Chapitre 24

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Je réalise seulement le lendemain matin que j'étais moi aussi fatigué car je n'ai pas vu la nuit passer, contre toute attente. Calixte dort encore, pelotonnée le plus possible en bordure du lit. Pour notre seule et unique nuit déjà passée ensemble, l'alcool l'avait poussée à finir blottie contre moi ; à jeun, c'est totalement différent et cela me déçoit. La lumière du soleil perce à travers les rideaux, et après avoir profité un bon quart d'heure de cette clarté qui tombe à point pour l'observer dormir, penché au-dessus d'elle, je me lève en essayant d'être le plus discret possible. Je renfile mes habits abandonnés par terre et me dirige à pas de loup vers son petit bureau de collégienne, dont le mur juste devant est couvert de photos-souvenirs.

Il n'y a que des têtes que je ne connais pas, à part ses parents et sa sœur, que j'identifie facilement. Et sur de nombreux clichés, un visage m'intrigue. Un jeune garçon qui ressemble traits pour traits à Calixte. Aurait-elle un petit frère ? Elle n'en a jamais fait mention, et sa famille non plus, du peu que je l'ai vue. Ou un cousin proche ? Mystère. En tout cas, Calixte ne figure sur aucun cliché et je ne peux m'empêcher de me réjouir de ne trouver aucune photo d'elle avec un ex-amoureux.

Je pivote puis me déplace jusqu'à m'approcher à nouveau du lit du côté de Calixte et ne résiste pas à m'installer en face de son visage, accroupi. Je soulève la main et alors que je m'apprête à lui caresser les cheveux, sa mère gratte discrètement - du moins doit-elle le croire - à la porte.

— Les amoureux ? C'est l'heure de se lever... On ne serait pas contre un petit coup de main, chuchote-t-elle à travers la porte.

Calixte s'éveille et s'étire. Lorsqu'elle ouvre les yeux, elle sursaute, surprise de me trouver si près d'elle.

— Hélio ! Tu m'as fait peur !

— Pardon, c'était pas le but. Ta mère a besoin de nous, il est déjà plus de neuf heures, je ne savais pas si tu l'avais entendue nous appeler.

Elle croise ses avant-bras par dessus ses yeux et me demande d'ouvrir les rideaux. Je m'exécute en me retournant simplement, sans bouger de place.

— Si, si je l'ai entendue... J'ai surtout entendu comment elle nous avait appelés.

Mes lèvres s'étirent.

— Alors debout, mon amoureuse !

Elle secoue la tête en souriant, le regard à l'abri derrière ses bras.

— Laisse-moi juste émerger et j'arrive. Ça t'ennuie de descendre le temps que je me change ?

— Non, pas de souci.

Je me relève et dépose un baiser sur son crâne. Arrivé à la porte, je me retourne et l'observe. Elle ne bouge pas d'un centimètre.

— Tu vas te rendormir Calixte, tes parents nous attendent.

— Arrête Hélio, on dirait ma mère... J'arrive, promis. Je serai en bas avant d'avoir eu le temps de te manquer.

Ces petites piques m'envoient systématiquement des étoiles dans les yeux et me font entrapercevoir des bribes de bonheur. Et effectivement, quelques minutes seulement après l'avoir laissée, Calixte arrive dans la cuisine dans une tenue décontractée que j'ai assez peu souvent vue sur elle. Mes yeux sont irrémédiablement attirés vers ses formes féminines, mais je me détourne rapidement de peur que sa famille s'en rende compte. Elle se dirige droit sur moi et pose ses lèvres sur les miennes comme si ce simple baiser était naturel. Je me fige, tellement déçu que ce contact ne s'éternise pas. Elle joue son rôle à fond devant ses parents, et je me dis que si je ne devais me contenter que de ces miettes, je voudrais ne jamais quitter son cocon familial pour que cela ne s'arrête pas. Elle poursuit ensuite son tour de table pour saluer ses parents et sa sœur. Je suis incapable de percevoir ne serait-ce qu'un simple mot de leur conversation, car Calixte s'est ensuite assise directement sur mes genoux, comme si elle en avait l'habitude, et je suis en apnée, haut perché au paradis.

Je reviens à la réalité lorsque je sens sa main frotter ma cuisse avec insistance.

— Hein Hélio ? Tu ne réponds pas, ça te dérange pas d'aider mon père à installer les tables sous la tonnelle et dans le jardin, puis les chaises, pendant qu'on mettra le couvert et la déco ?

— Ah... Euh... Oui, oui bien sûr avec plaisir. On attaque quand ?

Son père me répond ironiquement :

— Dès que tu auras avalé un grand café serré, parce que visiblement t'es pas bien réveillé mon garçon !

Calixte vole à mon secours, percevant mon embarras, et peut-être aussi un peu plus que ça, vu où son postérieur est installé...

— Papa, arrête, laisse Hélio tranquille, il plane toujours un peu le matin. On déjeune en vitesse et on s'y met tous, ça vous va ?

— Parfait, répond sa mère.

Les installations nous occupent toute la matinée, et, le temps que l'on se prépare, les premiers invités arrivent déjà. Chacun a sorti sa plus belle toilette, et complimente les parents de Calixte pour la disposition des festivités dans le jardin, avec pour toile de fond l'océan à perte de vue. Les voix montent jusqu'à la chambre dont la porte-fenêtre n'est pas totalement fermée et j'observe ce petit monde à peine dissimulé en bordure du rideau, abrité des regards par le balcon. Calixte est encore à la salle de bains, et je l'attends patiemment.

Lorsque la porte de la chambre s'ouvre sur elle, mon cœur rate un battement. Elle porte une robe blanche à gros pois noirs que je ne lui ai jamais vue et maintient ses cheveux des deux mains. Arrivée à ma hauteur, elle me tourne le dos.

— Tu peux ?

— Tu veux ma mort...

J'attrape la fermeture éclair qui attend au bas de ses reins et la remonte lentement, savourant chaque instant de cette montée qui me met au supplice.

— Je sens que la journée va être longue Calixte, si tu joues avec moi comme ça...

Elle se retourne et je vois au rose apparu sur ses joues qu'elle a remarqué la bosse qui déforme mon pantalon. Je ne souris pas, réellement troublé par mes sentiments pour elle toujours plus forts. Notre situation offerte par ce week-end me plait au plus haut point, mais je sens qu'il faut que je me préserve pour ne pas oublier que tout cela n'est que pure comédie.

CalixteWhere stories live. Discover now