VI

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Le visionnage de la suite du film n'avait pas eu lieu. Tout simplement parce que nous n'avions pas pu trouver un bon site streaming. Et le temps d'essayer tous ceux qui apparaissaient, l'heure de partir était arrivé.
Nous atterrissons près de chez lui. Puis il me dit :
- Vas-y, tu peux descendre, moi je vais stationner la voiture.
J'ouvre la portière avant qu'il ne m'interpelle.
- Dis, Zoé !
- Oui ? Répondis-je en soutenant son regard.
- Evite de mentionner la partie où j'ai passé la nuit chez toi, Anthony ne comprendrait pas.
- Bien-sûr...
- Sérieusement Zoé, suppliait-il, je sais que vous êtes très proches tous les deux... mais si tu veux qu'on continue à se voir, il va falloir que ça reste entre nous.
Je descends en prenant un air rassurant. Mais alors comme ça, nous allons continuer à nous voir ! C'est une bonne perspective. Et ça m'enchante bien.
En tout cas ça m'enchantait jusqu'à ce que...
Je me retourne et les vois tous les deux, les mains entrelacées en train de marcher derrière moi, le sourire pleins les dents. Et il me salue.
- Salut Zoé ! Ça va ? Tu viens prendre des cours de piano chez Anthony ?
Quelle courtoisie soudaine ! Et quel mauvais goût ! Comment ça se fait que je ne l'aie pas vu venir celle-là ?
En tout cas, je ne m'attendais pas à voir sa petite amie aujourd'hui. Précisément aujourd'hui. Et cette scène de fausse, ou vraie d'ailleurs, cette scène de petit bonheur de couple, me choque énormément. Ce mec est un vrai sans cœur. Il va me le payer !

- Alors ta semaine ? Me questionne Anthony, une fois la porte de la salle de musique fermée derrière moi.
Oh ! Eh bien ! J'ai regardé un film érotique avec ton frère, puis on s'est embrassé dans le noir, et plus tard dans la soirée on a atterri aux urgences parce que j'ai uriné dans des buissons ; et ensuite il a dormi chez moi ; mais je viens de voir qu'il fait semblant de ne pas me connaitre quand sa copine arrive et j'ai le cœur très très lourd.
- Très bien, je me suis pas mal exercée.
- Montre-moi ça alors, dit-il ravi.
Je joue machinalement les gammes que j'ai apprises récemment avant que la porte ne s'ouvre.
- Pardon, je viens juste chercher mon PC, fit l'élu, en faisant irruption dans la pièce et en s'éclipsant aussitôt. Et sans son tee-shirt.
J'imagine ce qu'ils doivent être en train de faire tous les deux, là-haut, et j'ai la haine. Mais je dois me concentrer. Allez ! Concentration ! Fausse note! Fausse note ! Mauvais doigté ! Concentration ! Ils regardent sûrement le même film pour leur servir de prélimin...! Concentration ! Mauvaise gamme !
- ZOÉ !
Tu peux le faire ! Gamme de ré ! Mineur ! Place tes doigts ! Je suis sûre qu'il a oublié tout ce qu'on a vécu !
- ZOÉ !
- QUOI ?
Et bingo ! J'ai crié sur Anthony, et j'éclate en sanglots.
Pourquoi je sanglote ? Quelle imbécile ! Je n'aurais jamais dû rester hier. C'était le premier faux-pas. Et maintenant je ne réussis même plus mes gammes.
Anthony a l'air plutôt gêné, et ne sais pas comment agir face à la situation. Moi je saurais si j'étais à sa place. Peu importe.
- Tu ne veux pas me dire ce qui ne va pas ?
- Je... j'aime bien ton frère, ok ? Mais il vient d'arriver avec une autre fille et ça me brise le cœur.
Au moins c'est dit...
- Bon, tant que ce n'est pas en rapport avec le piano... on peut régler ça.
Anthony est toujours très gentil avec moi. On aurait dit Loid mais avec moins de sourire et beaucoup de tact.
- Il y a une chose que j'aimerai que tu comprennes... commence-t-il. Je ne pense pas que tu sois le genre de fille à vouloir de petites aventures. Tu es ambitieuse et tu rêves toujours grand... et j'ignore si avec lui tu pourrais avoir une grande histoire... tu sais... enfin je ne sais pas si tu comprends.
- Mais peu importe... répondis-je en m'essuyant furtivement les larmes.
Je suis à peu près sûre, rien que dans son regard, qu'Anthony a gravement pitié de moi. Peut-être parce qu'il pense que son frère n'est VRAIMENT PAS intéressé et que moi je perds les pédales.
- Je te propose un truc...
- Quoi ?
- On va faire des leçons théoriques aujourd'hui, dans la cuisine, tout en faisant des cookies. Tu aimes les cookies ?
- J'aime tout ce qui se mange
- J'en étais sûr.
Nous nous amusions bien, Anthony et moi. Jusqu'à ce qu'au milieu d'une grande discussion sur la religion, madame la miss monde débarque, en peignoir.
Dégoûtant !
- Pardon, je voulais prendre un peu d'eau, on a soif, dit-elle avec un sourire artificiel.
- Oui bien-sûr, répondis-je en la laissant passer.

Puis quelques secondes plus tard, l'autre descendit aussi, les traits tirés.
Le pauvre, comme il a l'air épuisé. Bon ! Il s'amuse bien, je suppose. Mais dans tous les cas, je vais juste aller aux toilettes et espère qu'il soient tous les deux remontés avant que je ne revienne.
Etant assise sur la lunette des toilettes, j'ouvre mon téléphone et remarque un nouveau Mail bien sonné :

" Zoé !!! J'espère, mais j'espère de tout coeur que tante Nini fait encore sa grosse mytho et que tu n'es pas en train de trahir ma confiance !!! On a déjà abordé le sujet de la sexualité l'année dernière, et on a été très clair : pas de garçon à la maison quand je ne suis pas là !!!
Aujourd'hui Nini m'apprend qu'en passant près de chez nous tôt ce matin, elle a aperçu un garçon aller et venir. Et je te jure que si elle ment, elle aura à faire à moi car il s'agit d'une grave accusation. Je sais que tu n'aimes pas me raconter tes amours. Et je l'accepte. Mais  je ne veux prendre aucun risque. C'est pourquoi j'appellerai Anthony ce soir pour lui demander de t'héberger le temps que je rentre. Sa mère s'occupera bien de toi, c'est une chic personne. Tu as de la chance que je ne t'envoie pas chez Nini !!!
On aura une conversation sérieuse à mon retour.
N'oublie pas de rassembler des affaires et de bien fermer toutes les fenêtres. Anthony viendra te chercher demain.

Je te raconterai mon trajet dans un autre mail. Bisous. LOLO"

Le frère du professeurWhere stories live. Discover now