Une lettre

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Mon cher Natsu,

J'ignore si l'idée de t'écrire ce mail est bonne ou pas. Tout comme j'ignore pourquoi l'envie de le faire est née dans mon esprit, pourquoi je me suis mise à lentement taper ces lettres sur mon clavier, dans ce silence seulement interrompu par leurs ''tap'' régulier et par ma machine à café. À vrai dire, je ne sais même pas quoi te raconter, quoi te dire, quoi ne pas te dire, et je ne sais même pas si je finirais par t'envoyer ces mots, si tu vas réellement les lire, mais j'avais envie de me confier à quelqu'un, de laisser mes mots finalement fuir ce coin sombre et hostile qu'est devenu mon esprit.

Te souviens-tu du jour où nous nous sommes rencontrés ?

Le vent soufflait fort, ce soir-là.

Le vent soufflait fort et les arbres étaient enflés, étirés et dérangés, en perpétuel mouvement avec leurs immenses branches et leurs si petites feuilles qui ne cessaient de s'envoler. Des nuages venaient lentement peupler la surface dorée du ciel, amenés et vite balayés par ce souffle énergétique, tandis qu'un groupe de pigeons s'était posé tout près de moi et ne cessaient de me distraire, se chamaillant pour quelques graines de tournesol.

Malgré tout, cette soirée-là me semblait tranquille.

Étrangement tranquille, d'ailleurs, et je n'arrêtais pas de remuer, de changer de position sur le banc du parc dans lequel je m'étais installée, étirant mon cou de temps à autre pour te chercher de mes yeux fatigués.

Cela devait faire une demi-heure que j'attendais et je commençais à me demander si tu allais venir.

J'ignore si tu étais au courant, à l'époque, mais je j'allais te voir tous les soirs pendant une semaine, avant de finalement oser t'approcher. Je venais t'écouter chanter, te voir bouger tes doigts sur ta veille guitare un peu amochée et terriblement simple, voir ton visage calme et nostalgique, tes yeux verts qui avaient prit cette habitude de se fermer alors que tu ouvrais ta bouche pour laisser sortir ta voix, ta si merveilleuse, magique voix. Dès que je l'entendais, je sentais ma poitrine se gonfler de tristesse, de joie, de mélancolie, d'espoir, de tant de sentiments différents qui ne cessaient d'affluer, encore et encore dans mon esprit.

J'en sortais chamboulée.

J'en sortais avec les larmes aux yeux et la bouche ouverte, le regard lunatique, absent, encore plongée dans cet univers riche en couleurs que tu avais su faire apparaître.

Je ne sais pas si je t'ai déjà dit à quel point j'avais de l'admiration pour toi, Natsu.

Oui, je t'admirais, je t'admirais tellement que je n'osais t'approcher, craintive et timide, préférant rester sur mon banc, dans mon tailleur gris, avec mes cheveux bien coiffés et mon visage maquillé impeccablement, mon sac à main sagement posé sur mes genoux, ressortant du lot et n'allant pas bien dans le décor simple du parc, t'observant de loin et dans le silence, enfermant tous les mots que j'aurais voulu te dire dans un coffre secret au fin fond de ma tête.

J'aurais voulu rester comme ça pour toujours, garder cette situation pour toujours. J'aurais voulu continuer à venir te voir de loin, à t'écouter tous les soirs après mes si longues journées de travail et à t'admirer en silence.

Oui, j'aurais aimé te garder secret encore plus longtemps.

Si seulement je n'avais pas paniqué et que je n'en avais pas parlé, à mon travail, les choses auraient sans doute tourné différemment.

Mais que veux-tu que je te dise ? Lorsqu'on m'a annoncé que cette maison de disques de mon père allait sans doute s'effondrer, que nous n'avions d'autre choix que de la vendre à une autre compagnie, que la seule façon de s'en sortir était d'enregistrer une nouvelle voix spectaculaire, j'ai tout de suite pensé à toi.

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⏰ Dernière mise à jour : Nov 22, 2015 ⏰

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