Chapitre 4

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– Pas toi

« Ce n'est pas juste, c'est mal écrit »


Automne 1815 – Birmingham, Royaume-Uni


J'observe le ciel assombri par la fenêtre de ma chambre. Nous sommes début octobre et l'automne n'a pas attendu très longtemps pour s'installer à Birmingham. Il a plu toute la journée et d'épais nuages couvrent désormais nos vies. Ou peut-être seulement la mienne.

Je soupire et une buée se forme sur la fenêtre. Je pose mon doigt sur la vitre et dessine le seul chiffre qui tourne en boucle dans ma tête : dix.

Dans dix jours, Louis devrait être au cimetière, sur la tombe de sa sœur. Encore dix jours dans cette incertitude. Voudra-t-il seulement me revoir ? M'a-t-il oublié ? Sera-t-il vraiment là ?

J'entends des coups contre la porte de ma chambre.

Je réponds, en m'éloignant de la fenêtre :

— Entrez.

— Monseigneur, déclare le majordome du château, en restant sur le pas de la porte. Vous avez de la visite.

— Mademoiselle Delevingne ? deviné-je.

Cara est probablement ma seule amie dans cette ville et nous nous voyons de plus en plus régulièrement. Ça ne fait pas vraiment plaisir à mon père, mais il préfère une jeune comtesse à la présence de Louis, probablement.

— Une autre jeune femme. Elle s'est présentée sous le nom d'Ella.

Je me crispe. Cela fait bien deux mois que nous ne nous sommes pas vus. En fait, elle n'a jamais souhaité me revoir depuis ma proposition de mariage. J'ai tenté de la retrouver, mais, de nouveau, elle s'était envolée. Disparue dans l'air.

— Merci Arthur, j'arrive tout de suite.

— Bien, répond le majordome, en refermant la porte de ma chambre.

Je me rue vers mon miroir et observe mon reflet. Je passe une main dans mes boucles brunes et attrape mon veston dont je referme chaque bouton. Il me semble que le duc n'est pas au château ce soir, mais s'il revenait par surprise, il serait hors de question qu'il me voit mal soigné alors que je suis accompagné. Je noue un foulard autour de mon cou et sors rapidement de ma chambre.

Je rejoins Ella qui m'attend dans la salle à manger du château.

— Bonsoir, annoncé-je ma présence. Je ne m'attendais pas à votre visite.

— Je vous dérange ? demande-t-elle, gênée.

— Pas le moins du monde, lui assuré-je. Vous m'avez manqué.

Ella reste silencieuse, les yeux baissés vers ses pieds.

Je reprends aussitôt la conversation :

— Je suis désolé de vous avoir fait fuir. J'ai été terriblement maladroit, j'aimerais que vous sachiez que...

— J'accepte, me coupe-t-elle.

— Je vous demande pardon ?

— J'accepte votre demande en mariage, précise-t-elle, évitant toujours soigneusement mon regard.

Je reste figé au milieu de la pièce. Je ne m'attendais pas à ce retournement de situation, j'avais abandonné l'idée de l'épouser. Mon père m'en a voulu pendant des jours, rétorquant que je ne faisais que le mener en bateau depuis le début. Je l'ai convaincu que je trouverais quelqu'un d'autre à épouser, s'il me donnait encore quelques mois de répit. Il a accepté.

Après minuitWhere stories live. Discover now