Winter never dies

Souvenir de Maud

C'était un jour froid de décembre, Maud était emmitouflée dans sa grosse doudoune quand elle entra dans un café.
Elle avait froid, ses dents claquaient, le bout de son nez était rouge et ses mains, malgré ses moufles, ressemblaient à deux tomates prises dans la glace.

Tremblante, elle retira son bonnet et le rangea dans son sac en remarquant qu'elle allait difficilement trouver de la place, car la pièce était remplie. Les gens parlaient bruyamment, et le souffle du vent contre les vitres n'arrangeait rien. Le serveur rentra l'affiche des boissons à l'intérieur avant qu'elle ne soit emportée par la tempête.

Elle se fraya un passage jusqu'au comptoir en zigzaguant entre les employés débordés qui essayaient tant bien que mal d'apporter les boissons aux clients, qui ne leur facilitaient pas la tâche en interpellant leurs compagnons dans tout le café.

Maud eut envie de déguerpir en entendant le brouhaha continuel, mais elle se résonna en se rappelant le temps exécrable qu'elle n'avait pas envie de sentir de sitôt.
Elle arriva enfin devant un serveur affairé à préparer toutes sortes de boissons chaudes.

-bonjour, un chocolat chaud s'il vous plaît.

Il releva la tête, acquiesça et retourna à son travail.
Et bien, remarqua Maud, pour un bavard, il parle vraiment beaucoup!

Elle s'appuya contre la haute table en bois qui séparait clients et employés en enlevant son manteau, elle commençait à avoir vraiment chaud.

Le bavard revint enfin, après une longue attente, avec sa boisson.

Et...

*

-je ne me souviens plus du prix de la boisson, excusez-moi, dit Maud.

Tous ses amis grommellent, ils étaient vraiment très pris dans l'histoire et c'est bien connu que la jeune conteuse a une façon de parler captivante.

-on s'en fiche du prix de ton chocolat, c'est de Jules qu'on parle, grogne Nevada.

Ça ne rassure pas vraiment Maud.

-je n'aime pas les problèmes d'authenticité, ça rend l'histoire moins vivante.

-ne t'inquiète pas, dit Jonah sans regarder personne, Jules est un personnage que personne ne peut oublier si facilement.

*

Donc, Maud a payé son chocolat chaud, et elle s'est mise en quête de trouver une table où elle aurait pu s'assoir et profiter tranquillement de la douceur de sa boisson très chaude.
Quelle ne fut sa surprise quand elle se fit percuter par une jeune fille.
Elle hurla en voyant sa plus belle chemise recouverte d'un liquide —précisons-le- très froid.
L'autre fille la regarda d'un air désolé.

-excuse-moi, tu veux que je te passe mon t-shirt?

Maud releva la tête et tenta —tant bien que mal- de se calmer.
Elle dévisagea l'autre fille.
Elle était toute petite, les cheveux très longs, bruns, des yeux marrons clairs. Banale, si on faisait abstraction de la lueur qui ne quittait pas ses yeux un seul instant.
Sa voix était douce, plutôt grave, très posée et elle ne semblait pas du tout gênée.

-non, grogna Maud, ça ira.

-j'insiste.

L'autre souriait. Maud remarqua qu'elle portait un énorme sweat bleu marine, un pantalon noir complètement déchiré et des baskets maculées de terre séchée. Ça lui donnait un style différent de tout le monde et les regards convergeaient souvent vers elle quand elle se promenait toute seule dans la rue.
Une grosse trace de noir comme une peinture indienne traversait toute sa joue. Elle ressemblait à une guerrière.