[Chapitre 1]

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- Imogen ? a répété une voix derrière moi.
-Hum ? Répondis-je en me retournant étonnée.

Ce n'était que Kaly. C'était tellement rare de voir quelqu'un levé à cette heure-ci du matin que j'avais cru que c'était un voyeur. Ou... Autre chose, on ne savait jamais ici.

- Que fais-tu là ? Ai-je dis en arquant un sourcil.

- Je m'ennuyais au village... Tu es allée te réinscrire à la Fiche ? Nous sommes déjà le 1er Mai elles ont changé n'oublie pas.

Ah oui, en effet ça m'étais complètement sorti de la tête. A vrai dire nous avions une organisation si spéciale que c'est difficile de ne pas s'y perdre. Chez nous, la nouvelle année commençait le 1er Mai, et c'est ce jour où nous devions nous réinscrire sur la Fiche. Qu'est ce que c'était ? C'était simple: La Fiche était un endroit où nous inscrivions dessus notre nom chaque année afin de vérifier s'il n'y avait personne qui manquait à l'appel. Personne qui n'avait passé la frontière... Personne n'étant allé chez les Aintras.

- Imogen ? a-t-elle répété encore une fois, afin de me faire sortir de mes pensées, Tu devrais te dépêcher de t'inscrire sinon tu vas oublier et tu vas devoir passer les Examens, a-t-elle continué en me faisant un clin d'œil et en rigolant.

Les examens était pour ceux qui ont oublié de se réinscrire sur la Fiche. Ils était assez difficiles, et il valait mieux se lever tôt pour s'inscrire, quitte à ne pas dormir, plutôt que d'avoir à les passer. Ils se passaient en 2 étapes. En premier lieu venait le "détecteur". Une sorte de machine détectant - d'où son nom, si nous avions franchi la frontière précédemment ou non. Pour le savoir il faisait ça à l'odeur, car les frontières possédaient de forts parfums sortis des fleurs qui y étaient plantées à cet effet. En second venait l'épreuve du transfert. Nous plaçions tout les repêcher une semaine dans une sorte de "pièce" afin de savoir si ils se mangeaient ou pas. Oui oui, si ils se mangeaient ou pas. Je trouvais cette deuxième épreuve particulièrement absurde. Les Juges croyaient-ils vraiment que les Aintras sont cannibales et que l'on pouvait les reconnaître grâce à ça ? Enfin, je critiquais, mais mon père faisait partis des juges, qui étaient en tous quatre. Les juges était ceux qui donnaient leur accords, à la fin de la deuxième -et dernière en passant, épreuve, et qui accordaient aux "rescapés de l'inscription de début d'année", si je puis dire, leur chance. Mais bon, souvent certains mouraient de faim, ou de soif dans ses pièces isolés des Exilas...
Ah, tout ça juste à cause d'une veille qui n'en a fait qu'à sa tête il a des centaines d'années !

J'aurais préféré naître chez les Aintras, je pensais qu'eux au moins, ils n'étaient pas aussi intransigeant.

- Ne compare pas ta vie avec celle des autres, tu n'as aucune idée de ce qu'ils vivent réellement, a reprit Kaly.
- Hein ?
- Tu as encore pensé à voix haute, rigola-t-elle.
- Mince ! Un jour ça va m'arriver à un moment très important et grave, on ne va plus en rire !, ai-je rigolé à mon tour. Bon, je vais me réinscrire et on se rejoint devant chez toi dans 1 heure ?
- Pas de problèmes !

Enfin bon, j'avais quand même 24 heures avant de ne plus pouvoir m'inscrire, mais on ne savait jamais ce qu'il pouvait arriver. Plus vite se sera fais, moins j'y penserais.

Je me suis levée de la planche où je m'étais assise. Elle aurait facilement pu craquer sous mon poids mais elle s'était habituée à ce que je vienne ici, je considérait donc qu'elle m'avait adopté. Derrière cette planche se trouvait les railles d'un train hors-service et poussiéreux tombé il a des années à quelques mètres d'ici.
De là où je m'étais assise, on pouvait voir une vue imprenable, donnant sur un grand fleuve appelé Akalia. Peu de gens connaissaient cet endroit, c'était ce qui en faisait son mérite. Il fallait avouer que les Exilias ne quittaient jamais l'intérieur de leurs terres, et encore moins pour aller ici. En se penchant un petit peu, nous pouvions voir une infime partie de la frontière de nos "ennemis", ce qui leur donnait une raison de plus pour ne pas venir ici puisqu'ils en avaient peur. Toutefois, même si les habitants voudraient y aller, ils leur faudraient trouver le chemin, marcher une bonne quarantaine de minutes, traversant champs et forêt, et enfin avoir le cœur bien accroché pour ne pas tomber dans le ravin si la planche du train vacillait, ou même craquait. Et puis, c'était mon endroit.

-

À peine arrivée à l'entrée du village je pouvais déjà voir de loin la foule de gens qui patientait afin d'écrire leur nom. Je suis restée là, au milieu à les observer, j'adorais faire ça, observer les gens. On voyait d'un côté, les enfants de l'école de la ville qui s'étaient retrouvés et qui riaient de bon cœur, innocemment. Et de l'autre, on voyait l'inquiétude des parents de les voir trop s'éloigner, de rater l'inscription ou qu'il y ai une erreur dans les fiches, car ça arrivait très souvent. Même lorsqu'il s'agissait d'un enfant les juges étaient impartiales. Et tout le monde savait qu'un enfant, seul, à peine âgé de trois ou quatre ans ne pouvait pas survivre très longtemps aux épreuves.

- Pardon !, a alors dit une jeune femme aux longs cheveux blanc tout en me bousculant. Elle portait dans ses bras une petite fille âgé d'à vu d'œil quelques mois. Elle tenait également fermement dans sa main gauche la main d'une autre petite fille et criait sur deux autres qui semblait jumeaux.

-Oh, c'est toi Imogen ? Tu t'es déjà ré-inscrite ? a-t-elle répondu en criant d'un côté sur sa fille qui courait partout et de l'autre sur les deux garçons qui se disputaient.

-Mérédith ! Bonjour ! Non pas encore, mais je vais vous aider !, ai-je répondu en calmant les jumeaux et en les portant dans les bras.

-Merci Imogen, tu es un ange. Suis-moi, Mathéo fait la queue devant et nous n'aurons pas à attendre très longtemps.

Mathéo était un garçon de mon âge qui se trouvait dans ma classe. C'est vrai qu'on pouvait se dire que sa mère, Mérédith, a eu beaucoup d'enfants, mais ici comme les hommes était très très très peu nombreux, il y avait énormément de familles nombreuses pour tenter de rééquilibrer ce fait.

Nous nous sommes avancés vers Mathéo mais à peine bien installer dans la queue, c'était à notre tour.

- Votre nom., a dit un vieux barbus qui au ton de sa voix en avait certainement déjà marre de sa journée.

- Bonjour à vous aussi vieil homme, c'est un plaisir de vous revoir cette année encore, ai-je répondu d'un ton forcé.

- Oh, je t'avais oublier Omogène., a-t-il dit en levant les yeux au ciel, toujours avec un ton monotone.

- C'est I-M-O-G-È-N-E et ça se prononce Imaìgène ! Comme Imagine en Anglais quoi.

- Suivant., a-t-il dit en me décalant d'une main pendant qu'il me notait de l'autre.

- Raaaaay ! Tu m'écoutes, oui ?!, ai-je crié même si j'étais déjà trop loin pour qu'il m'entende.

Dans le village des Exilias, tout le monde se connaissait, puisque à vrai dire nous n'étions qu'une cinq-centaine. Ray était le premier homme que j'ai vu étant petite à part mon père puisque 95 pour-cent de notre population était constitué de femmes. Heureusement maintenant nous avions les laboratoires pour pouvoir rester nombreux mais à l'époque celle-ci diminuait vraiment dangereusement, nous menaçant de disparaître.

Toujours dans mes pensées, je suis partis en direction de chez Kaly qui devait m'attendre.
- Nos journées sont teeellement palpitantes ! Ai-je dis ironiquement en prononçant exagérément le e de tellement.

- Les seules animations qu'il y a sont celles du 2 Mai au matin, pour les examens de la fiche , mais moi ça ne m'enchante pas vraiment. Ai-je soupiré toujours en parlant toute seule.

HORION  [FR]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant