Chapitre 8 -

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Même s'ils m'ont enlevé ma montre, je sais que cela fait près de 3h que je suis enfermée dans cette cage servant de garde à vue temporaire. J'ai d'abord commencé à tourner en rond mais 4m² ne permette pas de faire le vide dans sa tête. J'ai pensé à Thomas, à cette fille allongée sur la route, à Daniel Cliffman, à ma responsable. C'était un accident. Ça je me le suis dis des milliers de fois dans ma tête mais personne ne veut en prendre compte. J'ai fini par m'installer sur le lit quelque peu crasseux. J'ai mis mes mains sur mon visage et j'ai pleuré. Encore et encore. J'ai laissé toutes les larmes coulées parce que je m'en veux, parce que j'ai peur, parce que je suis innocente.

Deux militaires finissent par arriver et ouvre la porte de ma cage. Il me demande de tendre les bras, je m'exécute. Un des militaires, le plus costaud, se charge de me remettre mes menottes aux mains. Il s'abaisse et m'en met également aux chevilles. Je tente de garder la tête haute. Je suis devenue une Daniel Cliffman, une future minière.

- Suivez-nous, me dit le militaire costaud.

Je souffle un bon coup et sors de ma cage. Je les suis, d'un pas lourd. Je n'arrive pas à marcher correctement et mes menottes aux chevilles me brûlent la peau. Nous longeons un long couloir, sans fenêtre. Puis nous entrons dans une grande pièce aux moulures sur le plafond, aux murs blancs et quelques dorures sur les statues mises en place le long des murs. Bienvenu au Tribunal de la Mine. Une porte en bois est plantée en plein milieu du mur principal. Derrière cette porte se trouvent les juges et mon mari. Derrière cette porte se trouve mon avenir.

- Vous pouvez vous asseoir en attendant votre tour, m'indique le militaire en pointant du doigt un des bancs de la pièce.

- Est-ce que je peux aller aux toilettes ?

Le militaire se rapproche de moi et pose sa main sur mon dos pour me pousser dans la direction des toilettes. Sa main. Premier contact humain apaisant depuis plusieurs heures. Je sais que cet homme est un militaire faisant son travail mais j'apprécie ce geste qui, pendant quelques secondes, me soulage de mon sort. J'entre dans les toilettes, seule. Aussi beau que le couloir. Des dorures prônent sur le grand miroir. La seule tâche dans cet endroit est : moi. Ma chemise blanche est couverte de tâches de bitume et est toute froissée. Mes cheveux ont perdu leur éclat. Et mon visage, j'ai honte de me présenter comme ça devant des hauts placés de la société. Mon mascara a coulé, mes yeux sont rouges, j'ai l'impression d'être déformée du visage.

Malgré les menottes aux poignets, j'arrive à allumer le robinet. Je plonge ma tête dans l'eau et hurle un bon coup. Les pleurs, ne suffisent pas. Alors les cris, eux, m'aident. Je gratte mon visage avec mes doigts et sors ma tête de l'eau. Le mascara a bien coulé. Je prends le papier a disposition et commence à me nettoyer le visage. Je ne veux pas paraître faible devant les juges. A moins que cela me sauve de la Mine ? Je ne sais plus quoi penser.

On toque à la porte. J'ouvre pour tomber nez à nez avec le militaire.

- C'est l'heure.

C'est parti. Que l'enfer commence.

Les portes du tribunal s'ouvrent et j'aperçois en premier les trois juges. L'air sérieux, ils ne dégagent rien de chaleureux. En tournant ma tête à gauche je vois Thomas. Il est sur son ordinateur. L'amour de ma vie, le centre de mon univers est là, à quelques mètres de moi et je ne peux pas le serrer dans mes bras, lui dire que je l'aime profondément.

Contrairement aux moulures dans le hall, la pièce du tribunal est plutôt simple. Elle est envahie de plusieurs plantes grimpant sur les murs et entre les grandes fenêtres. On m'installe face à une table en bois et je mets mes mains menottées dessus. Le bruit des menottes attire l'attention de Thomas et cette fois nos regards se croisent. La terre me tombe dessus. Ses yeux, sa bouche, son visage, tout en lui est choqué de me voir là. Nous devons rester silencieux mais d'un murmure je lui dis que je l'aime. Il me répond que lui aussi m'aime.

La MineWhere stories live. Discover now