Chapitre 1 ~ L'éveil

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And touched the sound of silence

Tic. Tac. Tic. Tac.

Je me réveillai, tranquillement, à l'étrange son de l'horloge. J'étais désorientée. Où étais-je donc? La dernière chose dont je me souvenais, c'était d'avoir pris l'auto pour aller à l'école, pour le reste, c'était le noir total. Avec difficulté, j'ouvris les yeux. La lumière était aveuglante et m'obligea à les refermer immédiatement. Après quelques tentatives, je réussis à les garder ouverts. La pièce autour de moi me paraissait étrange, elle était entièrement blanche. Les meubles, les draps, les murs, tout était d'une pureté sans comparable. Mon corps était engourdi et parcouru par des millions de frissons. Au début, les mouvements étaient difficiles, comme si j'étais resté allongé dans la même position trop longtemps. Au final, je me retrouvai debout, mes pieds nus touchant le carrelage d'une froideur immaculée. Je fis quelques pas, pour les moins saccadés, il faut l'avouer.

Tic. Tac. Tic. Tac.

Ce bruit d'horloge. Il avait accompagné mon réveil. Je parcourus de nouveau la petite chambre des yeux, mais ne trouvai aucun objet qui aurait pu produire ce bruit si caractéristique. Je décidai de sortir de cette pièce. Un courant d'air me fit frissonner et c'est lorsque je baissai les yeux quand je compris pourquoi.

J'étais toute nue.

Nue comme un ver! Que faisais-je dans une tenue si embarrassante? M'enveloppant des mes propres bras, je me dirigeai vers une petite commode blanche. En l'ouvrant, je découvrir des vêtements, blancs (à croire que tout était de cette couleur ici!). Je pris des sous-vêtements, un gilet au col en V et une paire de joggings. Tout avait l'air propre et à ma taille, il valait donc mieux pour moi d'enfiler cela que de rester dans cette position autant désagréable soit elle. J'enfilai le tout et me sentis tout de suite mieux.

Tic.Tac. Tic. Tac.

Je sortis de la pièce et me retrouvai dans un couloir qui suivait, sans contredit, l'ambiance de la chambre que je venais de quitter: il était blanc, infiniment blanc. Et interminable. Le tic tac semblait venir de droite je me mis donc en marche vers ce côté. Les portes se succédaient à distance équivalente. Je commençai à marcher plus vite, puis je me mis à courir. Ce couloir était sans fin. Je me sentais prisonnière, comme si j'étais dans un rêve. Les portes s'enchaînaient une après l'autre, aucune ne manquait à l'appel pour me laisser entrevoir une sortie. Haletante et dans l'incompréhension, je les regardai défiler, toutes semblables les unes aux autres. Peut-être était-ce un rêve? Je me pinçai. Aoutch. Non, je ne rêvai pas.

Tic. Tac. Tic. Tac.

Il y avait un peu plus de lumière au bout du couloir! J'accélérai. Mes jambes ne me portaient plus vraiment. Je trébuchai.

***

Disturb the sound of silence

Tic. Tac. Tic. Tac.

À quatre pattes sur le sol, je relevai la tête vers l'endroit d'où le bruit venait. Un homme était assis devant un bureau blanc, un crayon dans une main et une montre à gousset dans l'autre. Il semblait âgé, comme en témoignait sa chevelure blanche et les rides qui creusaient sa peau. Mais plus encore, il paraissait triste.

-Bonjour? dis-je.

Il ne répondit pas. Certainement trop concentré par ce qu'il faisait. C'était sa montre qui faisait tout ce vacarme. Chaque fois que cette dernière émettait trois tic tac, ce qui équivalait sûrement à trois secondes, il écrivait quelque chose. Je m'approchai essayant de voir de quoi il s'agissait. Il ne réagit pas, ne haussa même pas un sourcil quand je me penchai pour voir ce qui emplissait maintenant la page en face de lui. D'une poigne tremblante, il prit le morceau de papier et le déposa sur une pile de feuilles semblables et continua d'écrire sur une autre. Je pris le papier dans mes mains, par curiosité. Aucune réaction de sa part. À croire qu'il était dans l'incapacité de réagir au monde extérieur, mis à part bien sûr, au son irritant de sa montre de poche.

Sur la feuille des noms. Il n'y avait que des noms et une heure, précise aux minutes, aux secondes près. Une heure, puis un nom. Exactement trois secondes plus tard, un autre nom. Où étais-je donc tombé. En parcourant la liste des yeux, je manquai tomber à la renverse. Dans les premiers noms déposés sur la feuille, il y en avait un qui m'était familier, même plus que familier:

Allana Earl

Mon nom. Mon nom! Un peu affolée je regardai l'écrivain qui continuait à affairer sans me porter une quelconque attention.

-Hum, hum! Mademoiselle!

Je sursautai et échappai la feuille que je tenais. Une main sur mon épaule me força à pivoter.

-Que faites-vous là? On ne dérange pas l'Horloger, voyons, suivez-moi.

Un homme gringalet se tenait en face de moi, sa main osseuse m'empoignait douloureusement. Il détonnait un peu avec l'immaculé décor qui nous entourait. Ses cheveux noirs d'ébène étaient lichés vers l'arrière et son maigre corps était vêtu d'un veston-cravate lui aussi noir. Ses petits yeux noirs et enfoncés me fixaient avec condescendance. Pour être sincère, il semblait être un personnage pour le moins inquiétant. Il me força à avancer pour retourner dans le couloir. Je tentai de me dégager de son emprise, mais sans résultat. Avec étonnement, sa poigne était de fer malgré sa frêle apparence. Ma respiration s'accélérait au fil de notre cheminement dans cet affreux dédale. Je ne pus qu'arrêter de respirer lorsque nous approchâmes de la porte que j'avais restée entrouverte au peu plus tôt. Mais nous la dépassâmes.

In the wells of silence

Trop jeune pour mourirWhere stories live. Discover now