Chapitre 9 : Little light of Love

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Je pénétrai dans cet hôpital, en essayant de ne pas me faire remarquer. Les Chérubins ne devaient pas être bien loin. Il fallait que j'aie le temps d'absorber une âme pour guérir et traverser les voiles qui dissimulent les Limbes. Mais pas n'importe quelle âme. J'étais tellement affaibli que j'avais besoin de l'énergie innocente d'un enfant. Un bébé serait idéal.


Je me dirigeai donc vers le service des soins intensifs de l'aile pédiatrique. Les effluves de produits chimiques agressaient mes sens. Désinfectants et médicaments se mêlaient à l'odeur des fluides du corps humain, comme une fragrance brutale tentant de masquer l'urine, le sang et le pus. Et, en dessous, telle une note puissante et tenace qui se jouait des hommes, celle de la Mort.


Je m'appuyai contre un mur afin de ne pas m'écrouler. Ma main était agitée de tremblements. Je n'avais plus la force nécessaire à ma transformation en énergie primordiale. J'étais devenu prisonnier de cette enveloppe fragile et imparfaite.


Je rentrai la tête dans mes épaules et fuis le regard des humains que je croisais. Dans mon malheur, la chance m'offrait l'un de ses sourires incertains. Personne ne fit attention à moi. Personne ne m'arrêta pour me poser des questions auxquelles je n'aurais pu répondre.


Alors que je désespérais de trouver une chambre dans laquelle me nourrir sans témoins gênants, je sentis quelque chose qui m'appelait.


Le chant d'une âme à l'agonie.


Je poussai la porte sans faire le moindre bruit. La pièce était vide. Non, pas vraiment... Près de la fenêtre, un berceau en plexiglas contenait un bébé. Une toute petite fille.


ELLE.


ELLE était en train de mourir et son âme, déjà vacillante, allait s'éteindre.


Je m'approchai et la pris avec douceur dans mes bras affaiblis. Je scrutai son visage. Non, en réalité, je voyais au-delà, je contemplai son âme. Son âme pure. J'étais sur le point d'aspirer son énergie vitale, de la faire mienne pour survivre, quand ELLE ouvrit les yeux.


Elle me parla en silence.


Son esprit était acceptation. ELLE était sacrifice.


Quelque chose se brisa alors en moi... Je ne sais toujours pas ce que c'était. Je la serrai contre mon torse et commençai à la bercer tout en lui transmettant les quelques bribes de force qu'il me restait. Je m'assis dans le fauteuil qui se trouvait à côté de son berceau, tout en continuant à lui offrir les lambeaux de mon essence. Apaisé, serein et prêt à mourir afin qu'ELLE vive, je fermai les yeux. Je ne comprenais pas ce qui m'arrivait et, pour être honnête, je n'avais plus assez d'énergie pour y réfléchir. Vaincu par des forces plus puissantes que moi, je lâchai prise et me laissai atteindre par la chaleur de cette âme, qui retrouvait peu à peu de son éclat.


Lorsque j'ouvris les paupières, je réalisai que je n'étais plus seul avec ELLE.


D'immenses yeux bleus me fixaient. D'immenses yeux dans lesquels je pouvais lire l'incompréhension. Un ange se tenait face à moi et ses ailes, d'une blancheur éblouissante, étaient déployées dans son dos, signe qu'il était prêt à m'attaquer pour protéger l'enfant.

Sympathy for the Devil (sous contrat d'édition)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant