Chapitre 8

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Chapitre 8

***

Malheureusement, elle n'avait pas réussi à noyer la traîtresse avant que Vanà s'en mêle.

C'était tout de même incroyable ! Elle était toujours là pour l'empêcher d'exécuter les personnes qui lui avaient fait du tort. Toujours. D'abord Dagnir et maintenant Lailaith ? Elle les collectionnait ou quoi ? Qui serait le prochain ? Shiro Ors ? Ses parents adoptifs ?

Mais qu'est-ce qu'elle leur trouve ? se demanda-t-elle avec mauvaise humeur tout en se hissant sur l'échelle qu'un des marins avait déroulé le long du navire.

Si Adaeze avait pu remonter sans aide, ce ne fut pas le cas d'une Lailaith frissonnante et toussante.

Vanà avait peut-être arrêté sa main, mais elle avait tout de même presque réussi son coup.

Elle devrait sans doute compatir avec la forme tremblotante qu'un soldat portait jusqu'à la cabine du capitaine (après tout, elle aussi avait bien failli mourir noyée), elle ne parvenait cependant pas à trouver en elle la moindre étincelle de pitié. Lailaith l'avait vu venir, avec ses questions et sa suspicion et ses jugements mal informés.

Lailaith avait su qu'en la poussant à bout il y aurait des conséquences. Et parler de Bëor et Vaïré dépassait les bornes.

La Bannie ne lui parlait pas de sa propre relation défectueuse avec son père et sa belle-mère, à ce qu'elle sache, si ? Alors de quel droit Lailaith osait-elle mentionner ses parents devant elle, comme si elle avait une quelconque supériorité morale, comme si elle ne l'avait pas abandonnée aussi sûrement que Bëor et Vaïré, comme si elle ne l'avait pas rouée de coup en même temps que le peuple de Laïmé.

Elle disait qu'ils avaient honte de l'appeler leur fille ? Adaeze avait honte de les avoir jamais appelés ses parents. Et elle avait honte de la confiance qu'elle avait un jour accordée à Lailaith et l'entraînement donné à l'armée et de tout ce qu'elle avait vécu ou presque avec Dagnir.

Ils n'avaient aucun droit de la juger.

Ils avaient participé à sa création.

Ils avaient tué Isil, pourquoi s'étonnaient-ils de la naissance d'Adaeze. Oh ils pouvaient faire semblant de la pleurer, regretter « la douce et innocente Isil » qui n'avait jamais existé ailleurs que dans leurs souvenirs et qu'ils avaient bien été incapables de conjurer lors de son Bannissement.

Personne n'avait pris sa défense le jour de son exil, personne n'avait témoigné en sa faveur, personne n'avait fait mention de ses bonnes actions, de sa loyauté, de son travail acharné. À ce moment précis, deux jours après la mort de Thorondor, Isil portait déjà les prémices d'Adaeze.

Ils avaient posé les bases sur lesquelles elle fonderait sa nouvelle identité et avaient l'audace de se plaindre.

Ils pensaient qu'elle les couvrait de honte, de déshonneur ?

Ils n'avaient encore rien vu s'ils pensaient que c'était le pire qu'elle puisse faire. Lailaith lui crachait au visage parce qu'elle avait quitté sa forêt, sa prison, quatre ans avant que Dagnir n'en fasse l'annonce officielle mais ignorait tout de son coup d'état réussi et de sa place dans les ombres derrière le trône. Elle ne la soupçonnait pas pour les bonnes raisons.

Aucun d'entre eux ne voyait le tableau dans son ensemble.

Elle leur montrerait.

La main d'Irine se posa sur son épaule.

Par-delà les Vagues (ELT tome II)Where stories live. Discover now