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Ce matin, mon réveil a sonné plus tôt que de coutume. Je sors de chez moi et cours presque jusqu'au port, ne sachant s'il est rentré dans la nuit ou s'il a dormi là-bas. Malheureusement, son bateau ne m'y attend pas.

— Tant pis, murmuré-je, déçue.

Rapidement, je lui envoie un message. Sa réponse ne tarde pas : il arrive dans la matinée et me rejoindra au Passe-Temps. Dans quel état vais-je le retrouver ? Je décide de l'appeler. Sa voix matinale, grave et profonde, me répond presque instantanément.

— Tu as dormi ? m'enquiers-je d'une voix douce.

— Je crois, et toi ?

— Après ton appel, je me suis endormie comme un bébé, avoué-je.

— J'aurais aimé voir ça... J'arrive bientôt, OK ?

— Je t'attends.

Plus légère après l'avoir entendu, je raccroche. Il m'a paru plutôt bien, moins tendu que la veille.

Étant en avance, j'en profite pour déjeuner tranquillement, sur la terrasse du Passe-Temps. J'espère sincèrement qu'Ayden ressortira moins torturé de ce repas. Il a besoin de réponses et surtout, qu'on le rassure.

Les clients arrivent chacun à leur heure quotidienne, prenant leur table et commande habituelle. Ils ont tous leur routine bien à eux, cela me convient parfaitement.

Je sifflote tout en vagabondant entre les tables. Au moment où je reviens au comptoir, j'aperçois un homme, de dos, qui se prépare un café.

— Fais comme chez toi surtout.

Ses yeux bleus me surplombent. Une tasse fumante à la main, il s'assied sur un tabouret, prêt à me parler. Alors que je m'avance vers lui, des personnes entrent. Lui donnant un sourire d'excuse, je vais les accueillir.

— Sur la terrasse ou à l'intérieur ? demandé-je à ces touristes.

— L'extérieur plutôt, répond le père, souriant.

J'entraîne cette petite famille sur une table bien exposée. Les enfants commandent un jus de fruits et une viennoiserie tandis que les adultes restent sur un expresso.

Vivement, j'entre à nouveau, saluant mon petit ami par un baiser furtif.

— Je suis à toi dans quelques minutes, le prévins-je.

— J'ai tout mon temps.

M'empressant de terminer ma tâche, je sors une nouvelle fois.

— Et voilà pour vous.

Je glisse la note sous le pot de sucre et leur souhaite un bon appétit. M'apprêtant à rentrer, je rejoins Ayden. Tranquillement, je m'installe face à lui. Il s'empare doucement de ma main et baisse les yeux sur nos mains liées.

— Alors ? le questionné-je, impatiente.

En silence, il cherche mon regard. J'ai l'impression qu'il semble à la fois soulagé et inquiet. Il finit par se lancer :

— Au début, la discussion était plate et tout le monde s'affairait à éviter le sujet tabou. Au bout d'une vingtaine de minutes, je n'y tenais plus alors, je me suis mis à parler. Personne ne m'a coupé. Je ne sais pas combien de temps je me suis exprimé seul, mais ils m'écoutaient attentivement. Puis, quand je me suis tu, il y a eu un gros silence. Louise a pris la parole la première : elle s'est excusée. Par la suite, Helen m'a assuré qu'elle m'a toujours considéré comme son véritable fils. Puis, Henry est resté silencieux. Un moment. Ensuite, il a affirmé qu'il était désolé, mais qu'il ne regrettait pas de m'avoir adopté, moi. Il est fier de moi et n'a jamais fait la différence entre son propre enfant et celui qui a été adopté.

Avec ou sans sucre ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant