Elle voulait rejoindre les étoiles

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On lui avait dit de ne pas s'en approcher. Que cette fille était bizarre, une folle à lier que même les démons rechignaient à approcher. Pourtant, sans qu'il n'arrive à réfréner sa trop grande curiosité, il l'avait regardé.

Et ses yeux bleus l'avaient fixé en retour.

On lui avait dit que cette maison était maudite. Que parfois, les cris d'un père se faisaient entendre, et que le lendemain, la mère récupérait les bouts de vitre brisés. 

Mais Christophe avait été ambitieux, presque arrogant, lorsqu'il avait ignoré les conseils, balayé les inquiétudes d'un revers de la main. 

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Au début, il l'avait simplement suivie. Puis, approchée. Enfin, assis à côté.

Les autres avaient eu raison. Elle n'était qu'une simple fille bizarre, qui avait des problèmes.

Mais ladite dérangée s'était retournée vers lui, avec un immense sourire.

<< Tu es venu me parler ! >>

Elle le connaissait ? Sûrement pas. On aurait presque dit qu'elle s'y attendait.

Il aurait pu répondre toutes les répliques imprégnées de tout le sarcasme du monde, mais ses mots se retrouvèrent coincés. 

Ses yeux bleus, si profonds, si lumineux, si brillants.

Même s'il avait essayé, il n'aurait jamais pu dire non à ces yeux-ci.

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Il resta longtemps avec elle.

Au début, simple curiosité.

Puis, floraison d'une amitié.

Enfin, un sourcil haussé et un intérêt.

Elle parlait d'un monde idyllique.

Où les arbres seraient grands et majestueux, où les fleurs coloreraient le monde, où les papillons décoreraient le ciel. Des étoiles qui brilleraient de mille feux, protégeant la planète. Un monde empli de couleur, de beauté.

Un monde irréaliste.

Mais il ne pouvait la couper, car quand elle parlait, le bleu de ses yeux n'en était que plus rayonnant.

Elle voulait que les hommes serrent les mains des hommes, que les femmes embrassent les femmes, que les enfants courent dans les rues et sentiers des forêts sans se soucier des dangers. Elle souhaitait qu'entre eux les riches sourient gentiment, qu'ils tendent leur main aux innocents. Elle aimerait que les colombes volent dans les nuages, que les baleines chantent au milieu de l'eau, qu'au lieu d'être gris et fatigués les humains soient colorés et enjoués.

Elle rêvait que les rivières et les lacs deviennent aussi bleus que leur cousin les cieux, et que les étoiles illuminent ce joli petit paysage.

Elle était idéaliste.

Ça faisait froncer les sourcils de Christophe. Il ne comprenait pas, lui, ce qu'il y avait de si incroyable à un monde pareil. Qu'entendait-elle par coloré ? Il aurait pu lui citer les sept merveilles du monde, des forêts à couper le souffle et des fleuves pulsant dans le sol. 

À chaque fois, elle souriait, secouait la tête, et disait '' tu comprendras un jour ''.

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Elle voulait rejoindre les étoiles. 

C'était un étrange désir, qui se rajouta à la liste d'anomalies qu'il tenait de son amie. Lorsqu'elle fixait le ciel parsemé de ses occupantes, l'intensité de ses yeux si beaux changeaient, et on aurait dit qu'en parlant des astres elle parlait de son foyer. Il lui demanda pourquoi, et elle répondit '' Pour protéger ce beau monde que je construirai ! ''.

Christophe ne comprit pas.

Mais il ne posait pas de questions, parce qu'à chaque fois qu'il s'y aventurait, le bleu de ses iris se perdaient dans un monde qu'il n'atteindrait jamais.

Il arrêta de la suivre.

Il arrêta de l'écouter.

Il s'en était lassé, qui pour le blâmer ?

Malgré tout, la culpabilité subsistait en lui, et il ne put se résoudre à totalement l'abandonner.

Alors un jour, en ce jour d'été où le ciel était dégagé, et où les étoiles étincelaient, il se rendit à la vieille maison presque délabrée.

On lui dit qu'elle était partie.

Que la jeune fille s'était envolée, loin, très loin. 

En sortant, Christophe la vit. Souriant de toutes ses dents, ses yeux saphir l'appelait.

Alors, paniqué en la voyant s'éloigner, il la poursuivit.

Mais peu importe qu'il soit le plus rapide, elle lui échappait toujours. La rue, le ruisseau, la forêt, et leur coin favori. Essoufflé, il releva la tête, et aperçut une dernière fois ses yeux, avant de disparaitre.

En levant ses propres prunelles vers le ciel, Christophe resta bouche bée.

Et là, il comprit.

Il aurait presque pu s'imaginer la fille dansant parmi ses sœurs les étoiles, riant, chantant, enfin chez elle.

Elle était rentrée à la maison.

Elle pourrait alors faire ce qu'elle avait toujours souhaité.

Oui, il comprit, les joues ruisselantes de larmes, le monde qu'elle avait rêvé.

Elle avait toujours voulu rejoindre les étoiles, et elle brillait maintenant plus que toutes les autres.

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Au gré de ma plumeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant