Pour toi, petite sœur à la peau sombre,
Dont la bonne humeur n'a d'égale
Que la force de résister dans ce monde d'ombres
Où la bêtise et la méchanceté s'étalent !
Nous jouions dans la même rue,
Nos maisons presque voisines
Nous avaient rapprochés.
Moi le petit blond et toi décomplexée
Un sourire soleil qui te donnait bonne mine,
Qui a éclairé ma vie dès que je t'ai vue.
Hé, le garçon aux yeux clair !
Je peux m'approcher, voir de quoi t'as l'air ?
Tu lâchas la main brune de ta mère
Et courus vers mon trottoir coté pair,
T'asseoir avec moi, là par terre.
Dès cet instant s'était instauré entre nous
Comme une connivence, une association.
Il n'était de jour sans qu'on se voit.
Il m'était difficile de m'imaginer loin de toi
Et dès lors, nos parents voyaient cette relation
Avec joie et l'espoir d'un monde plus doux.
Cette bulle d'amitié dans laquelle nous vivions,
Chers voisins qui parfois se perdaient en réflexions,
Était un cadeau que nous nous faisions.
Mais aussi que nous vous offrions.
Espérons que vous avez progressé grâce à cette vision.
Nos jeux naturels pour d'autres enfants,
Leur paraissaient quelque peu inopportuns.
En effet, une fille noire et un jeune caucasien,
C'était contre nature qu'ils aient des liens !
Et qu'ils retournent dans leur monde, chacun !
Qu'ils se fréquentent était inconvenant.
Mais nous insouciants et heureux,
Donnions libre cours à nos jeux.
Même à l'âge où les adolescents peuvent être merdeux,
Nous n'avions que faire de la colère dans certains yeux
Et nous autorisions le luxe d'être heureux.
Sans cesse te défendre pour une place.
Sans cesse déjà en classe,
Tu te sentais obligée de regarder la glace.
Je suis black, que veulent – ils que j'y fasse ?
Certains ressortaient même ce vieux terme de race !
C'est en grandissant que j'ai compris les mots de Pierre
Quand il chantait l'histoire de Lili
Cette jeune femme dont tu pouvais être fière
Il racontait sa découverte de la France en arrivant des Somalies.
C'est en te confrontant à ces comportements d'hier
Que ton humeur décomplexée s'est malheureusement flétrie.
Même lorsque je t'emmenais au ciné ou prendre une bière,
Je voyais que le soleil dans tes yeux s'était terni.
Je t'ai revue après bien des années
Ton sourire, par tant de bêtise, s'était lassé ;
Ton espoir si grand dans un monde partagé
Avait trop souvent sur la haine trébuché.
Ces gens égoïstes ou peureux, qu'avaient - ils fait ?
Lili venait des Somalies
Mais elle pourrait venir de Ouagadougou, Abidjan ou Paris !
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PETITE SŒUR A LA PEAU SOMBRE
PoetryPour toi, petite sœur à la peau sombre, Dont la bonne humeur n'a d'égale Que la force de résister dans ce monde d'ombres Où la bêtise et la méchanceté s'étalent !