| CHAPITRE 1 | DE FIL EN AIGUILLE |

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Stiles avait les mains dans la mousse de la vaisselle et il avait incliné sa tête sur le côté pour tenir son téléphone contre son épaule. Venant de lui, le pari était risqué. Tenir un appareil électronique était déjà une épreuve en soit. En tenir un proche d'un point d'eau relevait du suicide. Heureusement, son père avait fait attention à la mention « waterproof » lorsqu'il avait choisi son cellulaire.

-Madame Reyes, je vous jure que le costume de la scène six n'a pas besoin d'être retouché. Occupez-vous de la traîne de la robe de la scène 13. Elle n'est pas assez bouffante, voire surement trop lourde pour voler quand le mannequin marche. C'est assez décevant quand on imagine l'effet que ça pourrait faire !

Il entendit la femme au téléphone marcher en mâchant un de ses éternels chewing-gum. Ses talons claquaient et Stiles se demanda si elle n'était pas née avec un morceau de caoutchouc entre les dents.

- Non, Non, elle est déjà parfaite et puis, c'est pas si grave. Les gens ne vont pas s'arrêter à la façon dont la traîne vole ! La robe est déjà super belle. Maintenant, répond ! la doublure, orange ou rouge ?

Stiles grimaça en frottant un verre de vin en forme de ballon.

-Madame... se plaint-il. Il détestait quand elle ignorait ses conseils comme si ses idées étaient idiotes avant de lui demander son avis juste après, d'un air important. Orange. Répondit-il malgré tout. Mais si vous changez la couleur de la doublure, il faut aussi changer les boutons de manchette. Un costume orange avec des boutons verts, ça fait con.

- Ils sont presque noirs, Stilinski. personne ne le remarquera.

- Peut être pas les amateurs, mais vous oubliez que Laura Hale sera notre hôte lors de la représentation.

- Il y a 80% de chance pour qu'elle se désiste à la dernière minute, de toute façon. Et le ton qu'employa sa responsable à ce moment là était tout bonnement méprisant. Il l'entendit même renifler de dédain.

Apparemment, les deux femmes s'étaient déjà rencontrées auparavant mais le feeling n'était pas passé comme prévu. La blonde a chewing-gum ne pouvait pas l'encadrer mais elle ne pouvait pas non plus, financièrement parlant, refuser une invitation à un des bals de Laura Hale ( Et pourtant, ce n'était pas la motivation qui lui manquait ). Seulement, ce défilé était un grand coup de pub pour sa marque et elle ne pouvait pas prendre le risque de laisser tomber cet aspect.

- Eh bien, pour les 20% de chance qui restent, je pense qu'on peut changer six pauvres boutons.

Stiles grimaça de sa propre audace. D'habitude, il savait mieux se retenir face à elle. Le claquement de langue qu'émit Erica Reyes, sa patronne, le conforta dans sa bêtise. Au moins eût-il la chance d'avoir raison. Elle lâcha un petit « Va pour les boutons noirs » et le jeune homme devina qu'elle écrivait les quelques mots sur l'un des papiers qu'elle donnait aux costumières. C'était de mauvaise grâce et Stiles avait bien sentit que sa place en avait prit un coup. Enfin, il en avait l'habitude.

Il entendit un bruit derrière lui et devina que quelqu'un descendait les escaliers de la maison où il se trouvait. Il sortit les assiettes qu'il rinçait de l'eau et chuchota plus doucement :

-Je dois vous laisser, Madame Reyes, je suis au travail. Penchez vous sur la robe, je vous en supplie. Un petit changement de tissus rapide ne devrait pas être si difficile. De la mousseline chiffon pour alléger ? Proposa-t-il en vitesse.

Comme à son habitude, Erica Reyes lâcha un soupir dédaigneux et raccrocha dans un bruit de mastication et de salutation coupée. Stiles se sécha rapidement les mains sur son tablier en entendant les pas se rapprocher de la cuisine. Il récupéra son téléphone, le glissa dans sa poche et se redressa juste à temps pour accueillir son client avec un sourire professionnel. Il n'avait qu'un travail à mi-temps en tant que styliste dans la boutique d'Erica Reyes. Le reste de son maigre salaire, il le devait à une agence d'homme à tout faire.

StilisteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant