Candidate: Aria Nightingale

Épreuve 1

Nous répétons sans interruption depuis huit heures du matin, je n'en peux plus de jouer les mêmes scènes incessamment, je pourrais citer chacune de mes tirades en dormant. Mais c'est justement ce travail acharné qui fera la différence sur scène, et c'est ce qui nous encourage à ne pas laisser tomber.

Contrairement au lundi, mercredi et vendredi, où je ne travaille au théâtre que le soir après mes cours, le samedi j'y passe ma journée. Même si c'est parfois épuisant, comme aujourd'hui, être sur scène avec la compagnie est une des choses que j'aime le plus en ce monde, si on m'enlevais cette passion ma vie serait bien triste et aurais beaucoup moins de sens, jouer la comédie me permet de m'évader, d'être quelqu'un d'autre pendant trente, quarante minutes, une heure, le temps d'une pièce.

-Bon, assez répété pour aujourd'hui ! Vous avez tous bien travaillé, je pense que vous serez au point pour lundi. Dehors maintenant ! Et soyez à l'heure pour le filage !

Nous acquiesçons en riant avant de nous séparer.

Arrivée à mon chaleureux petit foyer, je monte quatre à quatre les escaliers pour me jeter sauvagement sur mon lit en soufflant.

Mon père n'a pas l'air d'être là, il est sûrement à son atelier.
C'est ce soir que seront révélés les noms des candidates sélectionnées, j'avoue me sentir un peu anxieuse. Je ne sais pas si c'est ce que je veux vraiment, mais j'espère que cela pourra m'aider. Si je fais partie des sélectionnées bien sûr.

***

Aria Nightingale caste quatre, Calgary
Cinq mots brièvement prononcés par le Prince il n'y a encore que quelques secondes.

J'en suis un peu confuse, c'est étrange d'entendre son nom de la bouche d'un membre de la famille royale. Ou simplement, de voir son propre visage à l'écran d'une télévision.

Je ne m'y attendais, à dire vrai, aucunement, mais j'en suis heureuse.

-Félicitations Ary ! Je savais que tu allais être sélectionnée ! s'exclame mon père joyeusement.

-Merci mon petit papa. je lui répond, attendrie.

Il me prend dans ses bras et me caresse délicatement le haut du crâne comme quand je n'étais encore qu'une enfant.

-On dirait bien que tu vas devoir me laisser tout seul pendant un moment.

-Oh non, ne t'inquiètes pas, je ne penses pas que j'y resterai longtemps, il y a tellement de filles magnifiques et pleines de qualités à Illéa. Ils me chasseront bien vite, et quand je reviendrai, je m'occuperais de toi comme il se doit. lu dis-je le serrant fort contre moi.

-Ary... C'est moi qui doit prendre soin de toi et non l'inverse. me reprend-il en riant doucement. -Je ne sais pas comment sont les autres jeunes-filles de ton âge, mais je suis fière de toi ma chérie. Je veux que tu te laisses réellement porter par ton cœur dans cette aventure, si tu ne t'y sens pas bien, ne vas pas plus loin et arrête toi là. D'accord ? je hoche la tête pour montrer mon assentiment. -Le Prince n'a pas intérêt à tenter quelque chose de déplacé, sinon j'irais moi-même lui en toucher deux mots. me chuchote-t-il avant de s'écarter en me clignant de l'œil.

-Papa ! Tu exagères. je m'indigne en gloussant.

-Bien, maintenant trêve de plaisanterie, il est déjà tard, je vais me coucher. il m'embrasse affectueusement le front avant de disparaître dans la salle de bain.

Je reste pour ma part, assise sur le canapé, réfléchissant à tout ça.

La Sélection est pour moi une chance de repartir à zéro. Je m'y suis inscrite , alors que je sombrais dans une noire dépression à la suite du désastreux achèvement d'une relation que je partageait depuis maintenant cinq ans avec le plus affreux crétin de l'univers.

Simon Blayer c'est son nom, la seule personne, en omettant mon père, que j'ai réellement laissé entrer dans mon cœur depuis la mort de ma mère.

Les relations amoureuses ne m'avaient jamais intéressées, mais il avait tout fait pour que je le remarque et sois intriguée par lui, et j'en suis au final, si sincèrement venu à l'aimer, que j'ai été détruite quand j'ai découvert, il y a trois mois, qu'il n'avait aucunement le projet de m'épouser un jour, et qu'il voyait même une autre filles en parallèle depuis plus de quatre ans.

Trois semaines plus tard, il m'a expliqué, que j'avais à l'origine été l'objet d'un pari fait avec ses amis, et qu'il avait par la suite eu pitié de moi et n'avait donc pas eu le cœur de rompre avec moi. Il avait aussi rajouté que même s'il m'avait vraiment aimé il ne serait pas resté éternellement avec moi car je ne suis qu'une quatre alors qu'il est un trois.

Il ne me restait plus une once de sentiment positif, ou d'espoir, j'avais été complètement réduite en poussière.

C'est alors que vint le jour où je découvris l'élégante enveloppe du Palais Royal sur la grande table du salon, je la vis comme un miracle, une issue vers une nouvelle vie. Je voulais vraiment m'en sortir, me faire des amies, peut-être, pour la première fois; participer à quelque chose qui me change de mon si calme quotidien; vivre cette aventure nouvelle; changer d'air.

J'avais besoin d'un nouveau départ, pour me dire "ça y est, c'est finit", et passer à une autre étape de ma vie, continuer à grandir, à me construire.

Peut-être le Prince est-il celui avec qui je construirait cette avenir. Trouverais-je en lui celui dont j'ai besoin ? M'appréciera-t-il ?

Simon Blayer tu n'auras pas le plaisir de me voir baisser les bras, c'est une nouvelle moi à qui tu feras face dès aujourd'hui.