Chapitre 2

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L'esprit embrumé, elle resta immobile quelques instants, aux aguets.

Bien réveillée maintenant, même si elle n'avait entendu aucun bruit, elle tourna la tête vers son radio réveil avec un soupir.

Les chiffres rouges affichaient 23h55. Presque minuit donc...

Elle bailla et se frotta les yeux, surprise de constater qu'elle s'était couchée à peine une demi heure plus tôt. Puis elle fronça les sourcils perplexe : quelque chose n'allait pas mais elle n'arrivait pas à mettre le doigt sur ce qui clochait.

La jeune femme entendit un bruit étrange, mais elle n'y prêta pas vraiment attention. Après tout la maison craquait et gémissait de partout. Elle commençait tout juste à s'habituer.

Malgré tout, elle était préoccupée : elle sentait au fond d'elle que quelque chose ne tournait pas rond. Son esprit survolté ne cessait de chercher ce qu'elle loupait sans pour autant trouver.

C'était une sensation aussi désagréable que d'avoir une démangeaison dans un endroit inaccessible, impossible à soulager.

Soudainement complètement réveillée, Evangeline s'assit dans son lit, l'oreille aux aguets. Elle décida qu'elle était bien trop énervée pour se rendormir... Autant déterminer ce qui l'avait tiré du sommeil si elle voulait avoir une chance de retrouver le sommeil.

Après quelques instants, elle dut se rendre à l'évidence : il n'y avait rien. Pas un bruit. La maison était totalement silencieuse.

Evangeline secoua la tête en souriant légèrement. La maison lui semblait toujours tellement bruyante et là, en pleine nuit, avec trois invitées dormant dans les chambres voisines, le silence en devenait presque pesant.

Elle soupira et s'apprêta à se recoucher, maudissant son patron d'avoir amené sa conquête du moment. La charmante Barbara avait probablement réussi à lui provoquer un cauchemar avec sa petite crise lors de son arrivée.

Evangeline gloussa doucement et posa la tête sur son oreiller.

Le bruit se reproduisit.

Evangeline se figea. Elle ne pouvait ni identifier ni situer le bruit, cependant un frisson de terreur la parcourut.

L'idée qu'elle avait déjà entendu ce bruit - un autre temps, un autre lieu - la traversa.

Elle secoua la tête en se redressant agacée. Elle marmonna à mi-voix "Ce n'est qu'un cauchemar", mais elle ne parvint pas réellement à s'en convaincre.

L'étrange bruit se reproduisait maintenant à intervalles presque réguliers. Il était trop faible pour être identifié mais trop fort pour être simplement ignoré.

Un souvenir de sa petite enfance remonta soudain comme une bulle à la surface de sa conscience. Il s'agissait d'un souvenir qu'elle avait refoulé. Un souvenir qui la terrorisait.

Elle n'était qu'une enfant, presque un bébé encore.

Elle jouait sur la pelouse, probablement dans la cour de la maison familiale, près de la forêt qui bordait leur propriété.

Elle pouvait encore sentir la chaleur du soleil sur sa peau, la douceur de l'air. Le vent lui apportait une odeur d'herbe fraîchement coupée et agitait doucement ses boucles rousses.

Adulte, elle détesterait cette odeur, au point d'en être presque malade, mais la petite Evangeline encore innocente ne le savait pas encore.

La petite fille de l'époque était heureuse d'être à cet endroit. Ses parents étaient un peu plus loin, la surveillant d'un œil distrait en discutant tous les deux. Mais qu'importe : l'enfant sentait la présence de ses parents et ça lui suffisait amplement.

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