porte au sommet s'ouvrit violemment.

VESTIGES Tome 1 : L'Eveil du Sang (Réécriture)Onde as histórias ganham vida. Descobre agora