Mauvais pressentiment

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J'entendis un bruit métallique. J'ouvris les yeux, et réalisai que j'étais seule dans notre chambre. Je me levai, lentement, encore courbaturée par la nuit passé à même le sommier du lit. Je passai dans le cagibi qui nous servait de cuisine, tandis qu'une odeur de pain grillé envahissait notre petit deux pièces. Et alors, je l'ai vu, la lumière qui illuminait ma vie, mon frère, mon jumeau. Il était juste comme moi, brun aux yeux verts, il me dépassait seulement d'une tête.

- Salut, frangine. T'as bien dormi ?  me demanda-t-il, une poêle dans la main.

- 'Lut, répondis-je dans un bâillement, ça va. Je n'ai pas rêver, alors ça va.

Je m'assis à l'unique table de la maison. Il m'apporta des œufs brouillés, exactement comme notre mère qui nous avait appris à cuisiner. En réalité, je n'ai jamais été doué en cuisine. Heureusement, il l'était. Notre famille tenait la meilleur boucherie du district 10 depuis des générations, avant même la révolte. C'est de la d'où venait notre nom : Butcher. Nous n'étions pas riche, mais nous avions une belle vie. Mais notre vie se dégrada rapidement après le décès de Maman. Un jour, elle tomba malade. De plus en plus faible, elle finit par mourir lorsque nous avions douze ans. Secrètement, je pensais que c'était mieux ainsi. Elle n'aurait jamais survécu à notre première moisson.

Papa était tellement triste qu'il s'était mis à travailler plus dure encore, il ne rentrait presque jamais à la maison. Il partait tôt le matin et tard le soir. Je suis sûr que c'était pour les oublier, notre mère et la solitude. Il a seulement oublié qu'il n'était pas si seuls, ils nous a juste oublié, Keir et moi.

Je me souviens, la boucherie était pleine de clients, le brouhaha m'empêchait même de m'entendre penser tandis que j'aidais Papa. Après tout j'ai toujours eu un don pour le maniement du couteau. Soudain, deux pacificateurs sont entrés, l'un d'entre eux était nouveau au district.

Le plus âgé voulait être servis avant les clients, mais Papa refusa. Bien sûr, il était têtu. Il estimait que pacificateurs ou non, ils devaient faire la queue comme tout le monde. La conversation s'enflamma. Mon père avait un couteau dans la main. Un gros et impressionnant couteau de boucher, peut être un peu trop impressionnant. Le plus jeune des pacificateurs paniqua quand mon père pointa son couteau vers lui. Les pistolets étaient sortis. Un coup fut tiré. Le silence s'abattit. Mon père nous quitta alors que nous n'avions que quinze ans. Je le vois encore, étendu parmi la viande crue. Les pacificateurs ont dit que c'était sa faute. Personne ne les a contredit. Le seul moyen de ne pas tomber dans la misère était de reprendre la boucherie.

Nous avions à présent dix-sept ans. Je coupais la viande et Keir s'occupait la cuisine pour les clients. Les temps devenaient dur. Mais nous étions ensemble. Avec lui à mes côtés, je pourrais toucher la lune. Il était la main et j'étais le couteau. Il s'occupait de la boucherie à la perfection, très fort en comptabilité et impeccable en gestion. Je me demandais souvent comment j'aurais fait s'il n'avait pas été là.

Mais j'étais pleine de haine. Je haïssais ceux qui ne nous avaient pas aidé. Je haïssais les pacificateurs. Je les haïssais. Je haïssais le Capitole. Je haïssais les Hunger Games. Je haïssais ces enfants qui s'entretuaient. Je haïssais ces adultes qui regardaient ça. Je haïssais toute personne, je haïssais toute chose, sauf lui. Il était ma lumière, ma raison de vivre.

Cette année-là était la dernière année de la moisson pour nous. Bien entendu, j'étais moins anxieuse que les années précédentes, mais je restais inquiète. Que faire si nous étions séparés ? Que faire si la moisson prenait l'un d'entre nous ?

- Maka ? Tout va bien ?

Je levais la tête, Keir était en face de moi et avait déjà finis ses œufs.

Le boucher des 67ème Hunger GamesWhere stories live. Discover now