L'Épreuve Ancestrale

Prologue - Conflit

Elle attrape des vêtements qu'elle jette pèle-mêle dans son sac, tandis qu'elle traverse sa chambre presque en courant. Elle doit faire vite. Qu'est-ce qui pourrait lui être utile ? La trousse à maquillage ? Ses vêtements de rechange ? Ses dagues ?

Elle s'arrête soudain en pleine réflexion. Et si ses parents refusaient ? Éléana se mordille la lèvre. Puis elle inspire un grand coup, se compose une façade calme. Sa décision est prise. Elle expire doucement, et finit tranquillement de préparer ses affaires malgré sa fébrilité. Elle prend les papiers prouvant sa majorité, son grimoire, une tenue de sport, une robe de soirée...

Elle ne sait pas à quoi s'attendre, mais une chose est sûre : elle doit parer à toute éventualité.

Elle laisse son sac dans sa chambre, puis s'engage à pas de loups dans l'escalier, non sans avoir jeté un coup d'œil furtif. Voyant que la voie est libre, elle rentre aussi discrètement que possible dans la cuisine déserte, et fouille dans les placards. Elle attrape sans bruit des boîtes de conserve au hasard, avant de prendre le chemin inverse vers sa chambre. Elle sent une des boîtes glisser et la retient avec son petit doigt. Dans un équilibre précaire, elle parvient enfin à destination, et fourre le tout dans son sac avec un soupir de soulagement.

Une fois ceci fait, elle se redresse, une lueur de pure détermination dans le regard. Cela fait depuis si longtemps qu'elle se prépare à ça, elle ne laissera rien se dresser sur son chemin. Elle descend encore une fois les escaliers, son sac bien au chaud à l'étage. Quoi qu'il arrive, elle remontera de toute façon.
Prête à confronter ses parents, elle entre dans le salon. Ceux-ci sont installés dans le canapé, regardant le cristalovision diffusant les informations. À leur vision, son cœur se serre, et l'hésitation s'empare d'Éléana. Elle a enfin l'occasion de sa vie, la chance de prouver sa valeur aux yeux du pays entier. Ses parents ne pouvaient que l'encourager non ? Elle expire doucement.

- Maman ? Papa ?

Les interpellés lèvent la tête vers elle, la regardant avec une légère surprise.

- Oui ma chérie ?

Le doux sourire de sa mère la rassure et la pousse à se lancer.

- Je voulais vous annoncer que je compte participer à l'Épreuve Ancestrale !

Le silence tombe, lourd, dérangeant, seulement rompu par les informations qui continuent de défiler.

« La Reine Katrina a annoncé ce matin dans un communiqué... »

- Pardon ?

La voix de son père manque de la faire sursauter, sévère, déclenchant des frissons dans le dos d'Éléana. Le fixant droit dans les yeux, elle répète posément, le visage lisse de toute expression : « Je compte participer à l'Épreuve Ancestra-

- C'est absolument hors de question ! »

Ses parents se lèvent. Sa mère semble trembler de colère.

- Je ne te laisserais pas participer à ça ! C'est beaucoup trop dangereux !

- Je m'en fiche bien ! J'ai l'occasion de vous faire honneur, je ne vais pas m'en priver ! Vous me dites tout le temps de porter fièrement la bannière de la maison ! C'est le moment rêvé !

- Mais personne n'en revient vivant ! Je refuse de t'envoyer à l'abattoir ! C'est non !

La voix de sa mère monte dans les aigus, faisant tiquer Éléana. La jeune fille se tourne alors vers son paternel, espérant qu'il fasse quelque chose pour raisonner sa femme. Elle est confrontée à un visage fermé, à des yeux froids. Il la toise de toute sa hauteur, et elle l'affronte de toute sa détermination. Elle a hérité de son impassibilité, et il le sait. Il sait également qu'elle a aussi le tempérament de feu de sa mère, qui bout sous son masque. Cet échange de regard est comme un duel, le premier qui coupe le contact perdra, et aucun ne veut lâcher prise. Il se décide à parler d'une voix ferme.

- Ta mère a dit non.

Le message est plus que clair. Il ne la soutiendra pas. Éléana sent son corps s'échauffer et son sang bouillir de rage. Elle affiche cependant un visage tout aussi fermé que celui de son père. C'est donc d'une voix des plus calmes qu'elle répond :

- Bien père.

Elle se détourne apparemment tranquillement, et monte les escaliers. Une fois dans sa chambre, c'est l'effervescence. Elle n'a que quelques minutes tout au plus pour tout boucler. Elle cale une chaise contre sa porte, dans l'espoir minime de retenir ses parents. Attrapant son sac, Éléana le passe sur ses épaules. Elle se dépêche d'attraper les draps. Elle les noue ensemble. En attrape un autre. Le noue lui aussi. Jette sa corde improvisée par la fenêtre.

Elle lance un dernier coup d'œil à sa chambre. Elle sait qu'elle ne reviendra probablement jamais ici. Elle entend les premières marches des escaliers craquer. Elle se hâte, passe la fenêtre, et descend le mur de la maison en rappel le plus rapidement possible. À peine son pied a-t-il touché le sol, qu'elle s'élance, et court le plus vite possible et le plus loin possible de chez elle.

Prochaine étape.

Le bâtiment administratif de la cité.