Chapitre 7

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La semaine s'est écoulée lentement. Mon père n'avait pas ouvert une seule fois la bouche. Il restait dans son coin. Il a cru bon d'envoyer un message sur le portable de ma mère, mais aucune réponse de sa part est venue. Ce n'est pas étonnant. Il ne s'occupait plus de moi non plus ; il me laissait sortir malgré ses interdictions, ne prenait plus le temps de me faire mon petit-déjeuner, ne regardait plus mes œuvres.

Je profitais d'être virée de Dynaste pour dormir plus tard le matin et exercer d'autant plus mes passions. Je devais être à mon troisième croquis, accroché au mur, comme tous les autres. Je me suis également mise à écrire davantage ; textes, récits, poèmes, chansons.

Ces dernières, je les imaginais parfaitement avec la voix d'Alexandre. Cependant, il s'est éloigné de moi. À croire qu'il est de mèche avec mon père.

Je l'ai aperçu un soir sur deux à l'association, mais c'est à peine s'il me lançait un bonjour. Il s'était entouré d'autres artistes et reculait à chaque fois que je faisais un pas vers lui. Je lui ai fait peur en lui disant ce que j'avais sur le cœur. Au fond, il n'avait pas tort ; on ne se connaît pas. Tout ce que je sais, c'est qu'Alexandre est un chanteur ne voulant pas se montrer devant un grand public, autrement composé que d'artistes idolâtrant leurs passions, et qu'il travaille dans un café.

D'ailleurs, c'est là-bas que je me rends dans quelques minutes. Il est résigné à m'adresser la parole, mais il ne pourra pas me fuir une fois derrière son comptoir.

Je dois lui présenter des excuses. J'espère qu'il ne va pas les balayer d'un revers de la main et accepter de me tenir à nouveau compagnie. Je suis bien lorsque que je suis à ses côtés, je me sens un peu plus moi-même. Je ne sais pas comment l'expliquer, mais il est le seul effet positif de mon monde actuel.

J'enfile ma veste à toute vitesse, en restant pensive. Je n'arrête pas de me répéter cette phrase en boucle : je suis désolée.

Je me retrouve bien vite devant le bar, sans m'en apercevoir. Le trajet m'a paru trop rapide et je ne me sens plus si sûre. Je pousse la porte et observe l'intérieur. Le lieu est plutôt calme, pas de musique extravagante, peu de gens autour des tables, les lumières rouges accentuant la sérénité qui règne.

Des bruits de verres, qui tintent entre eux, attirent mon regard vers les serveurs.

Alexandre est là, vêtu de ce même polo noir brodé du logo de l'enseigne. Il est dos à la salle, il nettoie les étagères poussiéreuses où trônent de nombreuses décorations.

Après une grande inspiration, je m'avance vers le bar. Je m'assois sur l'un des tabourets en bois sombre et attends. Je n'ose pas l'appeler, de peur qu'il s'en aille à nouveau. Je fixe sa nuque, dans l'espoir que mon regard le fasse se retourner.

Joe, son collègue, pose la main sur son épaule. D'un mouvement de tête, il indique au brun ma présence.

Alexandre semble étonné. Il jette son chiffon sous le comptoir – probablement rangé avec d'autres bouts de tissus – et appuie ses paumes contre le meuble dressé entre nos deux corps.

— Qu'est-ce que je te sers ?

— Un café... S'il te plaît, ajouté-je en le regardant enfin dans les yeux.

Il reste tout aussi impassible. Le brun se met à travailler. Il ne parle toujours pas et n'ose pas me lancer des œillades.

Finalement, une fois la tasse brûlante entre les mains, il m'observe. Il est temps de crever l'abcès.

— Alexandre, je s...

— Pas la peine Élise, me coupe sa voix. Je sais.

Il m'offre un sourire timide.

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⏰ Last updated: May 10, 2020 ⏰

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Les notes vagabondesWhere stories live. Discover now