Chapitre 18: Dimena

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Attendre la lumière.

Les rêves sont parfois le reflet de la réalité, prétendait-on.

Lorsqu'elle s'éveilla dans son rêve – une étrange sensation où tous les repères semblaient devenus invalides – elle ne sut au premier abord qu'elle rêvait. Une vaste forêt, berceau des premiers temps de ce monde, s'étendait devant elle, si vaste qu'elle aurait pu paraître effrayante dans son immensité. Peut-être était-ce le cas, si l'on s'enfonçait plus profondément dans ses entrailles les plus recluses mais là, à l'endroit même où se trouvait la jeune fille, rien n'apparaissait comme étant menaçant.

Les plus petites créatures de la forêt prenaient vie, tandis que les plus grosses dormaient à l'abri sous quelque grotte ou quelque sous-bois. Elles animaient la forêt avec une force presque miraculeuse pour de si petites bêtes, offrant un spectacle aussi charmant qu'extraordinaire. De petites lucioles volaient paresseusement tout autour de la jeune fille, projetant un faisceau lumineux suffisamment puissant pour donner l'impression que les arbres se mouvaient d'eux-mêmes, tout en suivant les lucioles dans leur valse enflammée.

Un simple effet d'optique, certes, mais l'une des plus belles choses que la nature était en mesure de créer à ses yeux. Elle-même se crut en train de brûler lorsque l'un de ces insectes vint se poser avec délicatesse sur son bras, intrigué par la présence de l'adolescente ou simplement épuisé de sa danse endiablée. Dimena laissa grimper le long de son bras la curieuse luciole, surprise de constater que la petite créature ne la craignait pas outre mesure, ne tentait guère de la fuir. La jeune fille était presque sûre qu'elle pouvait toucher l'intruse sans que celle-ci ne cherche à s'échapper. Mieux valait cependant ne pas prendre le risque, si jamais elle se trompait. La douce lumière qui s'échappait du petit corps était apaisante et pure, rassurante.

Une consœur, puis une deuxième et une troisième se joignirent à la première. Leur clarté en elle-même n'était pas aveuglante, mais dans cette forêt où tout paraissait étonnamment sombre, en dépit de la lune et des étoiles, elle avait trop de puissance. Dimena releva hâtivement le bras par réflexe, chassant toutes les lucioles de son corps, obligeant ces dernières à reprendre leur envol paresseux comme si rien ne s'était passé, nullement frustrées ou dérangées par le geste inattendu.

La jeune fille se rendit par la suite compte que cet endroit lui était aussi familier qu'étranger. Bien qu'elle n'y soit jamais allée, elle paraissait connaître en détail la moindre feuille qui se trouvait sur le sol de ces bois. Et pour cause : la forêt ressemblait bien trop étrangement à celle qu'elle se figurait lors des descriptions qu'elle lisait dans son livre favori, mais elle aurait parié que celle-ci n'existait pas en vrai. Ce n'était qu'une histoire après tout, et si elle pouvait certes posséder un fond de vérité, cela ne pouvait résider dans la description d'une simple forêt.

Je rêve, comprit-elle alors.

Dimena entreprit ensuite de découvrir ce dont recelait son subconscient, quand une voix l'interpella dans son dos, la stoppant dans son élan de découverte :

— Je suis contente que tu aies décidé de me rejoindre, fit la voix.

La benjamine Castelbois se retourna pour faire face à sa sœur, qui la regardait avec un sourire aux lèvres. Rares étaient les fois où Assylana souriait ; aussi lorsqu'elle le faisait, cela paraissait aussi déroutant que plaisant. Dimena remarqua que son aînée était vêtue avec ce qui semblait être du cuir bouilli – avec le peu de luminosité, c'était difficile à déterminer –, des bottes épaisses et son arc de chasse habituel. Elle avait même relevé ses cheveux pour ne pas qu'ils lui tombent sur ses yeux et lui altèrent la vue.

Prisonnière des bois [SDA] - TerminéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant