Prélude

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Il y avait peu de choses que Macon haïssait. Il était plutôt d'une nature ouverte, après tout. Ni de gauche, ni de droite, ni de haine, ni d'amour. Toujours le juste milieu. Un homme avisé, comme on n'en trouvait plus. Un homme brave, un homme fier. Chaque matin, en s'observant dans la glace, il se murmurait ces quelques paroles. "Ton pays a besoin de toi...". Non, vraiment, il n'y avait que deux ou trois choses que le Président de la République haïssait.

Ces connards de socialistes.  Les cheminots qui l'emmerdaient toutes les deux semaines. Ces gilets jaunes qui ne comprenaient décidément rien à l'économie. Macon était un homme mesuré. Les grévistes, les flemmards, les chômeurs, les assistés, les immigrés, l'opposition, les féministes et les journalistes de Mediapart. La liste était plutôt courte. Son incapable de premier ministre qui lui léchait tellement les bottes qu'elles en étaient devenues luisantes. Tout ces incompétents qui l'entouraient, dépassés à la moindre réforme.

Non, vraiment, tout allait pour le mieux. Il n'y avait qu'un type de personne que Macon détestait vraiment. Qu'il vomissait. Du plus profond de son âme. S'il en avait vu un sur le point de crever de faim et qu'il avait eu un sandwich dans la main il l'aurait dégusté devant lui avec délectation. Ce peuple ignoble, cette vermine qui osait parfois venir souiller son sol. Ces gens qui ne semblaient avoir aucun respect pour leur palet et se nourrissaient exclusivement de beans et de légumes bouillis. Les Anglais.

Ces mêmes anglais qui avaient osé vaincre le plus grand des Hommes. Le plus petit aussi, certes, mais la taille ne compte pas toujours. Cette âme si bonne qui avait su rendre à la France la gloire qui lui était due. Oui, Napoléon Bonaparte lui même, celui qui avait gâté le peuple français, ces ingrats qui l'avaient aussitôt rejeté. Ou plutôt monsieur le général Bonaparte.

Macon jeta un coup d'œil vers le coin de sa chambre. Là bas, dans à l'angle de son bureau, reposait la statue taille réelle de son idole de toujours. Il sourit, satisfait. Ce marbre lui avait coûté trois millions sept, mais il était nécessaire. Tout grand homme a besoin d'un modèle. Si Macon voulait sortir la France de sa déchéance, il lui fallait garder une certaine motivation : ces gueux n'avaient pas vraiment l'air de vouloir être sauvé.

Et Macon le savait, une grande menace planait sur son pays, et elle proviendrait de cette île de maudits. La France aurait bientôt à affronter le défi le plus démesuré de tous les temps, et il fallait mieux s'y préparer. Le peuple était inconscient, mais pas lui.

Il était prêt. 

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⏰ Last updated: Mar 17, 2020 ⏰

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De la haine à l'amour, il n'y a qu'une quarantaineWhere stories live. Discover now