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- J'ai tellement de frustration accumulée en moi que je peux frapper n'importe quoi, dis-je, oubliant les personnes présentes dans la cellule.

Je n'étais pas moi-même, je le sentais mais je n'arrivais pas à penser autrement. Je voulais faire du mal à quelqu'un et, quel dommage, qu'il soit sur mon chemin. On tirait en moi et je grognai en réponse. On continuait à le faire et de plus en plus fort. Je fermai les yeux et tombai dans cet espace magique qui m'était destiné. Dans ce désert qui aurait dû être vide, des flux rouges décoraient l'environnement. Ils bougèrent furieusement, rampèrent sur moi, entrèrent et sortirent de moi. Je n'en avais jamais vu autant. Je baignais dans une magie démoniaque. Je devais me libérer sinon j'allais devenir complètement folle.

Un poing cueillit ma mâchoire et je ne réfléchis plus.

J'avais un excellent jeu de jambe et j'appliquai tous les coups empruntés au Taekwondo que je connaissais. Pour un coup donné, je reculai. Malheureusement, il avait une très bonne défense ; ses bras protégeaient aussi bien sa tête que ses côtes. Et il savait placer ses coups. Il possédait la vitesse des Alters mais comme mon premier combat dans cet univers magique, je perçus les coups à une vitesse réduite. J'évitai les coups à la tête, ceux qui risquaient de me mettre hors service.

- Tu ne sembles pas si en colère que ça puisque tu es incapable de me toucher. Ou alors, poursuit-il, tu es juste faible.

Ses mots me mirent en rogne et j'accélérai la cadence. En pivotant, je balançai ma jambe droite vers son visage avec une vitesse surréaliste. Il l'attrapa avant que je puisse atteindre ma cible. Je me jetai au sol, amortissant ma chute de mes bras et l'entraînai dans mon sillage. Il avait prévu ce geste de ma part et atterrit sans se blesser. Il se releva plus rapidement que moi et m'attaqua au sol. Je restais humaine, je m'épuisai. Il fallait que je l'immobilise. Bien que j'esquivasse chacun des poings qu'il m'envoyait, j'essayai de me souvenir des mouvements d'aïkido pour le mettre au sol. C'était le seul moyen plausible pour qu'il ne puisse plus bouger.

Ça faisait un moment que je n'avais plus pratiqué l'aïkido. La dernière fois, c'était pour un gala d'une association où mes parents étaient membres. Pour se faire bien voir, bien sûr. C'était chorégraphié, maîtrisé, et volontairement tape-à-l'œil. Ici, il s'agissait de survie et peut-être de vengeance. J'allais mettre toute ma puissance et mon énergie pour le mettre au sol. Lorsque son bras effleura mon épaule pour la énième fois, je l'agrippai, pivotai et poussai mon buste vers le bas de toutes mes forces. Il s'agissait d'une prise basique mais qui fit son effet. Son dos fit en bruit mat en rencontrant le sol. L'éclat de ses yeux sembla vacillé et j'en profitai. M'installant sur son torse, bloquant ses bras de mes jambes, je le rouai de coups rapidement. Il essaya de riposter, en vain. J'évacuai.

- Pour toutes les choses horribles que j'ai dû dire et faire, hurlai-je en abattant mon poing dans un coin de sa mâchoire, puis chacun de mes coups fut ponctué de mes revendication. Pour ma séparation de mes seuls amis depuis longtemps. Pour le meurtre de la mère du gamin. Pour celui de toutes les autres personnes. Pour ces enfants, ces bébés Alters. Pour la course poursuite. Pour les coups que j'ai reçus. Pour la torture, merde !

Il ne bougeait plus et je fis en sortes de me glisser sous lui, coinçant ses bras de mes jambes et attrapant sa tête de mes mains. J'alignai sa tête avec sa colonne mais avant de faire quoique ce soit, je relevai les yeux.

Théo nous regardait, moi en train de massacrer son père, Marc, ou le Démon, en train d'essayer de sauver sa peau. Jinx hocha la tête frénétiquement, comme pour m'inciter à faire ce que je m'apprêtais à faire. En observant Théo, l'adrénaline retomba et je me repris. Il restait son père. Je ne pouvais pas le tuer. J'en étais incapable. Ce n'était pas dans ma nature, je n'étais pas une meurtrière. Puis deux choses se passèrent simultanément : j'eus l'impression qu'une lame se posait sur mon cœur et celle-ci, en plus d'avoir un goût de sorcellerie, me soufflait la promesse que j'avais faite à Asda Belevitch. Et Théo hocha la tête pour me dire qu'il voulait que je le fasse.

Ush ROWTAG T1 : Monstres inattendusWhere stories live. Discover now