Le lampadaire et le pissenlit {BxB}

Chapitre 1

Le champs était si sec que les herbes manquaient de casser à chaque fin de coup de vent, brûlant. La route suintante à force d'accueillir les rayons de soleil hurlant de chaleur, avait une odeur infecte de chimique. Un temps plus frais commençait à s'installer à mesure que la nuit tombait, sans prétention. Au bord de cette route, à intervalles réguliers, des longs cylindres métalliques étaient dressés fièrement hors du sol, arborant au bout une sorte de capuchon de verre, lumineux une certaine heure passée. Et cette même heure approchait, les éveillant de leur sommeil de golem.

Petit à petit, alors que les ténèbres avalaient avec faim les derniers morceau de lumière solaire, la route s'illuminait des reflections des lampadaires. Certaines voitures passaient, les enfants aux fenêtres admirant les poteaux de métal et les papillons qu'ils attiraient. Dans leur immense imagination étalée entre les parois de leur crâne pourtant pas bien grand, un héro invisible s'accrochait autour pour se propulser plus loin, dans un véritable parcours de super-héro.

L'un de ces poteaux, cependant, se démarquait. Pourquoi ? Et bien, c'était discret, certes, mais au lieu d'être droit et dressé comme pour rejoindre les étoiles, il tombait légèrement, fixant le sol avec une fascination presque humaine. Comme si un poète maudit l'avait personnifié, afin de le faire contempler les petites fourmis, le rendant soudainement bien plus intéressant.
Seulement, voyez-vous, ce lampadaire, ce n'était pas les fourmis qu'il fixait, contrairement à ce que son poète aurait voulu.

Non, ce qu'il observait avec acharnement depuis quelques jours déjà, c'était cette petite chose verte qui commençait à dépasser lentement mais sûrement la surface sèche de la terre grisâtre. C'était d'un contraste sans pareil, tant le vert vif de cette jeune pousse resplendissait autour de cet environnement terne. Et le lampadaire était fasciné. Était-ce le hasard qui avait voulu que le temps le penche, et qu'une pousse grandisse quelques temps après, ou bien s'était-il penché pour voir grandir la pousse ? Peut-être que nous ne le sauront jamais, mais finalement, est-ce fondamental de savoir ? L'important est qu'en cet instant, le poteau et la pousse, qui n'est pas encore identifiable, sont rivés l'un vers l'autre.

Le poteau est patient. La pousse a besoin de temps. Ainsi, elle a trouvé son partenaire idéal, et se laisse désirer tandis qu'il se languit de la voir évoluer en une jolie plante. Mais une question tourne autour de son ampoule. Une question, qui le fait trembler d'attente, alors qu'elle devient de plus en plus verte:
C'est une pousse de quoi ?