Le coffre

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Le vent s'engouffre, la porte claque et résonne dans le large silence de la demeure de Dieu. Un long couloir délimité par deux rangées de bancs s'étend au delà de la pénombre. De part et d'autre, on devine de maigres ouvertures parsemant le sol de fines lamelles blanches. Quelqu'un s'approche, ses pas résonnent sur le sol épais. Le bruit d'un tissu qui glisse sur le sol. Du métal qui s'entrechoque. Une respiration saccadée. Il ralentit à la hauteur de l'autel puis étend ses mains sur l'imposante table. Il expire. Son souffle s'apaise enfin, ses muscles se relâchent. Puis, il se ravise et recule avant de s'agenouiller sur les dalles froides. Le contact avec le sol lui arrache une maigre grimace. Ses genoux supportent son poids. Ses mains se croisent et son visage pivote vers les hauteurs du bâtiment. Ses yeux se plissent et sa bouche murmure des paroles incompréhensibles. Ses rotules le font souffrir comme s'il était en équilibre sur une marche, elles craquent. Habituellement, le sol de l'Eglise n'était pas aussi irrégulier. Alors, il s'accroupit et tâte le sol. Il remarque une légère différence de niveau. Ses doigts heurtent le pourtour d'une dalle comme si elle avait déjà été soulevée à cet endroit.

Son cœur bat à tout rompre et résonne dans sa poitrine, l'Eglise de son corps. Il jubile. Ses doigts commencent à soulever la pierre fine. Une simple couverture. La cachette était là depuis de début, sous son nez. Ou cacher un trésor si ce n'est dans l'endroit le plus évidant ? Face à l'autel, trois pas en arrière, à la croisée de la nef et du transept, il est là, enfoui, tout simplement. Il projette la plaque sur le côté faisant voltiger une fine couche de poussière. Il hasarde une première main dans la cache. Il le frôle enfin. Il enfonce sa deuxième main et l'extirpe. Il frôle son but. Il se redresse et hisse un coffre sur le plat de l'autel. Il examine son couvercle. Un croissant de lune sculpté dans une lune pleine. Les dessins s'entrechoquent tout comme un sentiment d'appréhension mêlé à de l'impatiente. Par précaution, il examine davantage la gravure et remarque des écritures entourant les deux lunes.

Qui aperit fit

Du latin il traduit, celui qui ouvre devient. La prophétie disait donc vrai, songe t-il. Sans plus attendre, il l'ouvre. Dans son impatiente, le couvercle est projeté et heurte le sol violemment avant de se fracasser. Il se penche et observe son contenu. Rien. Pourquoi ne contient-il rien ? Ses mains agrippent les parois de l'objet et le secoue avec férocité. Il hurle. Un cri presque bestial secoue le sommeil des statues. Celui qui ouvre est censé devenir. Serais-ce possible qu'il eût déjà été ouvert ? Soudain sa gorge se noue. L'air ne lui parvient plus. Il rejoint le sol avec brutalité et convulse. Son corps tremble intensément et une douleur fulgurante lui fige le dos. Ses jambes se tendent. Son crâne bout. Ses oreilles sifflent. Du sang jaillit de sa gorge et l'étouffe. Une dernière pensée se tourne vers Dieu. Voilà que je deviens

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⏰ Last updated: May 03, 2017 ⏰

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LE VILLAGE S'ENDORTWhere stories live. Discover now