Le combat

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Je me trouvai seul face à lui.

Il était là, allongé de tout son hêtre, sans la moindre délicatesse, feignant de m'ignorer.

Une profonde atmosphère de défiance régnait pourtant dans la salle.

Elle semblait prendre sa source au coeur du monstre imposant, solidement ancré sur ses robustes pieds finement ciselés.

Les battemments de mon coeur se firent plus intenses,ma respiration plus haletante.

Mais ajourd'hui, je ne céderai pas.

Je l'affronterai, quitte à y laisser des plumes.

Tapie dans l'ombre, enveloppée sous une épaisse couverture, la bête restait inerte.

Plissant les yeux pour mieux fixer mon regard, je distinguai une forme parmi les multiples plis ondulés recouvrant le colosse. Un sourire narquois se dessinait; suffisament net pour que j'imagine clairement la paire d'yeux au dessus de lui me lançer des éclairs foudroyants.

"Cette fois, j'irai jusqu'au bout" me répétai-je, comme pour me donner du courage.

"Tant que tu ne seras pas fait, scélérat, je resterai là."

C'est alors que je bondis comme un fauve. Avant même que je ne pose mes mains moites sur lui pour l'aggriper, sa carapace drapée s'enroula autour de moi pour m'immobiliser. Je m'agitai comme une furie pour ne pas succomber à sa diabolique étreinte. Après un âpre combat, je parvins à me saisir d'une des extrémités de son armure sinueuse. Désormais, l'issu du combat était entre mes mains, ou plutôt dans la main libre qu'il me restait. Je devais à tout prix me saisir stratégiquement d'une autre partie de sa couche protectrice.

Tâtonnant fébrilement dans les méandres de l'obscurité à la recherche du "deuxième bout de la victoire", je sentais mon regard se troubler, devenir lourd, sous les douces et pernicieuses caresses de mon adversaire de toujours...

"Oui! Ca y est! Je le tiens"

J'ouvris soudainement les yeux, prenant conscience que quelques secondes de plus auraient suffit pour que je succombe à mon terrible adversaire, noyé dans les limbes, subissant le joug de son exquise et terrible malédiction.

Mais l'heure n'était plus à la rêverie.

Ni une ni deux, je me dépétrai de mon sarcophage sacré pour me tenir debout face au monstre, tenant fermement chacun des bouts de ses soyeuses excroissances.

Je brandi simultanément mes mains vers le plafond avec la vigueur d'un apôtre honorant le sacre du Soleil.

Dans un râle guttural, écho de ma terrible affliction, je me mis à secouer la peau de la bête.

Je pouvais presque voir, sinon ressentir, les spectres nauséabonds de mes défaites précédentes surgir de sa carcasse; puis se dissiper aussi vite qu'ils sont apparus au rythme de mes battements.

De l'obscurité enfouie au coeur de mon ennemi, une faible lueur commençait à apparaître.

Cette petite étincelle fugace se fit plus fougueuse et devint timide clarté.

De la timide clarté qui se gorgeait rapidement d'assurance un rayonnement naquit.

Le rayonnement à son tour s'intensifia et finit par déployer sa majestueuse robe de lumière tel un splendide paon incandescant en pleine parade.

La pièce était désormais entièrement baignée dans l'Ether.

Aveuglé, je lâchai la bête.

Un vent de fraîcheur imprégnait lentement la pièce tandis que la lumière se dissipait. Progressivement, j'ouvrais les yeux.

Il ne restait plus que l'ombre d'un infime pli à la surface de son armure. Mais cette fois-ci, il était orienté de telle sorte que mon rival semblait me sourire, comme pour me remercier.

Je me surpris à esquisser un sourire en retour.

"Ainsi c'est ce que tu désirais depuis le début..."

Un subtil sentiment de satisfaction se diffusait en moi.

Détendu, éprouvé mais serein, je me mis à l'étirer et l'ombre disparue.

Enfin! Mon lit était fait.

Le combatUnde poveștirile trăiesc. Descoperă acum