Chapitre 1

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Hope était la femme de ma vie.
Elle était celle qui me donnait envie de me lever, celle qui me donnait envie de vivre.
Je l'ai perdue.

Elle est partie le lundi quinze septembre. Je n'oublierais jamais le regard qu'elle m'a lancé avant de se faire percuter par ce camion dont le chauffeur avait abusé sur l'alcool.
Son regard était rempli d'effroi, de tristesse et d'incompréhension. Et moi, je l'ai regardé . Je n'ai pas réagi assez vite. Et quand j'ai réalisé ce qui était en train de se passer, c'était trop tard.
C'était trop tard...
J'aurais dû courir vers elle, j'aurais dû la sauver, j'aurais dû me faire renverser par ce camion à sa place.

Cette journée avait pourtant commencé tout à fait normalement.
Je m'étais réveillé aux côtés de Hope, et nous nous étions levés. Nous avions pris notre petit-déjeuner. Comme chaque jour, je la contemplais lorsque qu'elle mangeait ses céréales.
Elle était belle, la plus belle femme que je n'ai jamais vu. Blonde, grande, un sourire espiègle. On pouvait voir une lueur d'intelligence dans ses yeux, et ce n'était pas qu'une lueur : c'était une fille brillante. Elle n'était pas très sportive, ce n'était pas le genre à faire un régime, plutôt du genre à apprécier la nourriture assez calorique, c'est une des innombrables choses qui me plaisait chez elle. C'était une fille qui croquait la vie à pleine dents.
Lorsque nous avions fini de manger et que nous nous étions préparés, j'étais parti au travail tandis que Hope s'était rendu à son école infirmière.
Elle aurait fait une formidable infirmière : gentille, douce, à l'écoute des autres ...
Ma journée au travail s'était bien passé. Une journée comme les autres, avec aucun événement particulier.
Je ne suis qu'un professeur d'anglais.
A la fin de la journée, j'étais rentré à notre appartement . J'avais commencé à ouvrir la porte de l'immeuble quand j'ai entendu une voix derrière moi. C'était Hope. Elle m'appelait.
Je m'étais retourné et l'avais vu de l'autre côté du passage piéton, tout sourire dans sa robe à fleur.
Je lui avais souris en retour.

  Elle avait pourtant attendu que le piéton passe au vert, mais cela n'a pas suffit.
Tout s'est déroulé au ralentit.
Le piéton était passé au vert et elle avait commencé à traverser.
Puis , tout d'un coup, un camion a surgit à toute vitesse. Le conducteur était complètement bourré.
Il a renversé Hope.
Il l'a renversé sous mes yeux.
Après, la police et les secours ont débarqué.
Les secouristes ont tout de suite compris que c'était trop tard.
Sur le moment, je n'ai pas réagi.
Je ne comprenais pas ce qui se passait. C'était tellement surréaliste.
J'en était sûr: j'allais me réveiller et me rendre compte que ce n'était qu'un affreux cauchemar.
Or, ce n'était pas le cas.

Après l'accident, je ne suis pas retourné travaillé. J'ai passé la semaine seul, dans notre appartement, abattu.

  Lors de son enterrement , je n'ai pas pleuré. J'ai contenu mes larmes.
J'ai vu sa famille. Son père et sa mère étaient en larmes, son petit-frère essayait de rester fort mais je pouvais voir les larmes qui coulaient de ses yeux derrière ses lunettes de soleil.
J'avais envi de pleurer, mais je ne l'ai pas fait. Elle ne l'aurait pas voulu.
Elle aimait quand les gens étaient heureux.

J'ai pensé que j'allais m'en remettre, qu'avec le temps je pourrais avancer. Mais non. Je ne peux pas, je n'y arrive pas. Malgré le fait que j'ai repris le travail, malgré le fait que mes proches font tout pour que j'aille de l'avant, je n'y parvient pas.
Elle était l'amour de ma vie, comment l'oublier .
Comment oublier son sourire, comment oublier sa voix, comment oublier le fait que je l'ai perdu.
J'ai pourtant essayé d'aller de l'avant. Je ne peux pas, trois mois qu'elle n'est plus et je ne peux pas me relever.

  Ce matin , je vais voir ma mère. Je ne l'ai pas vu depuis l'accident. Je ne la vois que très rarement.
Elle sait que tout cela m'a détruit.
Tout le monde le sait d'ailleurs.

  Au lycée dans lequel j'enseigne, le bruit s'est vite répandu :
"Il paraît que le prof d'anglais à perdu sa meuf", disent les élèves.
Ils le disent dans mon dos, pensant que je n'entends pas. Pourtant, je les entends, et chacun de leur mot me détruit un peu plus chaque jour.
Aller au travail est devenu un vrai calvaire.
Entre les élèves qui se racontent tout un tas de rumeurs à mon sujet et mes collègues qui, soudainement, me font part d'une étrange bonté.
Avant, plus de deux tiers d'entre eux ne m'adressaient même pas la parole.
Ils ont pitié de moi.
Je ne veux pas de leur pitié, je ne veux de la pitié de personne.

Je monte dans ma voiture et je me mets en route vers chez mes parents.
Ils habitent dans un petit appartement dans la banlieue de Paris.
Leur appartement est à l'image de ma mère: tout est parfaitement ordonné. Il n'y a pas une chose qui dépasse.
Je dois avouer que ma mère est vraiment maniaque.
Aujourd'hui, mon père travaille, il n'est donc pas là.

Lors du trajet , je ne mets pas de musique. Je me concentre sur le bruit du moteur de ma vieille Audi.
J'ai vécu tellement de choses avec Hope dans cette voiture...
J'arrive avant que la tristesse ne me submerge.

Je frappe à la porte et entre, c'est sans surprises que je découvre un appartement certes petit mais extrêmement bien rangé.

- Charlie !

Ma mère me prend dans ses bras mais je la repousse au bout de quelques secondes. Je sais qu'elle est inquiète pour moi, mais c'est comme pour les autres: je n'ai pas besoin de sa pitié.

- Assieds-toi.

J'écoute donc ce qu'elle me dit et m'assois sur le canapé noir qui se trouve dans le salon.
Ma mère, elle, s'assoit dans le fauteuil face à moi.

- Charlie... Je sais que... Tu as été affecté par les derniers événements...
Me dit-elle d'une voix hésitante .
- Maman...
- Tu sais, ton oncle habite à la campagne et... Ton père et moi pensons que tu devrais partir habiter là-bas pendant un certain temps. Histoire de prendre du recul.

Je reste bouche bée face à cette annonce.
Mes parents veulent que je parte vivre chez mon oncle, à la campagne ?
Je lui réponds :

- Mais maman, vous avez pensé à mon travail ?
C'est tout ce que j'ai trouvé à lui dire.
- Eh bien... Pour tout te dire nous y avons pensé et... Le lycée t'autorise à prendre une pause jusqu'à la fin de cette année scolaire, pour reprendre sur de bonnes bases l'année prochaine .

Donc je résume : ma mère m'annonce que je vais devoir emménager à la campagne et qu'en plus elle et mon père ont déjà annoncé au lycée que je ne reprendrais mes fonctions que l'année prochaine .
Ils ne me laissent pas vraiment le choix en fait !
Face à cette annonce je ne trouve qu'une chose à dire :

- ok.

Je n'étais pas très convaincu lorsque j'ai dis ça . Mais j'ai vu le sourire et le soulagement sur le visage de ma mère. Je ne suis tout de même pas persuadé que le fait de m'éloigner de la ville me permettra de prendre du recul par rapport à la situation...
Mais bon , qui sait !

- Génial ! Je suis fière de toi mon fils. Tu y emménageras la semaine prochaine. Et ... saches que ton père et moi te soutenons dans l'épreuve que tu vis et... sa voix est étouffée par un sanglot, elle triture une mèche de cheveux qui s'est échappée de son chignon. Nous apprécions vraiment Hope.

Je ne lui réponds pas mais le silence vaut mieux que tous les mots que nous pourrions échanger. Je lui suis reconnaissant pour tout ce qu'elle fait pour moi.
C'est donc décidé, la semaine prochaine je partirais chez mon oncle, à la campagne.
Je sais que Hope serait fière de moi, fière du fait que j'essaye de me relever. Même si cela signifie de faire une croix sur ma vie normale pendant presque une année .
Hope...

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⏰ Last updated: Nov 06, 2017 ⏰

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