Prologue

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Dans une ville plutôt active, bondée de monde, les gens piétinaient et se marchaient presque dessus. Un brouhaha incessant à en avoir des maux de tête envahissait les rues et les quartiers. Voici ce à quoi ressemblait Crocus en cette fin de mois d'août. Un véritable bazar sans nom, où foule et bruit s'emmêlaient sans aucune harmonie quelconque. On y voyait de tout : des hommes d'affaire autant jeunes que vieux, tenant d'une main leur mallette de l'autre leur portable, marchant avec empressement; des enfants qui profitaient des derniers jours de vacances pour aller jouer avec leurs camarades, courant entre les passants, les bousculant parfois sans faire attention; des jeunes couples qui se promenaient tout en discutant de leur avenir, pensant à leur vie future en tant que parents. Parmi cet amas de personnes, se faufilait une jeune femme dont la chevelure châtaigne balançait dans les airs, volant au fil de ses mouvements. Son regard verdoyant se voyait à peine, masqué par l'ombre de son couvre-chef. Elle se faisait aussi petite qu'une fourmi, se frayant, tant bien que mal, un passage dans la foule pour tenter de rejoindre l'endroit souhaité. De sa main gauche, elle se guidait d'elle-même dans ce zouk sans nom. Tandis que son second membre tenait une oreillette par laquelle, elle communiquait avec sa coéquipière.

« Hana, tu me reçois ?

-A la perfection, Lis. Assura la jeune femme.

-Bien. Tu as bien compris où tu devais aller ?

-Oui, je sais... En haut de l'immeuble à l'Est de la ville, dans le quartier des affaires, en face d'OrlandoTechnology. Déclara-t-elle.

-Et n'oublies pas : tu rejoins la planque, ne vas pas sur le toit, sinon tu seras repérée. Ajouta sa camarade.

-Reçu cinq sur cinq. »

Détachant sa main de son oreille, elle coupa la rue en tournant dans un chemin étroit entre deux bâtiments, prenant une courte ruelle. Elle en profita pour se munir de ses lunettes de soleil et d'une arme qu'elle rangea à sa ceinture. Elle détestait la foule et le bruit qui régnait dans les rues. Elle se sentait toujours épiée et prisonnière lorsqu'elle s'y trouvait. Pour elle, il n'y avait rien de pire que d'être plongée dans un amas de personnes, duquel émanait un brouhaha atroce et douloureux. Soupirant, elle quitta l'allée dans laquelle elle s'était enfuie, retournant parmi les passants afin de rejoindre son poste.

En cours de route, elle sortit une photo de sa poche, la fixant tout en marchant. Elle la gardait à l'abri des regards, car elle savait qu'il était risqué pour elle que quelqu'un la voit et sache de qui il s'agissait. Sur ce cliché, se dessinaient les courbes d'un visage masculin, doux et rassurant; une chevelure d'un noir profond que quiconque pourrait reconnaître ici; des iris d'un rouge qui ne pouvait qu'hypnotiser. Et dire qu'il était sa prochaine victime, la prochaine personne qu'elle allait assassiner de son arme d'élite. Son nom... Elle s'en rappelait encore, pourtant, il était rare qu'elle se souvienne du nom de ses victimes. A vrai dire, pour elle, il était inutile de retenir comment ils se nommaient, car de toutes manières ils allaient mourir. Mais lui... Elle ne savait pas le pourquoi du comment, toutefois il restait encré dans un coin de son esprit. Rogue... Rogue Cheney, n'est-ce pas ? Fils d'un homme mondialement connu pour son entreprise internationale qui faisait pas mal d'affaires ces temps-ci, diplômé généreusement comme il se devait, jeune homme admiré et pas mal demandé. Il avait tout pour être envié, tout pour être en haut du podium. Cependant, à cause des trafics cachés de son père, elle devait mettre fin à ses jours. Néanmoins, il était étonnant pour elle d'être aussi réticente à tuer quelqu'un. C'était son métier et malgré ça, elle n'avait pas envie d'ôter la vie à une personne qui n'avait encore rien commis de mal. Bien sûr, elle ne mentirait jamais en disant qu'elle avait désobéit chaque fois qu'elle avait refusé de tuer un innocent. Car, effectivement, elle exécutait les ordres de son supérieur qu'elle le veuille ou non. Elle avait toujours agi que ce soit contre sa volonté ou non.

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Atteignant le bâtiment indiqué par son amie, elle y entra et gravit les escaliers jusqu'au bon étage en silence. D'un pas sûr et rapide, elle pénétra dans un appartement vide et plongé dans les ténèbres. Elle s'installa près d'une fenêtre, ouvrant légèrement les stores de celle-ci tout en déballant son matériel d'assassinat. Elle s'arma de son fusil favori, celui dont elle se servait à chaque mission, fixant le viseur sur l'arme en réglant à bonne distance. Puis elle le posa sur son trépied avant de se relever pour se détendre un peu, en gardant un œil sur l'heure qui tournait.

A seulement dix minutes de l'assassinat, elle se redressa pour fermer la porte de l'appartement à clé, s'assurant d'être tranquille pour ne pas faillir à sa mission. Puis retournant à son poste, elle jeta un coup d'œil à l'heure affichée sur son portable. Elle soupira en voyant que le temps passait et que bientôt : elle le tuerait d'une balle. Elle allait abattre un jeune homme innocent, simplement parce que son père lui traçait un chemin parsemé d'embûches et d'erreurs incorrigibles. Elle reporta son regard dans le viseur, attendant le moment fatidique : l'instant où elle devrait le tuer. Elle agrippa son index à la gâchette, se détendant pour ne pas bouger. Elle chercha sa victime dans le calme, l'air impassible. Mais quelle fut l'expression étonnée qui orna les courbes de son visage, lorsqu'elle vit ce sourire si sage. Il n'avait rien qui puisse lui être reproché. Mise à part son sourire et sa beauté qu'on ne voyait nulle part ailleurs. Il ne semblait pas capable de suivre les traces de son père. Alors... Où était donc l'utilité de l'assassiner ? Où était l'intérêt de tuer un innocent si loin du mal ? Il parlait et riait comme quelqu'un de normal. Dans son regard, ne vacillait pas le moins du monde une flamme criminelle.

Tentant de reprendre ses esprits, elle inspira longuement et expira tout aussi longuement avant de se concentrer de nouveau. Elle braqua une seconde fois son viseur sur son sourire, luttant pour ne pas se laisser avoir par ses sentiments regrettables, appuyant lentement sur la gâchette. Soudain, un bruit vif et sourd retentit dans le quartier : elle avait tiré.

A murderer loveWhere stories live. Discover now