Angel {CLC-2Seung}

Angel

Tu est un ange, Chang Seungyeon.

Un cadeau des dieux,  qui t'ont sculptée, façonnée à leur image.

Tout chez toi est si parfait, si immaculé.

Je te déteste tellement.

Je me souviens de la première fois que je t'ai rencontrée, il y a quatre ans. Tu m'as souris, ce sourire si chaleureux et honnête, qui me hante encore aujourd'hui. Tu m'as dit que tu était heureuse de former un groupe avec moi, tu m'as serrée dans tes bras, tu sentait bon.

Tu était tellement belle, déjà à cette époque, avec tes longs cheveux couleur chocolats que tu aimait attacher, soulignant la forme parfaitement arrondie de ton visage. Tes grands yeux sombres qui n'ont jamais cessés de pétiller, et qui se ferment presque entièrement quand tu rit. Ta petite bouche en cœur, dont la forme et la couleur m'ont toujours été une étrange obsession.  Ta voix, plus profonde que l'on pourrait le penser, qui m'as fait toute bizarre la première fois.

Nous avons débuté en tant que CLC quelques mois plus tard, toi, moi, les trois autres filles qui ne se sont jamais aperçues de la façon dont je te regardais. J'ai endossé mon rôle de leader avec un goût amer dans la bouche. J'était la plus âgée d'entre-nous, je devais montrer l'exemple, nous guider afin de rencontrer les exigences et les espérances de tous. J'avait tellement de questionnements, d'inquiétudes et de peurs, j'avait l'impression que notre succès reposait sur mes épaules seules. Pas toi. Tu était sereine, lumineuse, tu me rassurait. D'un seul regard, tu était le vent du nord qui repoussait la tempête.

Je te déteste.

Tu as commencé à te rapprocher de moi, à t'asseoir à mes côtés lors des repas, rester avec moi jusqu'à tard dans la nuit pour perfectionner nos chorégraphies. Tu m'empruntais parfois mes fringues, mes chaussures, mon maquillage. Ils te faisaient mieux qu'à moi. Tu me proposait d'essayer les tiens en échanges, mais l'idée de porter les vêtements qui portaient ton odeur me donnait envie de vomir. 

La façon dont tu m'appellait "unnie" était tellement différente de quand tu t'adressait à Yujin, ou à notre staff. Sorn m'as un jour dit qu'elle était heureuse que toi et moi nous soyons si proche. Elle est si naïve.

Après trois albums, nous n'étions encore inconnue, pas de prix, pas de reconnaissance. Notre agence n'as rien dit mais je savait déjà qu'on était un échec. Ce sentiment, c'était comme un monstre qui me déchirait de l'intérieur, qui s'agrippait à mes entrailles et qui les tordait, les lacérait, les écrasait. Et pourtant, tu continuait de porter ce sourire qui t'allait si bien. Tu continuait à parler de rêves et de succès. Tes ailes d'anges sont restés si blanches.

L'agence  à ajouté deux nouvelles à notre groupe. J'ai craqué. J'était une leader horrible, incapable de représenter l'espoir et la détermination dont nous avions cruellement besoin. Incapable d'être une guide, une amie, encore moins une grande sœur pour toi et les autres.

Évidement, tu t'es proposée pour prendre ma place. Tu m'as dit de ne pas m'en faire, que j'avait remplis mon rôle à merveille et que je méritait maintenant de me reposer. Menteuse. Les filles étaient heureuses pour toi, l'agence approuvait, tu était rayonnante. Vous saviez tous que tu serais meilleure que moi dans tout ce que tu entreprendrais. Je me suis retirée dans ton ombre, en silence. Tu voulais aider, c'est ça? Je n'était pas brisée avant que tu essaie de me soigner.

Je te déteste.

Un soir, je t'ai surprise à pleurer, seule. Tu m'as dit que tu te sentait faible, que tu avait peur de ne pas être à la hauteur. Menteuse. Tu m'as dit que tu n'arrivait pas à être la leader que j'avait été. Menteuse. Tu m'as dit que tu avait besoin de moi. Putin de menteuse. Tu m'as prise dans tes bras, je t'ai rassurée. Je t'ai promis que je serais toujours là. Tu sentait tellement bon.

Je te déteste tellement.

Après sept albums, toujours rien. Nous sommes la honte de la compagnie, le groupe qui fut oublié de tous à l'instant même ou nous avons débuté. Les autres filles ont commencé à le comprendre aussi. Ça m'as fait mal de savoir qu'elles l'avaient réalisé. Mais pourtant, toi, tu n'as jamais changé. Tu as continué à faire tes traditionnelles blagues, à soulever chacune de nos insignifiantes réalisations, à nous soutenir toutes.

La semaine dernière, tu m'as tenue la main dans le bus. Je t'ai regardée, tu m'as souris. Je t'ai rendue ton sourire, malgré moi. C'est alors que tu m'as remerciée. Je t'ai regardée, incrédule, tu m'as remerciée de nouveau, les larmes aux yeux.

Je t'aimes tellement, unnie.

Ta voix est tellement belle.

Je sais que c'est difficile pour toi aussi, mais je serais toujours là.

Tais-toi.

Sans toi, je n'aurais jamais pu survivre à tout ça.

Menteuse, tais-toi.

Alors, promet-moi de ne pas abandonner, d'accord?

Une larme a coulé sur ma joue, j'avait envie de te frapper.

Nous avons pleuré ensemble, je suis morte à l'intérieur.

Je n'abandonnerai pas. Parce que je suis tellement obsédée par toi. Par ta perfection. Parce que je déteste tellement cette perfection. Parce que tu représente ce que je voudrais être, ce que je ne pourrais jamais être. Parce que même si je te déteste si intensément, même si je n'ai envie que de te voir souffrir, faire disparaître ton stupide sourire et tes yeux rêveurs, tu est la seule personne qui me fait sentir réellement vivante.

Je te déteste tellement, Seungyeon, tellement.

Si seulement tu n'était pas si parfaite.