Sang-Mêlé Ω Le Destin d'Ana Ω

Chapitre 17 {À volonté}

Ana

- Franchement Nathan, tu devrais te détendre... Tout cette colère... c'est vraiment pas bon pour les rides... Se moque Kyle les bras croisés contre son torse, visiblement satisfait de son apparition fracassante.

Bien consciente que Nathan ne peut pas ignorer ses commentaires désagréables indéfiniment, je m'interpose entre les deux garçons pour faire face à Kyle. Ma réaction me vaut un sourire hypocrite de sa part, alors qu'il lève une main pour la placer sur son coeur dans un geste solennel. Kyle ajoute dans un rire :

- Je ne lui ferai rien, c'est promis.

- Ce n'est pas pour Nathan que je m'inquiète, mais pour toi. Ma réponse sonne comme une provocation, alors qu'un sourire en coin étire mes lèvres lorsque d'un air faussement blessé, Kyle fait mine d'essuyer une larme sur sa joue.

Finalement, il s'exclame :

- Ce n'était pas une question. Je viens.

Impuissante devant sa détermination, je ne peux rien dire ou faire quelque chose qui pourrait l'en dissuader. Alors, je me retourne vers Nathan cherchant en quelque sorte son assentiment pour Kyle. Mais ce dernier m'ignore royalement, préférant visiblement observer le sol avec obstination. Sa colère laisse désormais pas à une indifférence vraiment blessante, m'obligeant presque à le préférer lorsqu'il est prêt à perdre le contrôle pour tuer Kyle.

Finalement, un léger raclement de gorge finit par attirer notre à attention à tous. Slave entre à son tour dans la chambre de Beckie, déjà bien remplie. Et malheureusement pour moi, il ne semble pas avoir entendu l'ultimatum que vient de m'imposer Kyle. Le vieil homme se renseigne quelques minutes auprès de Landry de la situation, ne comprenant pas pourquoi l'infirmière est inconsciente et maîtrisée au sol.

Une fois l'explication de Landry achevée, il se pince l'arrête du nez visiblement frustré de son incapacité flagrante à recruter des adultes compétents pour l'aider à gérer une bande de gamins survoltés, à demi dieu.

En quelques minutes, il fait emmener la folle par deux gros bras que je n'avais pas encore vu. Avant de reporter son attention sur moi, mais n'étant pas vraiment prête psychologiquement à affronter ses remontrances sévères, je m'enfonce dans le déni en lui demandant quelques banalités.

Pourtant, Slave comprend rapidement mon intention d'éviter ce sujet laborieux, il me demande d'un ton étonnamment calme :

- Alors, as-tu d'autres noms à me donner ?

Mal à l'aise, je préfère fuir son regard n'assumant pas ma décision. Mon air dépité lui en dit long sur la suite, faisant se transformer son sourire en une étrange grimace qui efface définitivement toute la sincérité que Slave avait manifesté plus tôt auprès de Beckie.

Alors un mouvement hésitant, je désigne silencieusement les personnes présentes dans la pièce en commençant par Nathan, Beckie puis Landry. Avant que ma main tremblante stagne plusieurs minutes dans les airs avant de désigner Kyle avec hésitation.

C'est ainsi que le visage de Slave se décompose littéralement, le dévisageant d'un air grave. Je suis tentée de me défendre, de lui dire que ce n'est pas ma faute si Kyle est aussi obstiné qu'un âne. Mais devant l'afflux soudain de sang dans ses joues à cause de la colère, je décide de rester silencieuse.

- C'est une mission suicide. J'espère que vous en êtes tous conscients. Répond le vieil homme trop abattu pour se mettre à crier.

Finalement, une voix beaucoup trop enjouée fait irruption dans la chambre. La ressemblance avec Landry est suffisamment frappante pour me rappeler que ce garçon est l'un des fils d'Arès qui devait participer au tournoi des trois As. Un sourire béat aux lèvres, il s'exclame :

- C'est quoi vos têtes d'enterrement, y'a un mort ?

Le brun frappe légèrement l'épaule de Nathan pour lui faire comprendre que cette blague de mauvais goût lui est destinée. C'est ainsi que le fils du seigneur des enfers lui répond froidement, alors que ses yeux rouges et menaçants dévisageaient à nouveau son cousin devant lui :

- Bientôt un.

Kyle lève les yeux au ciel, alors que j'essaie de formuler une explication maladroite pour résumer la situation au garçon :

- J'ai une quête, et...

- Je viens ! Je m'ennuie vraiment trop ici ! M'interrompt aussitôt le brun dans une exclamation.

Reconnaissante, je le remercie silencieusement alors que Slave commente cette nouvelle annonce en se frottant frénétiquement les tempes, dépassé par la tournure que prend les événements :

- Magnifique ! Un enfant d'hadès, de Poseidon et de Zeus ! Avec en prime deux enfants d'Arès, et une fille de Déméter !

« Buffet à volonté ! S'esclaffe Kyle bruyamment, un large sourire aux lèvres.

- Vous partez demain, à l'aube. » Annonce le vieil homme tout en s'en allant d'un pas traînant.

Kyle fait alors un pas dans ma direction, alors que son regard jaune électrique m'observe avec curiosité. Par réflexe, ma main droite se lève immédiatement devant moi en espérant que ce simple geste le dissuade d'avancer davantage.

Et pourtant, je ne peux qu'imaginer la honte que je ressentirai si mon talent inné de tremper mes adversaires, me faussait compagnie. En effet, je n'ai pas encore compris toute la subtilité de ce pouvoir qui sommeille en moi depuis plusieurs années.

- Non, non, non. J'ai déjà pris une douche ce matin ! S'amuse Kyle, effectuant instinctivement un pas en arrière.

Je me détends, mais l'obscurité de la nuit commence à envahir doucement la chambre de Beckie. N'ayant pas l'intention de parcourir le chemin dans les bois à nouveau en pleine nuit, je fais un signe de la main aux autres pour leur souhaiter une bonne nuit.

Mais avant de quitter la pièce, je saisis la main de Nathan pour l'entraîner à l'extérieur de l'infirmerie. Ma conscience me rappelle rapidement que ce geste n'est pas anodin, alors j'essaie de me détacher de lui sans y parvenir.

Le garçon resserre son emprise, m'obligeant à le regarder du coin de l'oeil sourire de toutes ses dents. La sensation sa main sur la mienne est agréable voire même réconfortante. Elle me réchauffe instantanément, me faisant presque oublier la forêt inquiétante en face de nous, ou le regard désapprobateur de Slave dans la chambre.

Nous marchons sans jamais échanger un mot, jusqu'à ce que le bungalow de Poseidon se dresse majestueusement sur notre chemin. Je monte rapidement la première marche du perron pour être à sa hauteur. Forcée malgré tout de me hisser sur la pointe des pieds pour lui embrasser timidement la joue.

Mes joues prennent une teinte cramoisie lorsque son regard brûlant me transperce. Finalement, il se penche lui aussi pour chuchoter d'une voix basse à mon oreille :

- Bonne nuit, princesse.