Chapitre 1 : Mon histoire

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Je ne sais pas depuis combien de temps j'étais assise sur ce banc à réfléchir à comment trouver du travail. J'étais tellement fatiguée d'en chercher que je commençais vraiment à me décourager.

Cinq mois déjà que j'étais à Dakar et mon argent commençait à s'épuiser. Contrairement à Ziguinchor, ma ville natale, la vie ici est très chère. Mon argent dégringole à une vitesse effroyable. Un million trois cent quatre-vingt-huit francs, c'était la somme exacte que j'avais en débarquant dans cette ville.

J'ai loué une petite chambre à la Médina, la caution et les quelques meubles que j'avais acheté m'avait coûté deux cent mille Fr. Ensuite je me suis payée quelques habits n'ayant pratiquement rien à porter de décent. Aussi pour mon loyer, mes factures et ma nourriture je dépensais en moyenne cent mille franc par mois. Il me fallait trouver du travail rapidement au risque de me retrouver à la rue...

A deux fois on m'a proposé des emplois de nuits dans des bars mais j'avais refusé par principe. Déjà qu'il était difficile aux hommes de se retenir en ma présence alors sous l'emprise de l'alcool je ne m'imagine même pas. Les semaines passent et je commence à me demander si j'ai bien fait de quitter ma ville natale aussi rapidement et sans même réfléchir à ce qui m'attendait.

Mais j'en avais marre de toutes ses insultes, de tous ses regards de haine qu'on me faisait à longueur de journée sans que je n'aie rien fait pour les causer. On m'a détesté dès que je suis née et ça ne changera jamais. Est-ce de ma faute si ma mère a été enceintée à l'âge de 16 ans par un touriste toubab... ?

Elle était belle ma mère, de ce qu'on m'a raconté. Une beauté sans égale. Née d'un second mariage de mon grand-père avec une femme d'ethnie peulh de qui elle hérita la beauté légendaire. Teint marron, taille élancée, elle avait un visage fin avec de grands yeux d'une blancheur immaculée, accentuée par la noirceur de ses iris. Ses joues rebondies mettaient en valeur son petit nez retroussé et quand elle souriait ses lèvres fines laissaient apparaitre des dents d'un blanc étincelant comme celui de ses yeux. Du haut de ses longues jambes se dessinaient de jolies hanches qui étaient ni gros ni petits comme son postérieur, bref un corps parfait qui avait fini de faire succomber les plus sceptiques à sa beauté.

Ma grand-mère, ma seule amie et alliée dans la maison, disait qu'elle était la fierté de son père (mon grand-père) qui la pavanait partout comme un trophée et secrètement lui cherchait de riches prétendants. Aussi elle était choyée, n'accomplissait aucuns travaux ménagers et fut la première fille de la famille à aller à l'école attisant ainsi la jalousie de toutes ses sœurs mais surtout la méprise de sa belle-mère, la première femme de grand père. Soukey elle se nommait, elle couvait une haine viscérale envers grand-mère Nafi et sa fille. Contrairement à sa coépouse, elle n'avait pas était mariée par amour mais plutôt par convenance et la préférence de grand père Daouda pour sa deuxième femme l'ulcérait.

Ma grand-mère me disait par moments: « oh ma fille c'est Daouda qui a tué notre fille et je ne le lui pardonnerais jamais. S'il me l'avait laissée à la maison au lieu de la pavaner partout avec lui, jamais tout cela ne serait arrivé. Je lui aurais inculquée le sens de l'honneur et elle n'aurait pas été aussi naïve. Maintenant le mal est fait et que Dieu nous donne la force de tout oublier. » Puis elle me regardait de ces yeux tout tristes et ajoutait « sans toi j'aurais rejoint mon mari et mon unique enfant mais quand je t'ai tenue dans mes bras j'ai su qu'il me devait de rester et de te protéger contre ce qui t'attendait. »

Au début je n'avais pas compris ce qu'elle voulait dire par là, mais au fil des années quand mon corps commença à se développer et que dénigrements et insultes commencèrent, je compris.

Beauté Maudite Tome 1Tempat cerita menjadi hidup. Temukan sekarang