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« Pour moi, la solitude avait toujours été un lieu plus qu'un sentiment, une petite pièce dans laquelle je pouvais me réfugier pour être moi-même. » C. Strayed

La musique à fond dans les oreilles, je regardai défiler le paysage. À la façon de la cadence du train, les mêmes pensées se répétaient dans ma tête : et s'il arrivait quelque chose aux gens que j'aimais ? Avais-je pris la bonne décision en construisant ma vie si loin d'eux ?

Une petite voix, sournoise, me murmurait que je n'étais qu'une lâche. Une trouillarde. Que je fuyais, que je partais pour ne pas voir partir.

Ma vie était désormais compartimentée en deux mondes bien distincts : l'avant, et le maintenant. Les quelques semaines que je venais de passer chez mes parents me renforçaient dans cette idée. Chez eux, j'étais propulsée dans le passé. J'étais, sans le vouloir, confrontée à des morceaux de moi restés là-bas.

Heureusement, les six heures de train qui me séparaient de ce passé faisaient office, depuis trois ans déjà, d'un sas transitoire qui me permettait de rester saine d'esprit. Mais pour la première fois, je redoutais mon retour en ville. Cela faisait deux ans que je partageais un appartement avec des amis, et notre équilibre allait être bouleversé. Zoé étant partie poursuivre ses études à l'étranger, mes colocataires s'étaient chargés de lui trouver un remplaçant durant mon absence. Charles en avait bien évidemment profité pour se faire entendre : désormais, le maître mot de la cohabitation allait être la parité. Zoé allait être remplacée par un homme, sous prétexte que partager un appartement avec trois filles avait été l'expérience la plus traumatisante qui lui ait été donnée de vivre.

Il mentait.


Mais soit, Ninon et moi n'avions aucun problème à ce que Zoé soit remplacée par un homme. Pourquoi pas ?

J'ai très vite déchanté. Deux semaines plus tôt, Charles m'avait appelée : « Max, c'est quelqu'un de ta promo ! ». Cela s'annonçait tout de suite extrêmement mal. « Il s'appelle Soren.»

Prétentieux, odieux, froid. C'étaient les qualificatifs qui me venaient spontanément à l'esprit en pensant à lui. Comment Charles et Ninon en étaient-ils arrivés à le choisir lui plutôt qu'un autre ?

Je savais que ce n'étaient pas les candidats qui manquaient. Charles étant Charles, j'ai immédiatement réagit en le priant, au nom de notre Amitié, de se rétracter. J'ai même argumenté. C'était trop tard : il emménageait dès le lendemain.

J'allais m'en remettre. J'avais d'autres choses en tête, et j'avais surtout hâte de retrouver mon chez-moi. Peu importait qui s'y trouvait. 

L'atmosphère de l'appartement était restée la même. Les meubles, en revanche, avaient encore été changés de place. Je souris en le constatant, voyant que cette fois-ci, ils avaient fait fort. Le but n'était jamais d'améliorer la disposition des pièces mais bel et bien de déplacer le mobilier, ni plus ni moins. Seul Edmond, notre cactus, jouissait d'une vie stable.

Je fis un tour rapide du propriétaire mais il n'y avait pas âme qui vive. Je montai alors à l'étage pour rejoindre ma chambre. Sur le pallier se trouvait une autre chambre, autrefois celle de Zoé, et une salle de bain. Une fois ma lourde valise déposée devant ma porte, j'entrepris de chercher la clé de ma chambre. Le bras enfoncé jusqu'au coude dans mon sac à main, je cherchai mes clés à tâtons jusqu'à perdre patience. Agacée, je balançai mon sac au sol, m'accroupis, et repris la fouille à la lueur de la lampe torche de mon smartphone. Cette petite scène se produisait au minimum une fois par jour, dans le même ordre, simplement parce qu'exceptionnellement, il m'arrivait de la trouver immédiatement. Comme à chaque fois, je songeai : « Je pourrais la ranger toujours au même endroit. ». Mais, chaque fois que je quittais cette chambre, j'oubliais.

Le cerveau est fascinant.

En un coup de flash, je trouvai ma clé. Je déverrouillai la serrure et la verrouillai à nouveau une fois entrée dans la pièce. Ma pièce. Mon repaire, mon refuge. Je mis de la musique, fort, et déballai méticuleusement mes affaires pour les ranger. Pour reprendre possession des lieux le plus vite possible.

Toc, toc, toc.

Je souris.

- Maxy !

Love Me Wild [SOUS CONTRAT D'EDITION] / Anciennement À Nos Années De LibertéWhere stories live. Discover now