Un siècle elfique

CHAPITRE 2

   -DEBOUT !!

   -OUAAH ! Valéra ! Tu n'es pas obligé de crier ! Et puis il est encore tôt, non ?

   Keefe sut que non, il n'était pas tôt, quand son aide lui mit un réveil indiquant 12 h moins 5 devant le nez.

   Quand l'elfe descendit, il était 13 h 30.

   -Ah, je meurs de faim !

   -Vous n'aurez rien.

   -EEHHHH ?! Mais... Pourquoi ?!

   -Vous n'aviez qu'à mettre moins de temps pour descendre.

   -Et avoir moins de temps à consacrer à ma splendide chevelure ? Jamais !

   -Alors vous devrez travaillez le ventre vide. Vous devez terminez le tableau pour Lord Sureen pour 19 h.

   Keefe eut un sourire et  se dirigea vers l'atelier, bras croisés derrière la tête.

   -19 h, hein ? Dans ce cas, mettons-nous au travail !

   Valéra le suivit. L'Empathe retroussa ses manches et s'assit derrière un chevalet, face à un canapé. Il souleva le tissu qui masquait l'oeuvre et lança :

   -Prête, ma chère ?

   Il releva la tête.

   Valéra, qui avait revêtu une robe d'un rouge profond et s'était à demi allongée, lui répondit :

   -Laissez-moi une minute...

   Elle ferma ses yeux bleu nuit et son visage fin s'arrondit légèrement, ses cheveux noirs et court aux reflets bleutés s'allongèrent pour arriver à ses omoplates et ils devinrent roux. Enfin, sa peau bronzée prit une teinte d'un blanc rosé. Quand elle rouvrit les yeux, ils était devenus d'un bleu-vert où le vert dominait.

   Keefe esquissa un sourire. Les talents de Changeforme de sa compagne étaient vraiment parfait pour un modèle.

   -Bien. C'est parti, Keefe.

   Valéra, depuis le fauteuil où elle prenait la pose, ne détachait pas les yeux de son "maître". Le voir se concentrer de cette manière, regard profond, se mordant légèrement la lèvre inférieure, ses yeux passant sans cesse d'elle à la toile, changeant de pinceaux, de couleurs... Tout ça la fascinait toujours autant.

   Elle s'était associé à cet homme il y a 30 ans, et il l'avait d'abord étonné, énervé, intrigué, attiré, fasciné, puis elle en était tombée amoureuse.

   Cependant, quand elle s'était déclarée, 10 ans après l'avoir connus, il lui avait répondu gentiment qu'il ne pouvait lui rendre ses sentiments.

   Le choc l'envahit, aussitôt balayé par la colère et la tristesse.

   -Pourquoi ?! Des femmes, vous n'en voyez jamais, ça fait 50 ans que vous n'avez pas quitté Surfday ! Vous n'avez aucune nouvelle de l'extérieur depuis tout ce temps, vous refusez même que je vous en donne ! Alors pourquoi ?!

   Il la regarda et le souffle de Valéra fut coupé par la tristesse qui se lisait dans ses yeux.

   -Je ne veux pas que tu sois triste à cause de moi, Valéra. Je n'en vaux pas la peine.

   La colère de la jeune femme s'évanouit.

   -Idiot ! Vous croyez vraiment que je serais tombé amoureuse de vous si c'était le cas ?

   -Je suis un idiot, crois-moi. Parce que depuis 93 ans, j'aime la même femme. Alors qu'elle a épousé mon meilleur ami.

   Valéra comprit alors la tristesse de Keefe.

   -Qui ? murmura-t-elle doucement. Qui est cette femme ? Je la connais ?

   -Tu ne peux pas ne pas la connaître, crois-moi. Surtout quand tu me connais.

   L'homme poussa un profond soupir et passa une main dans ses cheveux.

   -Elle se nomme Sophie Foster. Mais maintenant, son nom est Sophie Vacker.

   La femme entrouvrit la bouche.

   -La femme de Fitzroy Vacker ? Bien sûr, souffla-t-elle. J'aurais dû m'en douter.

   -Valéra, je t'en supplie, ne m'abandonne pas ! Même si tu sais que je ne peux pas t'aimer, ne me laisse pas, s'il te plaît !

   -Je vous le promet.

   Depuis cet événement survenu 20 ans plus tôt, elle avait fait une croix sur Keefe Sencen, même si son admiration pour lui ne s'était pas affaibli, au contraire.

   Maintenant, il faut que j'arrive à lui faire savoir que son amour n'est pas vain... puisque les Vacker ont divorcés il y a maintenant 10 ans.