Chapitre 1: Complice de magouille

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Je ne m'habille pas de manière spéciale quand je vais faire les transactions, je ne vois pas à quoi ça sert en vérité. J'ai mît un jean et un débardeur avec ma veste en cuir. Aujourd'hui on m'a donné rendez-vous au Casino de Fremont Street, je m'installe à une table au fond et commande un cocktail. Les gens jouent en riant, quelques prostituées vulgaires et mal habillées, des habitués qui descendent les shoots en dépensant leur salaire à la machine à sous. Je regarde cet univers comme coupé du temps et je sourit. Ils sont vraiment ridicules. Je fait tourner ma paille dans mon verre jusqu'à qu'un homme vêtu d'un costard s'assoit en face de moi.
—Vous avez ce que j'ai demandé.
Je le regarde et lui tend un paquet de cigarettes, un camouflage ingénieux pour la cocaïne. Il le regarde puis le fait glisser vers lui avant de faire glisser une enveloppe blanche vers moi que j'attrape avec un large sourire.
—Très agréable les affaires comme toujours avec vous monsieur Jake.
Il me lance un regard puis se lève et sort, je n'ai strictement aucune envie de partir alors je croise les jambes et sirote mon cocktail. Las Vegas c'est en quelque sorte le lieu du vice et du pêché si je veux me la jouer biblique. Alcool, drogue, prostituées, argent... Je continue à réfléchir quand j'aperçois un homme de dos en manteau de fourrure blanc, drôle d'accoutrement bien que le manteau soit très beau. Il est assez grand, 25 ans, des cheveux châtains clair coupés à la Macklemore. Il se retourne et je vois ses yeux bleus gris glaciaux, il a un visage fin mais masculin. Il traine, les mains dans les poches de son manteau. Je continue à le regarder un moment en pensant qu'il est plutôt mignon, voire beau gosse. Je me lève pour partir quand soudain le mec en question lève un revolver vers le barman et tout le monde crie. Sauf moi. J'ai l'habitude des armes à feu, j'en ai manipulé plus d'une. Il me voit calme et Il me sourit avant d'empocher l'argent donné par le barman et de s'enfuir. Mon coeur bat très vite, pourquoi ? Je ne sais pas, je ne sais plus, je n'ai jamais su. C'est cette poussée d'adrénaline qui vient avec les emmerdes, et vu mon rythme cardiaque c'est vraiment des grosses emmerdes. Je ne peux pas m'en empêcher, je cours vers la sortie, les gens se sont agglutinés autour de la porte, je saute par dessus le bar et j'ouvre la porte avant qu'elle devienne inaccessible. Le type est en train de monter dans une Audi A-5 noire. Je cours vers lui et Il se retourne. Je m'arrête devant lui et le regarde dans les yeux.
—Tu vas où là ?
Il me regarde.
—Ca te regardes ?
—Pour le moment c'est toi qui me regardes alors emmènes moi, de toute manière j'ai un téléphone avec le numéro de la police, alors c'est ça ou tu me butes.
Il rit et il me fait signe de monter. J'ouvre la portière et à peine je me suis assise que déjà il démarre en trombe. Je m'accroche au siège quand on prend le périphérique. Je le regarde, Il sourit légèrement.
—Tu es montée dans ma voiture alors je veux savoir qui tu es, avec des détails s'il-te-plaît.
—Je m'appelle Alyss Stormtown, j'ai 22 ans et pour les détails je magouille comme je peux tu vois.
—Comme nous tous dans ce putain de pays. T'es d'où ?
—Washington.
—Comme moi, moi c'est Davis Hill, 26 ans, et comme toi je magouille.
Je m'allonge à demi sur mon siège.
—Et on va où là ?
—San Francisco, j'en ai marre de l'air de Las Vegas, j'ai envie de changer d'air.
Je rit parce que moi aussi mais que je ne pensais pas que je monterais dans la voiture d'un inconnu.
—J'aime bien ton manteau.
Il me regarde et comme le périphérique est droit Il l'enlève et le pose sur mes épaules. Il est en débardeur masculin noir en dessous. Son manteau est extrêmement doux et chaud, je m'enroule dedans et je m'endors en regardant les lumières de la ville dans la nuit.
Je me réveille à cause d'une légère pression sur mon bras. J'ouvre les yeux et Davis sourit.
—On est arrivé missy.
Je regarde par la vitre et je vois San Francisco et ses immeubles qui s'éveille au petit jour. J'ouvre la portière et je sort. Le parking est plein de voitures. Davis se met derrière moi et chuchote.
—Ce n'est pas qu'il ne te va pas mais j'aimerai bien le récupérer missy...
Il l'enlève de mes épaules et l'enfile avec élégance. Le bruit de la ville est tellement présent, le soleil qui se lève derrière les immeubles. Charmant spectacle. Un vendeur de babioles nous accoste dans la rue, Davis l'ignore mais je lui achète un truc à bulle. Il me dévisage et je dévisse le bouchon.
—Voyons si je n'ai pas perdu la main.
Je souffle dans le petit rond, doucement et une énorme bulle apparaît puis s'envole dans le ciel. Je recommence et des dizaines de petites bulles aux reflets colorés viennent se coller au manteau de Davis qui les accueille les bras grand ouverts. Je rit et lui aussi, si on me demandais je ne sais pas si je dirais que je fais des bulles avec un inconnu malfrat vêtu d'un manteau de fourrure blanche beau gosse. Pour le moment je subit.
—On braque une banque, ou on dépense le petit pactole que j'ai chopé tout à l'heure ?
—Soyons sages, deuxième option.
Il sourit et me tend le bras comme pour descendre l'autel. Je le prend et on a l'air un peu ridicules comme deux amis qui vont boire des coups au bar et ça me fait éclater de rire. Nous continuons à marcher jusqu'à une bijouterie chère où une vendeuse en tailleur bleu nous demande ce qu'elle peut faire pour nous.
—On aimerait des bagues de fiançailles suffisamment larges pour être gravés.
Elle ouvre une vitrine et sort un couple de bagues dans un écrins. Elles sont en or rose toutes simples. J'essaye la mienne, elle me va. Il essaye la sienne, elle lui va.
—On va graver "search the white coat".
Je le dévisage.
—Quoi ? Mais pourquoi ?
—Le délire ! Le lapin blanc tu vois... Mon manteau... Alice au pays des merveilles... Tu suis ?
Je rit doucement.
—Carrément mais t'es parti trop loin. On s'en fout de toute façon on va pas se marier.
La vendeuse soupire l'air de dire "encore des junkies". Une quinzaine de minutes plus tard que l'on a passées à regarder les prix exorbitants en pouffant de rire La vendeuse ramène les bagues gravés. Davis paye et on sort toujours accrochés l'un à l'autre comme deux complices de picole. Il sort l'écrin et se met à genoux devant le McDonald's en face.
—Alyss Stormtown, que je connais depuis hier, veux-tu être ma complice de magouille, ne jamais t'enfuir seule, et toujours me filer les bons tuyaux ?
—Oui je le veux !
Il tourne ensuite l'écrin vers lui même.
—Davis Hill, que je connais depuis toujours, veux-tu prendre cette jeune femme pour complice de magouille, ne jamais lui mater les fesses ou le décolleté, ne jamais râler quand elle a faim, et toujours goûter les drogues pour elle ? Oui je le veux. Je vous déclare ainsi liés par les liens de la magouille. Vous pouvez faire un baise-main à la magouilleuse.
Il me fait un baise main et me met la bague avant de mettre la sienne et de la regarder.
—8000$ ces trucs.
Je regarde la mienne.
—Abusé.
Il me sourit.
—Allez vient beauté je te paye un maxi burger et après je te met en cloque.
—Quelle galanterie.
—Je sais.
Nous rentrons dans le McDo et nous empiffrons d'un menu maxi burger. On sort ensuite et Davis me regarde en faisant une tête de pervers.
—Maintenant je t'engrosse.
—Alors nan, j'ai déjà une tête de thon mais si tu m'engrosse je vais ressembler à un poisson truite.
Il rit et se met à courir.
—Oh ! Et si on faisait un truc con du genre se faire un tatouage et un piercing ?
—D'accord pour le piercing mais les tatouages c'est à vie...
—Moi je veux un piercing à l'oreille.
—Et moi me faire teindre les cheveux.
—Quelle couleur ?
—Violet mon gars
—Viol-ée ? Bref on y va alors.
Il existe un quartier de la ville où tu trouve ; perceurs, tatoueurs et coiffeurs bizarres à profusion. On remarque un salon qui fait les deux. Je m'installe dans un siège de coiffure et je me laisse faire tandis que Davis se fait percer l'oreille. Ça me paraîtrait long si Davis ne me faisait pas rires avec des blagues de cul toutes les 5 minutes. Il a un beau diamant à l'oreille gauche, ça lui fait un petit style pas désagréable. La coiffeuse finit de sécher mes cheveux, ils sont toujours châtains foncés sur le haut mais ils sont dégradés en violet en descendant. J'aime bien, vraiment.
—Pas mal Alyss.
—Pas mal Davis.
On se regarde en souriant et on paye avant de sortir tous les deux neufs. Le soir on entre dans une boîte de nuit qui diffuse de la bonne musique électro et on commence à danser et à boire. Je bois quelques bières mais Davis enchaîne shoot sur shoot, visiblement désireux de dépenser son argent en boissons spiritueuses. Il danse et moi aussi, Il se colle à des inconnues et une se colle en retour. Je le laisse faire en regardant, on me propose de la drogue ce que je refuse, mais le temps que je repousse le type chelou qui m'a proposé Davis a disparu. Je fend la foule au milieu des tremblements de la basse et des néons multicolores et aveuglants, des paillettes et des parfums bons marchés. J'entre dans les toilettes des mecs qui sont vides et j'aperçois le manteau blanc posé sur le haut d'une porte derrière laquelle j'entend bruits de plaisir intense. Je comprend, Davis, la meuf de tout à l'heure. Je chope le manteau et je sort en le mettant sur mes épaules. La musique est toujours aussi forte, je détache mes cheveux et commence à danser. Les lumières tamisées, les projecteurs qui font tourner la tête. Un mec mignon m'aborde et me demande si ça lui dit qu'on sorte. Je le repousse et continue à danser dans le manteau blanc de Davis. Je ferme les yeux seulement entraînée par le rythme de la basse électro. Je bois quelques shoots, puis encore d'autres. Je ne les compte plus. Je me rend compte que je suis à deux doigts d'avoir la tête qui tourne et que je ferais mieux d'arrêter de boire. Je paye mes consommations et je sors. L'air dehors et vraiment frais. Je resserre le manteau trop grand autour de mes épaules et je m'assois contre la devanture d'un magasin fermé en face de la boite de nuit. Je commence à pleurer.
—J'ai vraiment trop bu.
J'essaye d'essuyer mes larmes mais Il s'en rajoute toujours d'autres. Je continue alors à pleurer les yeux rivés au sol. La porte arrière de la boite s'ouvre violemment et Davis en sort visiblement inquiet. Je le regarde le visage noyé de larmes.
—Si tu cherche ton manteau Il est là.
Il s'approche et me prend dans ses bras.
—Idiote c'est toi que je cherche. Pourquoi tu pleure ?
—J'ai l'alcool triste c'est tout.
—Alors pourquoi tu me serre aussi fort ?
—L'alcool triste je te dis.
Je le serre c'est vrai, c'est vraiment le lapin blanc, Il n'arrête pas de disparaître.

The White Coat StoryWhere stories live. Discover now