Chapitre 3

299 10 5
                                    

Mon frère cuisinait toujours aussi bien, je m'étais régalée avec son curry ! Après le repas, il s'était ensuite couché, mais le connaissant, il n'allait pas fermer l'œil de la nuit. Et moi, comme prévu j'étais sortie. On était presque en été, mais il faisait assez froid dehors. 

Taiga m'avait prêté une de ses balles de basket. Je marchais dans la ville depuis quelques temps, cherchant les fameux terrains de streetball dont il m'avait parlé. Heureusement, il y avait encore beaucoup de lumière. Quand il faisait noir, je ne voyais quasiment rien du tout. Pas étonnant pour une personne borgne me direz-vous.

Lors de mon entrée au collège, j'ai eu un accident qui m'a fait perdre la vue de mon œil gauche. Je ne vois plus que d'un œil. C'était dur au début de s'y habituer, la réhabilitation a été plutôt longue, mais maintenant j'arrive parfaitement à vivre malgré mon handicap. J'ai aussi réussis à faire de cet handicap une force. En effet, cette perte m'a obligé à travailler tous mes autres sens. Ils sont beaucoup plus développés maintenant et ça m'aide beaucoup au basket.

J'ai décidé de ne rien dire à personne pour mon handicap. Quand les gens apprennent que vous avez un handicap, ils se comportent différemment avec vous et c'est très énervant. Je l'ai vécu pendant presque toutes mes années de collège.

- On dirait que je suis arrivée.

J'étais enfin aux fameux terrains. Il y avait encore du monde alors qu'il faisait presque nuit. Je me suis dirigée vers le seul terrain libre et j'ai commencé à jouer. Je me suis d'abord échauffée avec quelques shoots, puis j'ai travaillé ma pénétration dans la défense en m'imaginant des adverses en face de moi.

J'ai une façon assez particulière de jouer. J'utilise mon agilité, ma vitesse et mes sens. Comme je ne vois que d'un œil, mes autres sens fonctionnent à double régime. Ils me permettent d'entendre tout ce qu'il se passe sur le terrain et de prévoir juste grâce au son et à ma réactivité, l'action d'un adversaire. J'ai aussi d'autres talents cachés, mais cette façon de jouer et celle que j'utilise le plus souvent.

- Pas mal pour une fille. Entendis-je au moment où je marquais un énième panier.

Je récupérai la balle et me retournai pour voir un mec métis aux cheveux et aux yeux bleus. Il était plutôt grand et il me regardait avec un air fatigué sur le visage. Un sourire carnassier était plaqué sur son visage et il dégageait une aura bestial assez imposante. Il avait aussi une balle de basket dans les mains. Ça se voyait au premier regard, ce mec était une bête au basket.

- T'es qui toi ? Lui demandais-je.

- Tente de me résister et je te dirai qui je suis.

- Non mais il est gonflé lui ! Je vais faire mieux que te résister, je vais te battre !

- Ne dis pas quelque chose que tu n'es pas sûre de pouvoir faire.

- Et toi arrête de te prendre pour celui que tu n'es pas.

- Trêves de bavadarges, jouons.

- Allons-y ! Dis-je en commençant à dribbler avec ma balle.

Il posa la sienne et se mit en face de moi, toujours son sourire collé au visage.

- Je vais te faire ravaler ton sourire mon vieux.

- J'ai hâte de voir ça et ne m'appelle pas "vieux".

Je souriais à mon tour et me mis à dribbler plus rapidement. Je le passai ensuite sans difficulté et me dirigeai vers son panier, cependant, au moment où je sautai pour mettre mon panier, une tornade surgit de nulle part se dirigea vers moi. C'était lui, je l'avais entendu se diriger vers moi. Je baissai la balle au moment où il allait me la reprendre et je la relevai ensuite pour marquer. Nous sommes ensuite tous deux retombés au sol. Cette action avait été très rapide et je transpirais déjà. Comme je l'avais sentie, ce mec était loin d'être un amateur. 

- Tu es très rapide. Dis-je en m'essuyant le front.

- Toi aussi, mais ça ne suffira pas.

Je lui jetai un regard noir et retournai en défense. Il ramassa la balle et arriva calmement à ma hauteur. Il me passa très rapidement par le côté gauche. À cause de la rapidité, je n'ai pas réussis à prévoir le coup. Ce mec joue à l'instinct, ça se voit. C'est plus difficile de prévoir un basket qui n'est pas académique, mais ce n'est pas impossible. Je me suis moi-même beaucoup entraînée dans la rue. On y voit beaucoup de choses intéressantes. 

- Bah alors ? Tu as décidé d'abandonner ? Me dit-il en marquant.

- Pas le moins du monde. J'ai eu un petit moment d'absence, c'est tout.

- Si tu ne te concentres pas, le peu de chance que tu avais de me battre passent de "quasiment impossible" à "aucune".

- Ferme-la et passe-moi la balle imbécile.

Il soupira et m'envoya la balle. Je n'allais sûrement pas me laisser faire par un petit prétentieux aux cheveux bleus ! En seulement deux actions, j'avais pu décerner chez lui un rythme particulier. En apparence, son jeu n'a pas de rythme et semble imprévisible, mais même dans l'imprévisible, il y a un rythme. Je suis bien placée pour le savoir, le jeu de Lucie est basé sur le rythme.

Nous avons donc continué notre petit match, jusqu'à arriver à la balle de match. Il menait avec 4 paniers, contre 2 pour moi. Il avait la balle dans les mains et comptait me passer, sûrement sur le côté gauche. Il avait compris que c'était mon point faible, même si je doutais qu'il sache réellement pourquoi.

- C'était pas trop mal, mais tu vas vite comprendre que toi et moi, on a rien à voir.

Il me passa donc comme je l'avais prévu. Je me retournai rapidement et me dirigeai vers lui. Il était en train de sauter. Lorsqu'il shoota, je me positionnai au bon axe, j'attendis quelques secondes et sautai, touchant légèrement la balle, sous l'étonnement de Mister cheveux bleus. Cependant, la balle entra tout même dans l'arceau.

Je pestai intérieurement. Je n'avais pas réussi à trouver de parade à son jeu. Un match à 5 points gagnant ce n'était pas assez long pour analyser un adversaire.

- Tu joues plutôt bien, mais tu ne peux rien contre moi, car le seul qui peut me battre, c'est moi-même.

L'œil De La TentationWhere stories live. Discover now