Chapitre 10 : Instant suspendu

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     Où êtes-vous passée ? Besoin urgent à Baker Street

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     Où êtes-vous passée ? Besoin urgent à Baker Street. L'affaire Ford ne va pas se résoudre toute seule.

     SH.

oOo

     Ma mère ne va pas bien, j'ai posé trois jours de congés dans l'urgence pour aller soutenir mon père. Je reviendrai bientôt, la mise sous quarantaine ne prend fin que la semaine prochaine alors rien ne presse. Apprenez à vous passer de moi, un peu.

oOo

     Lucy s'amusait grandement de ces échanges numériques – elle imaginait sans peine le soupir agacé, le haussement de sourcil et la réflexion clamant ô combien elle était ridicule – et pour être franche, cela lui faisait du bien, surtout en ces moments-.

     Sa mère, Helena, avait été diagnostiquée bipolaire voilà plus de vingt ans à présent et, bien qu'elle ne prenne son traitement avec assiduité depuis ce jour, il lui arrivait toujours de traverser des hauts et des bas. Des moments de surexcitation, d'hyperactivité et d'euphorie incontrôlée, alternés avec des phases de dépression intenses, de noires ruminations et tout ce qui s'ensuit.

     Rien à voir avec la personnalité lunatique, avec laquelle la bipolarité était souvent confondue.

     L'on était dans ces jours sans, depuis un peu plus d'une semaine, Helena Evans luttait chaque matin pour sortir de son lit, rechignait à prendre ses médicaments (prétextant qu'ils ne servaient de toutes manières à rien) et passait le plus clair de son temps à dormir. Charles, son mari, épuisé à force de porter la maladie de sa femme sur ses épaules, avait passé un coup de fil à sa fille, l'air de rien.

     Oui, l'air de rien, mais Lucy avait sans mal perçu à quel point il avait besoin de soutien. Alors la jeune femme s'était empressée d'appeler ses collègues ainsi que sa remplaçante, s'était excusée de sa prochaine absence et, sans plus tarder, avait fourré quelques vêtements dans un vieux sac de voyage avant de se jeter dans sa voiture.

     Dire qu'elle était totalement indifférente face à la maladie de sa mère aurait été mentir mais après tout, elle avait passé la grande majorité de son enfance dans cette situation. Lucy avait grandi en sachant pertinemment que sa mère ne pourrait pas être aussi présente que l'étaient les mères de ses copines de collège, puis de lycée. Cela n'avait pas toujours été facile mais elle s'y était fait, s'était adaptée. Il fallait dire que lorsqu'elle était dans sa bonne période, Helena sacrifiait jusqu'à la plus petite minute de son temps pour ses enfants et lorsqu'elle en était incapable, son mari avait toujours assuré le relais avec brio.

     Mais les années passaient, Charles vieillissait et il avait beau aimer sa femme comme au premier jour, Lucy comprenait que par moment, il ait besoin de décompresser, de prendre l'air.

     Alors la jeune femme avait dégagé son vieux père de leur maison, avait appelé son meilleur copain – avec qui il avait fait l'armée – et leur avait ordonné de ne revenir qu'une fois la nuit largement entamée.

𝙳𝚘𝚌𝚝𝚎𝚞𝚛𝚎 𝙴𝚟𝚊𝚗𝚜 : 𝚕𝚎𝚜 𝚖𝚎́𝚊𝚗𝚍𝚛𝚎𝚜 𝚍𝚎 𝚕'𝚎𝚜𝚙𝚛𝚒𝚝Where stories live. Discover now