1| C'est ainsi que l'horreur est universelle.

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-MARNIE?

La jeune fille, ou jeune femme, à vrai dire elle ne savait pas, scrutait attentivement chaque recoin de la pièce comme si elle s'attendait à ce que les murs l'enveloppent dans une douce étreinte.

Mais personne ne viendrait la sauver.

Une photographie monochrome ornait le mur sinon blanc, représentant la première classe de son école, une bande de filles joyeuses, mais polies, dont le visage affichait un rictus presque forcé.

-Marnie, est-ce que vous pouvez me dire ce qu'il s'est passé?

La personne qui lui posait cette question savait parfaitement, et aurait pu le réciter comme un poème ou un discours sans conviction. Mais elle voulait tout de même questionner la jeune fille, créer chez elle un fragilité, un doute.

-Je...balbutia-t-elle

Ses doigts contre la table, ses jambes contre le sol, son corps entier était une symphonie d'artistes perdus cherchant un rythme.
La chaleur du mois de mars était étouffante, et l'odeur du bois gonflé lui montait au cerveau, pourriture indistincte qui semblait placer ses doigts humides autour de son visage.

Elle ne savait pas quoi dire, et comment. Personne n'avait écrit de livre dessus, ou alors ils n'existaient pas autour d'elle et se consumaient dans l'air par cruauté.
Son esprit marchait à toute allure, ou plutôt à allure inutile, comme des milliers de petites fourmis qui tentaient de démolir un mur. Les mots n'arrivaient qu'au bout de sa langue avant de disparaître, comme les livres ou le courage qu'elle avait eu de venir jusqu'au bureau de sa C.P.E

Il fallait que ça sorte. C'était simplement que, dans la tête de Marnie, ça allait être une rivière calme et que c'était en fait un tsunami.

-J'ai été victime de quelque chose.

Elle ne voulait pas, ne pouvait pas dire le mot. Elle trouvait cela bien trop intime, comme si le simple fait de le prononcer allait la rendre nue devant sa C.P.E

Ses paupières se fermaient et s'ouvraient dans une course presque étrange, les images se superposaient au détail de sa rétine déjà embuée par les larmes.
Les murs. Ses doigts. La texture de sa jupe. Ses mains. ses mains, à lui. Son corps. Ses lèvres. Cette putain de photo.

-J'ai été victime d'un viol.

La première pierre.Where stories live. Discover now