CHAPITRE 1 : Eliott

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— Eliott Prior Holden ! s'égosille ma mère à l'étage inférieur. Dépêche-toi, tu dois emmener ta soeur à l'école !

La brosse à dent enfoncée dans la bouche et le dentifrice qui dégouline de mes lèvres, je grogne en crachant tout dans l'évier.

— J'arrive ! je rétorque.

J'essuie ce qui me dégouline sur le menton et sors en trombe de la salle de bain. Je dévale les escaliers, les chaussures à moitié lacées et mon sac à dos pendu sur l'épaule droite. Ma petite soeur Aubrie m'attend en bas des marches aux côtés de ma mère qui, les traits tirés, ne semble vouloir qu'une seule chose : aller se coucher après sa nuit de garde. Elle n'a pas l'emploi du temps le plus facile au monde, elle doit allier sa vie de famille avec sa vie professionnelle, et le métier d'infirmière est tout sauf reposant. Ses cheveux blonds sont attachés en un chignon désordonné, découvrant son visage fatigué et ses cernes violacées.

Elle m'embrasse la joue avec vigueur lorsque j'atterris devant elle et me donne mon maillot de football.

— Papa est déjà parti ?

Je la regarde avec étonnement en attrapant ce qu'elle me tend, la remerciant silencieusement.

— Les toilettes de Madame Jacksons étaient bouchées, il a dû y aller d'urgence.

Elle ouvre déjà la porte, pressée que nous soyons partis pour pouvoir monter et s'écrouler dans sa chambre.

— Bonne journée mes chéris.

— A toi aussi maman.  Viens ma princesse, j'ajoute à l'intention de Aubrie tout en lui prenant la main.

Nous quittons la maison en vitesse, laissant enfin du répit à notre mère.

— C'est moi qui choisis la musique, balance ma petite sœur lorsque nous arrivons devant mon pick-up.

J'émets un rire étouffé en déverrouillant la portière de mon vieux tacot. Un grincement strident résonne lorsque je l'ouvre et laisse ma soeur grimper sur la banquette avant. Il mériterait un bon coup de nettoyage et de graissage. La peinture, autrefois bleue marine, est écaillée et de la boue, datant certainement de l'époque de mon grand-père, est incrustée dans les joints des fenêtres. Il en a vécu des aventures, mais malgré son état vétuste je ne m'en séparerais pour rien au monde. L'ayant conduit avant moi, mon père s'était beaucoup vanté d'avoir réussi à draguer des filles avec. J'avais laissé échapper un rire grave quand avec mon grand-père ils m'avaient raconté leurs souvenirs passés dans cette vieille Ford. Je ne doutais pas un seul instant que je pouvais faire une croix sur ce genre d'aventures. Une caisse dans un état pareil ne fait pas rêver grand monde aujourd'hui...

Je lance un coup d'oeil vers Aubrie, assise sagement près de moi et sa ceinture attachée, avant de tourner la clé et d'allumer le contact.

— Du coup je veux mettre la musique de la dernière fois, elle me demande en me fixant de ses beaux yeux bleus, cachés derrière des lunettes rondes qui lui mangent la moitié du visage.

— Tu ne diras pas aux parents que je t'ai encore fait écouter ce genre de musique, hein ? je lâche en rigolant.

Elle glousse tout en secouant ses boucles blondes de gauche à droite. Je la fixe un instant, dans sa jolie petite robe fleurie et cède face à son adorable moue. J'attrape mon téléphone coincé dans la poche avant de mon jean et le branche sur l'autoradio que j'ai réussi à installer il y a quelques mois. Les premières notes de musique se répandent dans l'habitacle au moment où je m'insère sur la route.

Après plusieurs minutes bloqués dans les embouteillages matinaux, je me gare en double file devant l'école d'Aubrie.

— C'est moi qui viens te chercher ou c'est maman ?

ESPRIT D'EQUIPE [ aux Editions Addictives]Where stories live. Discover now