Chapitre 14 - Damien

65 17 15
                                    

Alors que Victoria se tient à mes côtés, les mains apposées sur mon avant bras, sa joue flirte avec mon épaule. Le son des machines se distingue de plus en plus, signe évident que nous approchons du lieu de notre premier rendez-vous.

Je repense à la tête de Victoria quand elle m'a aperçu dans l'appartement de Tomas. Son expression plus qu'étonnée, comme si elle avait vu un fantôme, est gravée à jamais dans ma mémoire. Pourtant, cet air troublé s'est rapidement effacé, laissant place à son assurance habituelle, son embarras balayé d'un revers de main par un sourire ravageur. A-t-elle seulement réalisé que je l'ai d'abord entendue avant de la voir ? Que sa voix, reconnaissable entre mille, a percé les murs de ma chambre pour s'infiltrer jusqu'à mes oreilles ? Sait-elle que je l'ai observée parler de moi indirectement face à son meilleur ami ? Que j'ai vu son état de stress et d'euphorie ? Même si elle ne le sait pas, son attitude m'a donné du baume au cœur mais surtout, m'a mis en confiance pour aborder l'épreuve qui m'attend.

Nous passons les portes du parc qui accueille l'évènement. Une fête foraine. Des machines à sous, des stands de tir à la carabine, des manèges et tant d'autres, ornent l'espace. Espace qui je dois l'avouer semble restreint avec la masse de jeunes ou d'enfants accompagnés de leurs parents.

Je me crispe sous l'affluence. L'atmosphère m'oppresse. Je savais que ce serait difficile de me retrouver dans une foule ambulante. De voir des regards me survoler, des rires sur chaque visage, en me demandant si je n'en suis pas la source.

— Ca va aller, me rassure-t-elle en déposant un baiser sur ma joue.

Et j'ai l'impression d'être un gosse qui va chez le dentiste.

— Tu veux commencer par quoi ?

Je réfléchis un instant avant de repérer un coin un peu moins fréquenté.

— Il n'y a pas l'air d'avoir beaucoup de monde là-bas, lui dis-je en désignant un manège.

— Ah oui, tu y vas fort, direct le train fantôme ! Et pas la version grand public.

Je déglutis. Je n'ai pas peur de ce genre d'ambiance mais va-t-elle penser que je l'ai fait exprès ?

— On peut choisir autre chose, si tu préfères.

— Non, pas de soucis, ça me convient très bien.

Elle attrape ma main et m'emmène jusqu'à la devanture. Une dizaine de personnes attendent dans la queue devant nous. Un groupe d'adolescents en quête de sensations fortes. Des couples qui discutent. Celui juste devant nous attire mon attention.

— Si j'ai peur, tu me prendras dans tes bras ? entends-je de la bouche de la jeune femme.

— Si tu étais chochotte, fallait prendre le train fantôme des enfants.

— Allez, tu me laisseras pas seule ?

Et son copain se marre, laissant la pauvre désemparée.

Victoria, témoin de la scène, monte légèrement sur la pointe des pieds pour venir trouver mon oreille et y susurrer:

— Et moi, j'aurais le droit de me blottir contre toi ?

Mon visage se colore sous sa demande que j'aurais dû anticiper.

— Euh... oui oui. Après, il est encore temps de faire demi-tour.

— Oh non, cela fait un moment que je rêve de savoir si ça, c'est confortable, me glisse-t-elle avec son index descendant le long de mon torse.

Un timide sourire orne mon visage fuyant. Ses rentre-dedans me surprennent encore, pourtant je devrais m'y habituer.

La file réduit à une vitesse impressionnante, bien plus rapidement qu'imaginé. J'ai à peine le temps de stresser. Pas à cause des hurlements qui parviennent jusqu'à mes oreilles, mais à l'idée de notre prochaine proximité. Dès que notre tour arrive, Victoria se faufile en premier dans la voiture du manège. Je la suis et glisse mon postérieur à côté du sien en gardant une distance respectable. Distance qui disparaît immédiatement quand ma voisine colle sa cuisse contre moi et trouve mon épaule pour y déposer sa tête.

Leçons de confiance (anciennement Learn to trust)Where stories live. Discover now