Chapitre 5.

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Quand une chute est lente, on a le temps d'anticiper et de se rattraper de justesse avant de se casser quelque chose.

Mais Charlie, elle, était tombée amoureuse de Mathieu bien trop vite pour ne pas se faire mal

Elle attendait toujours impatiemment qu'il la contacte, ou de voir son scooter ou sa voiture garée devant la fac.

Quand il était là, garé en double file, lunettes de soleil sur le nez et cigarette au coin des lèvres, elle sentait tout son cœur s'enflammer.

Abandonnant amis et travaux à rendre, elle courait à une vitesse toujours plus folle vers ce prince pas très charmant qui avait pour royaume quelques blocs de bétons.

Charlie n'avait plus peur du regard des autres, parce que le seul regard sur elle qui comptait, désormais, c'était celui de Mathieu. Elle aimait le voir sourire avec envie quand ses yeux dévalaient son corps, elle voulait l'entendre dire qu'elle était belle, qu'elle lui plaisait, qu'il la voulait.

Elle n'était plus la « suiveuse », elle était la copine de Mathieu, celle pour qui il lâchait parfois ses amis et son rap, celle qu'il embrassait, emmenait faire un tour hors de Paris, celle qu'il appelait « bébé » et à qui il lâchait parfois un ou deux mots doux au creux de l'oreille.

Et puis il avait ce côté voyou, cette attitude toujours inatteignable, comme s'il voulait lui faire sentir qu'il ne lui appartiendrait jamais. Mathieu pouvait passer plusieurs jours sans lui donner de nouvelles, ou annulait au dernier moment lorsqu'ils devaient se voir. Il ne disait pas qu'il l'aimait, ni qu'il resterait toujours avec elle. Charlie sentait bien que Mathieu n'était pas du genre à lui livrer ses secrets et faiblesse. Parfois, ils se voyaient une heure ou deux, chez lui, chez elle, puis il la laissait allongée sur le lit sans même un regard, avant de poser un casque audio sur sa tête et d'allumer un joint pour se mettre à travailler. Parfois aussi, elle se réveillait dans son lit et il était déjà parti.

Au début, elle avait adoré ce côté de sa personnalité. C'était séduisant, un homme libre qui faisait ses choix sur un coup de tête. C'était intrigant, un garçon qui renfermait tous ses secrets. Elle voulait qu'il l'aime comme elle l'aimait, alors elle lui donnait tout. Chaque seconde de son temps qu'il demandait, son corps, son cœur, sa tendresse et ses propres secrets.

Ce qu'elle aimait par-dessus tout, c'était lorsqu'il ne l'avait pas vue depuis longtemps et qu'il se jetait sur elle comme un affamé. Là, elle avait l'impression que ses sentiments étaient enfin partagés. Charlie se lâchait avec lui, elle n'avait pas peur d'être elle-même, d'être un peu folle, un peu sauvage aussi. Il fumait beaucoup, alors... Elle fumait aussi.

Et puis il y avait eu cette chanson, qui avait fait rougir Charlie et avait déclenché la course folle de son cœur. C'était quelques mois après que cette relation entre eux ait commencé, ce n'était pas une chanson d'amour non, mais c'était Mathieu qui parlait d'elle, de ce qu'ils vivaient ensemble. Bien qu'elle en fut un peu gênée, elle l'aima encore davantage, précipitant toujours plus la chute de son cœur vers le précipice qu'elle faisait semblant de ne pas voir depuis qu'il l'avait embrassé la première fois.

Le plus difficile à vivre, avec Mathieu, c'était de supporter sa possessivité légèrement disproportionnée. Il n'aimait pas que d'autres garçons lui tournent autour et cela se manifestait parfois par de violentes crises de jalousie que Charlie avait du mal à endurer, elle qui pourtant se sentait bien incapable de tromper son rappeur.

À titre d'exemple, il arriva une fois où la jeune fille ignorait que Mathieu avait prévu de venir la chercher après les cours. D'ailleurs la démarche de ce dernier était loin d'être innocente, cela faisait partie de ce qu'il appelait les « contrôles surprise ». Comme elle sortait de la fac avec deux amis, l'un d'eux, Hugo, proposa à Charlie d'aller boire un verre. Elle refusa poliment, car elle savait très bien que ce n'était pas le genre de chose que le garçon qu'elle aimait appréciait, surtout avec quelqu'un qu'il ne connaissait pas.

Des annéesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant